Il est bon aussi de rappeler d'où l'Europe a tiré les sucs nourriciers dont elle s'est engraissée. La réponse est simple : elle les a pris en dehors d'elle. Elle les a empruntés au monde gréco-romain qui l'a précédée, puis au monde de culture arabe qui s'est développé en parallèle avec elle, enfin au monde byzantin. C'est du monde arabe, en particulier, que sont venus les textes arabes d'Aristote, de Galien, et de bien d'autres, qui, traduits en latin, ont nourri la Renaissance du XIIe siècle. C'est du monde byzantin que vinrent les originaux de ces mêmes textes, qui en permirent une étude plus précise et alimentèrent la floraison scholastique du XIIIe siècle. Que serait Thomas d'Aquin s'il n'avait trouvé en Averroès un adversaire à sa mesure ? Que serait Duns Scott s'il n'avait trouvé en Avicenne, pour reprendre la formule de Gilson, un "point de départ" ? Et bien des textes dont l'Europe s'est nourrie lui sont venues par l'intermédiaire des traducteurs juifs. L'Europe doit ainsi prendre conscience de l'immensité de la dette culturelle qu'elle a envers ces truchements (c'est d'ailleurs un mot arabe...) : envers les Juifs, en dehors d'elle comme en son intérieur, ainsi qu'envers le monde de culture arabe, chrétiens comme musulmans.
Les religions sont à l'origine des conflits ? Mènent-elles à la violence, ou bien pacifient-elles les rapports humains ? Font-elles plus de bien que de mal ?
Ce débat oppose Pierre Conesa agrégé d'histoire, ancien administrateur civil au ministère de la Défense, auteur de nombreux essais sur les fondamentalismes religieux, et Rémi Brague philosophe et historien de la philosophie, membre de l'Institut de France.
Les toiles qui servent de décor à cet échange font partie de l'exposition Stat Crux du peintre François-Xavier de Boissoudy.
Chapitrage
0:00 : Introduction
1:56 : Les radicalismes religieux
11:50 : La violence dans les textes sacrés
27:17 : Articulation du politique et du religieux
40:50 : Idéologie VS radicalisation
57:52 : Religions, vecteurs de pacification
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