Je vais le dire sans ambages, avec beaucoup de respect pour l'énorme travail de recherche que
Christophe Bourseiller a déployé pour sa rédaction : la lecture de ce livre a, pour moi, été une souffrance, et si je n'avais pas eu "des comptes à rendre" dans le cadre d'une masse critique Babelio, je l'aurais sans aucun doute abandonné bien avant la fin.
Pourtant, le sujet m'intéressait, sans quoi je n'aurais pas pris le risque de "m'infliger ça". Alors, que s'est-il passé ?
D'abord, grosse douche froide, le décalage entre le contenu et la première/quatrième de couverture. En première, une photo de black bloc et le sous-titre "Zadistes, Blacks blocs, situationnistes, néo-anarchistes, communistes libertaires", soit une image et pas mal de mots qui évoquent l'histoire récente (et même contemporaine). En quatrième, ce texte : "Ils ont pour nom les black blocs, les antifas, les autonomes, les zadistes. (...) Ce sont eux les "infiltrés", les "provocateurs", les "casseurs" qui, au sein des manifestations, affrontent les policiers, vandalisent les commerces, dégradent les monuments..." etc. 80% de la 4ème de couverture est consacrée à ces phénomènes ultra-récents et même actuels. Dans le livre, Bourseiller y consacre très exactement 15 pages... sur 370.
Selon moi, cette présentation pour le moins trompeuse risque de décontenancer (voire d'énerver) plus d'un lecteur.
Bon, finalement, nous sommes partis pour reprendre les origines idéologiques de l'ultra-gauche par le menu, en insistant bien sur les années 20, l'après-guerre et les années 60-70. Allons-y, après tout, ça peut aussi être intéressant...
Et là, deuxième douche froide, me voilà confronté à un véritable pensum de mouvements qui se créent, qui se défont, qui se refont, de revues qui sont publiées, abandonnées, de personnages qui apparaissent, disparaissent, réapparaissent, sans aucune notice biographique nous permettant de les situer ou de nous les rendre un minimum sympathiques (ou antipathiques, mais quelque chose, quoi !)
Là, malgré toute ma bonne volonté, j'ai dû lire en diagonale certaines de ces très nombreuses et interminables énumérations de noms et de titres de revues (d'une demi-page parfois) dont je n'avais pour la plupart jamais entendu parler.
On cherchera en vain, dans ces lignes, la moindre pédagogie. Jamais l'auteur n'explique ce qu'est le conseillisme, le situationnisme, le trotskisme, le marxisme-léninisme, le maoïsme... Pour le savoir, j'ai dû avoir recours à Wikipédia. Il ne s'agit donc pas d'un livre de vulgarisation pour profanes ou même semi-profanes (ma culture sur le sujet n'était pas très étendue, certes, mais je ne partais pas non plus de rien), mais plutôt d'une litanie factuelle et indigeste de dates, noms, titres, faits, à l'usage des universitaires.
Quant à la "valeur historique réelle" de ces faits, si je puis m'exprimer ainsi, je reprends les termes de l'auteur dans sa conclusion, ils me paraissent assez éclairants : "que doit-on penser de ces agrégats minuscules qui se défont dans l'indifférence, de ces maigres ténors qui s'égosillent sans haut-parleur ? N'est-il pas quelque chose de dérisoire dans ces bataillons dépenaillés, ces régiments sans généraux, ces phalanges d'intellos au verbe haut mais souvent obscur (...) ?"
Dérisoire en effet, c'est bien le minimum. Pathétique serait même plus juste. Autant de pages consacrées aux faits et gestes de quelques pitres sans envergure, sous une forme aussi âpre et aride, c'était beaucoup me demander.
Merci à Babelio et aux éditions du Cerf pour cette masse critique non-fiction.