AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782213704616
464 pages
Fayard (29/08/2018)
3.87/5   31 notes
Résumé :
Une personne, une voix : la démocratie repose sur une promesse d’égalité qui trop souvent vient se fracasser sur le mur de l’argent. Financement des campagnes, dons aux partis politiques, prise de contrôle des médias : depuis des décennies, le jeu démocratique est de plus en plus capturé par les intérêts privés.
Se fondant sur une étude inédite des financements politiques privés et publics dans une dizaine de pays sur plus de cinquante ans, Julia Cagé passe... >Voir plus
Que lire après Le prix de la démocratieVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Dans un essai richement documenté, clair et foncièrement didactique – sans pour autant ne pas s'inscrire dans un ton plus polémique qui secouera parfois, non sans humour d'ailleurs, le lecteur -, Julia Cagé décrypte, à partir d'une dizaine de pays, dont la France, l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, ou encore les Etats-Unis pour une grande part, et ce à l'échelle d'une cinquantaine d'années, voire de plus d'un siècle pour certaines prises en compte historiques utiles à son propos, ce qu'est réellement le prix de la démocratie. Ou comment, au fil des années, le financement privé des partis politiques a, malgré des lois votées dernièrement pour le limiter, de plus en plus pris le pas sur leur financement public. Comment aussi, quand financement public il y a, celui-ci reste surtout tributaire des plus riches, pour finalement en arriver à une situation dans laquelle un citoyen n'a plus du tout le même poids – financier d'abord, démocratique ensuite -, sur le cours des choix électoraux, en prolongement sur les lois qui vont suivre et qui avantageront forcément les principaux donateurs. Et surtout, en quoi, enfin, ce système extrêmement pervers, bien en place aux Etats-Unis depuis une dizaine d'années, commence à s'installer de plus en plus insidieusement en Europe.

Ainsi, en trois parties bien distinctes, l'économiste nous décrit dans les moindres détails – graphiques, chiffres et exemples concrets à l'appui, très éclairants -, et pour reprendre ses termes, "le financement de la démocratie électorale" : d'abord "les méandres des financements privés" , puis "les tentatives […] d'introduction des financements publics" , et enfin "les propositions raisonnées permettant de sortir de ces contradictions [que crée cet entre-deux]" . L'on passe progressivement, et avec beaucoup de cohérence, d'un propos majoritairement objectif qui relate des faits que l'on ne peut dénier, et qui inquiète sur l'évolution du financement de nos démocraties, à un propos plus subjectif, mais tout de même rigoureux et argumenté, quant à des solutions proposées pour en arriver à un financement véritablement égalitaire qui ne profiterait plus qu'aux plus riches.

Malgré tout, bien que cet essai soit passionnant car particulièrement dense, complet et pertinent, j'ai été gênée par un point qui, à mon sens, nuit un peu à la démonstration. En effet, la répétition de certaines informations au fil de celle-ci, sans que ces répétitions n'apportent de véritable force argumentative, m'ont semblé superflues, alourdissant bien souvent le propos. Ainsi, l'auteure nous indique très souvent qu'elle va revenir sous peu sur un point qui lui semble important, et voilà que sont déjà développés, au moment où elle le note, des éléments sur ce point qui devait être abordé par la suite, et le lecteur se retrouve avec moult redondances qui ont tendance à lui faire perdre le fil de la démonstration. Cela se retrouve surtout s'agissant des solutions proposées, qui vont revenir matraquer à de nombreuses reprises les deux premières parties, qui sont pourtant, censément, être le diagnostic de la situation posée.

Je remercie les éditions Gallimard et Babelio de m'avoir permis de découvrir cet essai qui était dans ma PAL depuis quelque temps. Je ne suis pas mécontente de cette découverte car malgré le défaut énoncé précédemment, il n'en reste pas moins que le prix de la démocratie est une démonstration passionnante, qui dénote un vrai travail de fond comme je les apprécie, et qui met en lumière les rouages de nos démocraties occidentales bien moins idéales qu'elles n'y paraissent sur papier.
Lien : https://lartetletreblog.com/..
Commenter  J’apprécie          150
On voit, aux États-Unis, un milliardaire républicain devenu démocrate défier à coups de publicités ruineuses le Président en titre, milliardaire démocrate devenu républicain. Michael Bloomberg n'aura pas réussi, au bout du compte, à devenir le "challenger" de Donald Trump, mais le citoyen a l'impression qu'une élection, dans ce pays, comme dans d'autres, peut-être achetée plutôt que gagnée. On se souvient, en France, du système Dassault d'achat des votes. La plupart des partis français font l'objet d'investigations judiciaires pour financement illégal. Existe-t-il d'ailleurs un pays qui y échappe ? C'est dire si l'argent, qui fait le prix, au sens économique du terme, de la démocratie, importe pour garantir son authenticité.
C'est dire l'intérêt du livre de Julia Cagé, désormais disponible en édition de poche, avec une intéressante préface actualisant son propos à l'été 2019. Son propos est assez simple au total : l'agent a un impact direct sur les chances d'être élu : l'élection se joue "à qui paie gagne". Mais les inégalités sont aussi dans les mécanismes de financement des partis. Même lorsque les États ont limité les dépenses par la loi, l'examen attentif des méandres des législations montre que les systèmes de réductions fiscales favorisent les plus riches qui se font rembourser la plus grande partie de leurs dons par les déductions d'impôt et donc par le financement de tous, y compris les moins favorisés qui en sont de leur poche. La démonstration, appuyée sur une riche base de données historiques et géographiques, accessible aussi en ligne, est implacable.  Tout est passé en revue méthodiquement : le financement des campagnes électorales, celui des partis, l'emprise sur les médias. L'argent reste roi, mais caché. Et il apparaît que les partis de droite en reçoivent davantage que les partis de gauche, partout où porte l'étude.
Au diagnostic succèdent les propositions, soigneusement argumentées : il faut plafonner les dons, transformer les réductions accordées aux contribuables imposables en crédits d'impôt, ouverts à tous. La proposition la plus innovante, mais aussi la plus complexe, est celle des « bons pour l'égalité démocratique » (BED). Un peu à l'image de la République fédérale d'Allemagne, qui permet ainsi de financer les cultes, Julia Cagé imagine un système permettant à chaque contribuable, lors de sa déclaration d'impôt annuelle, de choisir un parti auquel le Trésor public versera une certaine somme. Un substitut à l'idée, soutenue par un éphémère ministre de la Justice, et aussitôt abandonnée, d'une "Banque de la Démocratie".
La démocratie n'a pas de prix, mais elle a un coût qu'il est déraisonnable de ne pas assumer à son juste niveau. Quelques euros par citoyen suffisent, évitant ainsi les contributions se fassent dans des conditions qui faussent pas le jeu au profit des plus favorisés. le "quid pro quo", dont Donald Trump a rappelé l'usage, n'est en effet jamais étranger à la générosité des nantis.
On doit pourtant relever que le propos de l'auteur, aux plus hauts titres académiques, mélange souvent l'analyse la plus fouillée avec des propos polémiques ou partisans qui nuisent à la démonstration plutôt qu'ils ne l'étayent. le style en souffre, souvent relâché, comme sous la dictée, peut-être pour entraîner la lecteur à franchir d'arides démonstrations chiffrées, lesquelles auraient pu être renvoyées en annexe pour faire un peu plus court (528 pages !).
"Qui bene amat"... Cette réserve n'enlève rien sur le fond à l'intérêt d'un travail que l'on aimerait voir se poursuivre avec l'analyse des lobbies, dont le rôle, lui aussi, est inversement proportionnel à la visibilité.
Commenter  J’apprécie          10
J'ai reçu cet essai dans le cadre d'une opération Masse critique, et il m'est véritablement difficile à critiquer...

En effet, le prix de la démocratie abonde en informations et sujets très intéressants : le financement actuel et historique des systèmes politiques et des partis de différents pays, dont la France, les Etats-Unis, l'Allemagne, l'Italie, le Royaume-Uni et l'Espagne sont les plus fouillés, de nombreuses données chiffrées et récentes, des références à des ouvrages politiques et d'étude de la société divers, ainsi que des propositions intéressantes pour palier au biais qu'instaure la possibilité pour les entreprises et les particuliers de contribuer sans limite aux campagnes électorales.

Cependant, j'ai eu un mal fou à lire ce pavé indigeste de 500 pages, sans compter les nombreuses notes. La structure globale de l'essai me laisse perplexe, tout semble dit dès l'introduction, très longue, et dont on retrouve des passages presque copiés collés plus loin dans le livre ; certains exemples sont convoqués une demi-douzaine de fois (on a bien compris que Philip Morris et Daimler finançaient différents partis en Allemagne...), l'auteur se répète, alourdit le récit par des "comme nous l'avons vu au chapitre X", "comme nous le verrons au chapitre Y", "c'est l'objet de ma proposition", enchaîne avec des commentaires tout sauf neutres, qui semblent laisser entendre au lecteur qu'il a bien peu de jugeote s'il ne se range pas à son avis...Tout cela rendant la lecture presqu'insupportable. Ce n'est que mon humble avis, mais je pense qu'il serait judicieux de supprimer quelques centaines de pages et de revoir la structure globale tant les redites sont nombreuses, et chaque chapitre un fourre-tout dont on ne se souvient plus l'intitulé passées deux pages.

Dommage ! Car le fond est intéressant, et mériterait d'être plus connu...
Commenter  J’apprécie          30
Essai dense et très documenté sur le financement des systèmes électoraux en France, Allemagne, Grande-Bretagne, Italie, Belgique et aux États-Unis. En résumé : à cause de la prééminence des financements privés sur ceux du public et des défauts du système de financement public (notamment par le jeu des déductions fiscales), dans nos démocraties, les (ultra-) riches ont un vote qui a plus de poids que celui des pauvres ce qui in fine influence les résultats des élections (constatation statistique).

Ce livre contient beaucoup beaucoup de chiffres ! Ça donne le tournis. Et beaucoup de graphiques (68 en tout). L'autrice s'en excuse dans l'introduction. C'est un peu inhérent à ce genre d'essai car la démonstration se veut rigoureuse et scientifique. Et elle l'est.
En fait, j'ai trouvé que malgré l'avalanche de chiffres et de graphiques, la lecture est agréable grâce à des explications claires (pas de jargon technique), au style fluide parfois humoristique et caustique. L'autrice prend partie (on aura deviné qu'elle est plutôt à gauche ...), elle n'hésite pas à se scandaliser des iniquités des systèmes de financement des élections élaborés par et pour les riches. Cela rend son propos très vivant.

En revanche, je pense qu'elle aurait pu faire l'économie d'une centaine de pages ... Il y a beaucoup de répétitions.
A chaque chapitre, revient comme une antienne sa proposition phare des BED (Bon pour l'égalité démocratique) développé à l'avant dernier chapitre ainsi que l'idée d'une assemblée sociale (plus représentative de la population française que l'Assemblée Nationale actuelle). Elle répète à satiété l'iniquité des financements qui favorisent le vote des plus riches. On avait bien compris la thèse dès l'introduction ! Système actuel : pas bien, système des BED qu'elle propose : bien ou disons moins pire.
Au chapitre VII sur les dérives du système américain, il y a un passage intéressant sur le vote des pauvres aux États-Unis qui paradoxalement ont tendance à se tourner vers des candidats très conservateurs prônant moins d'État moins de social ce qui en définitive en vient à détériorer les conditions de vie de l'électorat défavorisé qui ont voté pour eux !

En résumé : un très bel essai plaisant à lire et très instructif. On se demande bien pourquoi les politiques ne se sont pas emparés des thèses du livre pour proposer des réformes...



Commenter  J’apprécie          00
"Le prix de la démocratie" s'intéresse au financement de la démocratie dans plusieurs pays tels que la France, l'Allemagne, l'Italie, le Royaume-Unis ou les États-Unis.
Le sujet est intéressant et les apports (chiffrés, notamment) sont riches.
Seulement, ce livre de plus de 500 pages pourrait être largement réduit et la lecture m'a donc été pénible. Julia Cagé se répète à outrance, mentionne un bon milliard de fois ses solutions (Bons pour l'égalité démocratrique et Assemblée mixte) qu'elle détaille pourtant dans sa dernière partie, formule systématiquement de grandes conclusions à la fin de chaque sous-chapitre ou chapitre. Dans l'édition que je possède, les notes de bas de pages (très nombreuses) sont regroupées à la fin du livre - autant dire que je ne les ai pas lues ! -.
Ainsi, si le fond de l'ouvrage est pertinent, la forme est véritablement à revoir.
Commenter  J’apprécie          10


critiques presse (1)
LaViedesIdees
27 mars 2019
Les modes de financement des partis politiques, y compris en France, tendent à renforcer l’invisibilité de certains groupes et l’influence politique des plus aisés, notamment les partis de droite. Y a-t-il, se demande Julia Cagé, des moyens plus démocratiques de financer la démocratie ?
Lire la critique sur le site : LaViedesIdees
Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Non seulement ce système est régressif et profondément inégalitaire, mais il risque en outre de conduire dans les prochaines décennies à une augmentation encore plus forte des inégalités, à un rejet encore plus massif du personnel politique, des institutions et du jeu démocratique, et à une montée des populismes face à laquelle il risque un jour d'être trop tard.
Commenter  J’apprécie          80
32 euros. C'est le prix de votre vote. Quand on sait que l'Etat consacre chaque année moins d'un euro par Français au financement public direct de la démo cratie, mais qu'il rembourse en moyenne pres de 165 euros par an aux quelque 290 000 contribuables ayant financé le parti politique de leur choix et près de 5 000 euros à chacun des 2 900 foyers ayant contribué le plus , on comprend mieux les interrogations qui entourent la qualité de notre démocratie Pourquoi, en effet, l'argent public devrait-il permettre à certaine de s'echeter l'équivalent de près de cinq voix, voire de plus de cent cinquante voix pour les plus riches Pense-t-on vraiment que notre démocratie a besoin de ce biais supplémentaire en faveur des plus favorisés? Et c'est sans compter la dépense fiscale associée aux dons aux campagnes. Alors que l'Etat rembourse en moyenne chaque année 52 millions d'euros à l'ensemble des candidats prenant part au jeu électoral - et donc bien davantage les années d'élection, les différentes campagnes reçoivent 12 millions d'euros de dons privés, donnant lieu a près de 8 millions d'euros de réduction d'impôt. 8 millions contre 52 millions, certes, mais 8 millions d'euros à répartir entre quelques dizaines de milliers d'individus ayant exprimé leurs préférences politiques par des dons privés (soit plusieurs centaines d'euros d'apport par donateur, voire plusieurs milliers d'euros pour les plus riches), quand les 52 millions d'euros de financement public sont eux, à répartir entre tous les Francais (soit moins d un euro par citoyen).
Commenter  J’apprécie          00
Au final, dans de nombreux pays, les forces conservatrices ont fait d'une pierre deux coups en affaiblissant tout à la fois les syndicats et les partis à gauche de l'échiquier politique. La gauche a abandonné le conflit de classe et les questions de redistribution au fur et à mesure qu'elle se nourrissait des contributions des intérêts privés.
Commenter  J’apprécie          30
Ce qu'il faut refuser, c'est que les grandes entreprises prennent la main sur les orientations de la société.
Commenter  J’apprécie          110
D'ailleurs, si, comme électeur, vous avez tourné depuis longtemps la page du jeu démocratique - à quoi bon me déplacer si ma voix compte si peu, pourquoi tenter une couleur si les jeux sont déjà faits ? -, c'est comme citoyen-contribuable que vous devriez être choqué par ce niveau d'inégalité. Et par la manière dont l'argent public est dépensé. Un exemple : pour un individu au revenu imposable de 100 000 euros, le coût réel d'un don de 6000 euros à un parti politique n'est que de 2 040 euros. Les 3 960 euros restants sont à la charge de l’État, c'est-à-dire de l'ensemble des contribuables. Quel serait le coût du même don pour un étudiant, un travailleur précaire ou un retraité au revenu imposable inférieur à 9 000 euros ? 6 000 euros. Plus de la moitié des foyers fiscaux sont exonérés d'impôt sur le revenu en France, ce qui implique que, bien que ces contribuables soient par ailleurs lourdement imposés, ils doivent payer plein pot leurs contributions politiques, quand les plus riches, eux, sont subventionnés aux deux tiers par l’État. Qui peut le plus, paie le moins : ainsi fonctionne le système fiscal de financement public indirect de la démocratie en France, un système régressif et injuste où ce sont les pauvres qui paient pour les riches.
Commenter  J’apprécie          00

Videos de Julia Cagé (24) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Julia Cagé
Intervenants: Julia CAGÉ, professeure d'économie à Sciences Po Paris et Thomas PIKETTY, directeur d'études à l'EHESS et professeur à l'école d'économie de Paris Modération: Philippe ESCANDE, journaliste au Monde
Qui vote pour qui et pourquoi ? Comment la structure sociale des électorats des différents courants politiques en France a-t-elle évolué de 1789 à 2022 ? Dans quelle mesure les coalitions au pouvoir et dans l'opposition ont-elles su rassembler les classes populaires, moyennes ou aisées et fédérer des intérêts divergents, et comment cela a-t-il participé au processus de développement social, économique et politique du pays ? En s'appuyant sur un travail inédit de numérisation des données électorales et socio-économiques couvrant plus de deux siècles, cet ouvrage propose une histoire des comportements électoraux et des inégalités socio-spatiales en France de 1789 à 2022.
+ Lire la suite
autres livres classés : politiqueVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus


Lecteurs (162) Voir plus




{* *}