Confiteor

Tout se limite au fait que j'ai perdu la foi. Je l'ai perdue goutte à goutte et je n'ai pas été capable de la conserver. Je suis responsable : confiteor.

Si, maintenant, je pouvais recommencer ma vie, la première chose que je ferais ce serait de chercher le territoire du bonheur ; et si possible, j'essaierais de le fortifier pour le garder, sans prétention, pendant toute ma vie.

Toute ma vie , j'ai mélangé les choses . Je ne le dis pas avec fierté ; plutôt avec une résignation contenue. J'ai eu beau essayer, je n'ai pas su créer des compartiments étanches et tout se mélange, comme en cet instant où je t'écris et que mes larmes me servent d'encre.

_ Comment ça se fait que tu ne vas pas à la messe ?
_ J'ai la permission !
_ De qui ? De Dieu ?
_ Non : du père Anglada
_ Purée. Mais pourquoi tu n'y vas pas ?
_ Je ne suis pas chrétien.
_ Purée !..._silence désorienté_ C'est possible de ne pas être chrétien ?
_ Je suppose. Moi je ne le suis pas.
_ Alors, qu'est-ce que tu es ? Bouddhiste ? Japonais ? Communiste ? Hein ?
_ Je ne suis rien ?
_ On peut être rien ?

Je n'ai jamais su répondre à cette question qu'on m'a posée quand j'étais enfant, parce que l'énoncer m'angoisser.

Celui qui fuit de lui-même voit toujours l'ombre de son ennemi le talonner et il ne s'arrête jamais de courir, jusqu'à ce qu'il en crève.

Silence épais, solide. Les neurones de papa font du bruit en réfléchissant.

Je répète : très bien, il me semble que tu as raison. Et je précise encore davantage : c'est la seule fois de ma vie qu'il m'a donné raison. Si j'avais été fétichiste, j'aurai encadré cette phrase, le jour et l'heure de l'événement. Et j'en aurais fait une photo en noir et blanc.

Je n'appris que de nombreuses années plus tard pourquoi elle pleurait, mais alors j'appris qu'il y avait des peines qui pouvaient durer une semaine entière et j'eus un peu peur de la vie.

Quand j'avais sept ou huit ans je pensais que je prenais des décisions à propos de ma vie. Une décision très sage était de laisser maman s'occuper de mon éducation. Mais apparemment les choses n'étaient pas aussi simples.

Ce n'est qu'hier soir, alors que je marchais dans les rues trempées de Vallacarda, que j'ai compris que naître dans cette famille avait été une erreur impardonnable.