J'apprécie
Jonathan Coe depuis fort longtemps et je me réjouissais de pouvoir me plonger dans un nouvel opus, savourer son humour sarcastique, et suivre son regard lucide sans complaisance sur ce Royaume qui n'a plus rien d'uni. le roman se lit facilement, avec un plaisir certain, toutefois, je ne l'ai pas terminé avec bonheur.
D'abord, la construction m'a embarrassée : si on suit la vie de Mary et de sa famille, de 1945 à 2020, on a une pléthore de personnages qui se baladent dans des épisodes dont la chronologie fait salade mêlée. Fort heureusement, l'éditeur a pris le soin de mettre en prélude (car il y a aussi un prologue) un tableau généalogique, dans lequel figurent des personnages dont on ne parlera pas dans le roman, et des personnages absents du tableau arriveront dans le corpus du livre. de plus, les chapitres qui nous mènent de 1945 à 2020, sont de véritables sauts pour se consacrer à des "évènements" cruciaux dans l'histoire de ce Royaume, d'après l'auteur et pour étayer sa démonstration que rien ne va plus. J'ai volontiers accepter la règle du jeu, mais j'en ai retenu une espèce de meli melo, dans lequel toutes les étrangetés de ce Royaume étaient abordées. Chacun de ces évènements montre l'union de cette nation monarchique. Soit au bénéfice de la monarchie elle-même, le couronnement d'Elizabeth en 1953 (chapitre deux), le mariage de Charles et Diana (chapitre cinq), les funérailles de Lady Spencer (chapitre Six), soit au bénéfice de l'Union (chapitre Un, Trois et Sept).
Jonathan Coe sélectionne ces "dates" historiques pour montrer plusieurs choses, des superficielles et des plus profondes (et cela m'a aussi embarrassée). Il évoque beaucoup l'irruption puis l'intrusion de la télévision dans le quotidien des Britanniques. C'est drôle, et empli de vérité. Ainsi, les familles sans télé, s'incrustent dans les foyers où il a le fabuleux poste (à l'époque gros comme deux lave-linge), la maitresse de maison ne sait plus où les faire asseoir. Plus sérieusement, il évoque la désindustrialisation avec le cas de Cadbury. Là, déception. le sujet est juste effleuré. En cause, les sauts chronologiques. L'Europe de Bruxelles apparaît aussi au virage...
Et encore plus profondément, la désunion, le délitement et l'émergence des nationalismes, ici gallois. Cette partie m'a le plus intéressée.
Mais à chaque fois, je suis restée sur ma faim.
Si je me prête au roman, je me demande : que sont devenus ces personnages, vus dans tel et tel chapitre ? Pffouff, disparu. L'homosexualité est également évoquée avec le personnage de Peter. Et enfin la gestion de la pandémie causée par le Covid-19, et l'abandon des vieux à leur sort.
Jonathan Coe règle aussi ses comptes car dans ces pages, la réalité égale la fiction et elle est cruelle, violente, douloureuse.
Je me suis demandée si
Jonathan Coe n'avait pas écrit une espèce de vomissement sur tout ce qu'il ressent sur son "Angleterre", non pas une indigestion mais un rejet de bile, avec beaucoup d'amertume. Car cet humour sarcastique, pince-sans-rire, que je n'ai pas toujours retrouvé, s'est "jauni".
J'encourage néanmoins la lecture de ce roman, d'abord car son auteur est un grand bonhomme qui sait écrire, et ensuite pour les pages sur le nationalisme gallois, et enfin pour le personnage de Mary, son héroïne, une belle personne.