C'est le troisième roman de l'auteure que je lis et une nouvelle fois je suis happée par l'histoire et l'écriture d'
Adèle Bréau, d'autant plus que ce roman est totalement personnel puisqu'elle y rend un bel hommage à
Menie Grégoire qui n'est autre que sa grand-mère.
Je me souviens parfaitement de
Menie Gregoire et de ma propre grand-mère paternelle qui ne manquait jamais de l'écouter. C'était son moment, en hiver c'est au coin de sa cheminée qu'elle était en totale osmose avec Menie et les femmes qui osaient s'exprimer, en été, elle se mettait dans son transat au bout du jardin, la radio à côté d'elle en sourdine et sale temps pour qui aurait osé la déranger.
Dans ce roman l'auteure nous dresse le portrait de quatre femmes, nous sommes en 1968 avec Mireille et Suzanne, elles sont soeurs. Mireille est mariée et allaite son sixième enfant, elle est épuisée, Lucien son mari partira travailler comme d'habitude et la laissera seule gérer la maison et les enfants, elle ne s'en sort pas, les deux derniers se suivent, elle enchaîne les tétées, les couches, elle est au bord de l'implosion, Mireille ne veut plus d'enfants, elle aimerait avoir un peu de temps pour elle, juste pour souffler. Suzanne, sa soeur est un peu plus libre, elle travaille et sort avec Robert qui lui promet monts et merveilles et qui détale lorsque Suzanne l'informe qu'elle est enceinte.
En 2021 nous faisons la connaissance d'Esther, elle est démolie par son histoire d'amour avec Pietro qui la battait, elle tente de se reconstruire mais c'est compliqué. Son amie Katell lui propose un job, faire un tri dans les archives qui concernent
Menie Grégoire afin de rédiger un bel article sur le féminisme et sur une femme qui a fait bouger les mentalités. Vous l'avez compris, La quatrième femme c'est tout naturellement Menie, elle est le fil conducteur qui relie toutes ces femmes qu'
Adèle Breau nous décrit dans son roman.
ALORS MENIE S'ÉTAIT RÉSOLUE À FROISSER LES HUIT FEUILLETS QU'ELLE AVAIT POURTANT ÉCRITS ET RÉÉCRITS ET S'ÉTAIT LANCÉE, SANS RESPIRER, COMME LORSQU'ELLE SAUTAIT AUTREFOIS DANS LA RIVIÈRE DE PLASSARD, PARCE QU'ELLE SAVAIT QUE L'EAU SERAIT GELÉE MAIS QUE C'ÉTAIT LE SEUL MOYEN D'Y ENTRER AVANT DE S'HABITUER À LA MORSURE.
L'auteure nous dresse un très beau portrait de sa grand-mère, de ses premiers pas à RTL, de son succès qui ne cesse de croître et de toutes les auditrices dont elle est désormais la cheffe de file. Menie tente de concilier difficilement vie publique et vie privée. Elle devient vite incontournable faisant partie du PAF dans les années 70 où les femmes n'ont pas encore totalement trouvé une vraie liberté.
Pilule, avortement, travail, droits, voilà ce qui préoccupe la majorité et Menie n'hésite pas à distiller de nombreux conseils afin d'améliorer le quotidien de ces femmes qui souffrent toujours et encore du patriarcat. Menie est une femme libre qui fait fi des convenances, elle se jette à corps perdu dans son travail et dans cette bataille du féminisme dont elle ne peut plus sortir, quitte à parfois se perdre et en oublier sa famille.
Avec ce roman, je découvre que Menie a subi beaucoup de désagréments par la gent masculine mais aussi par les femmes, elle a été montrée du doigt, chahutée, c'était parfois violent, c'est un morceau de l'histoire que je ne connaissais pas, elle n'a pas lâché, c'est une femme courageuse et pleine de convictions.
Quel beau roman, j'ai beaucoup aimé découvrir des pans de vie de Menie qui était quand même une sacrée femme, à l'époque il fallait oser et elle l'a fait. Elle a certainement aidé des millions de femmes et peut-être même sauvé certaines. J'ai eu énormément d'empathie pour Mireille qui subit à longueur de temps et qui rêve d'autre chose. J'ai été surprise par sa résilience et j'ai commencé à respirer quand je me suis rendu compte que sa condition allait s'améliorer. Il en va de même pour Suzanne qui va s'en sortir et changer radicalement de vie. Les deux soeurs savent que l'artisan de ces changements se nomme
Menie Grégoire.
Enfin il faut souligner le destin d'Esther qui, en 2021, est quand même mieux lotie que ses consoeurs du siècle précédent question droits de la femme, pourtant elle vit un cauchemar et c'est encore Menie, malgré son décès depuis 7 ans, sera l'élément déclencheur et va lui donner la force de se reconstruire. Un très bon roman que je conseille et qui rend hommage à des femmes formidables qui, à leur manière, on fait avancer la condition féminine, on ne peut que les admirer !
ELLE QUI AIMAIT TANT LES RIVIÈRES, OUI JE CROIS QU'ELLE A LANCÉ LE PREMIER CAILLOU QUI A CONTINUÉ DE REBONDIR ENSUITE, INLASSABLEMENT, DE FEMME EN FEMME, DE MÈRE EN FILLE, DE SOEUR EN SOEUR.
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