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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Le narrateur Liam vit loin du monde, dans une région de montagnes et de forêts encore sauvages, où il subsiste de la chasse et de la trappe, laissant seuls à la maison, pendant ses longues et très fréquentes absences, sa compagne Ava et son fils de cinq ans, Aru. Mais un jour, l'attend à son retour le corps sans vie de la jeune femme, tuée par un ours dont elle a juste pu protéger l'enfant. Déchiré entre son rôle de père et la gageure d'élever seul un bambin dans l'isolement de ces contrées inhospitalières, l'homme décide de se séparer de son fils et s'engage avec lui dans un périple dont les péripéties vont pourtant s'acharner à contrecarrer ses plans…


D'emblée, l'on pense à John Haines, le poète et écrivain américain qui, lui aussi, choisit la solitude dans une nature âpre et sauvage – dans son cas, l'Alaska –, subsistant en quasi autarcie de la pêche, de la chasse et de la trappe au rythme de tâches éprouvantes et physiques, la moindre négligence l'exposant à d'imparables dangers si loin de tout secours. Mais, contrairement à l'auteur du récit Les étoiles, la neige, le feu, le personnage imaginé par Sandrine Collette est un homme rustre, issu de la misère et de la maltraitance, qui, tel un loup quittant la meute, n'a trouvé de salut qu'en fuyant ses congénères, leur méchanceté et la rage qu'elle déclenche en lui.


Sous ces dehors brutaux, cet homme, que l'on pourrait dire revenu à une forme de primitivité presque animale dans sa vie toute entière consacrée à la simple subsistance en milieu naturel, est en vérité étranger, contrairement à bon nombre de ses semblables « civilisés », à toute forme de cruauté gratuite. Lui ne se comporte en loup que pour survivre et se nourrir. Et s'il fait d'abord montre d'une dureté extrême, tout en se résolvant à un choix impossible, en ce qui concerne son fils, c'est dans un réflexe de défense paniquée, leur dépendance mutuelle les mettant gravement en péril l'un comme l'autre. Au final, le contact des hommes s'avérera au moins aussi dangereux, en tous les cas plus cruel, que celui des fauves, ouvrant la question de qui sont vraiment les plus inhumains et les plus bestiaux…


Epousant, sans filtre ni apprêt, l'écoulement désordonné des pensées de ce taiseux sans éducation qu'est Liam, plus prompt à l'action instinctive qu'à l'introspection et à l'expression de ses sentiments, le récit court au rythme saccadé de phrases tantôt hachées et incomplètes, tantôt sinuant en un fleuve à peine ponctué de virgules, dans une langue dont l'aspect cru et fruste n'exclut pas une certaine poésie. Ainsi introduit dans la tête du personnage, au plus près de ses ressentis, le lecteur n'en est que plus happé par une de ces narrations haletantes dont Sandrine Collette a le secret, et qui, dans nombre de ses romans, resserre sa spirale autour de proies et de prédateurs lancés dans une traque éperdue.


C'est avec le plus grand plaisir que l'on suit l'auteur dans cette nouvelle exploration réussie de ses thèmes favoris, « à la frontière entre humanité et animalité », comme elle l'explique elle-même, et, toujours, dans le cadre inquiétant d'une nature aux beautés âpres et écrasantes.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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« En ce temps-là on était des loups et les loups étaient des hommes ça ne faisait pas de différence on était le monde. »

Me voici plongée, presque à mon corps défendant, dans une lecture que je n'aurais jamais abordée sans l'incitation douce et persistante de Nico aka Nicky aka NicolaK. J'avoue avoir eu quelques difficultés, au début, à adhérer à la proposition de l'auteure : Liam, un homme taiseux et farouche vit seul dans la montagne avec sa femme Ava et leur petit garçon de cinq ans, Aru. Complètement isolés, sans téléphone, ni moyen de transport à part deux chevaux, sans un voisin à moins de plusieurs heures de marche, ils vivent en totale autarcie dans un lieu sauvage peuplé de loups et d'ours. Mon esprit rationnel fonctionnant à plein régime n'arrêtait pas de perturber ma lecture, me susurrant : ce n'est pas crédible à notre époque. Pas de téléphone? Pas la moindre possibilité de communication? Et ils vivent de quoi? Et d'abord, on est où? En France? Impossible. Nos montagnes et nos forêts ne regorgent pas d'ours. J'ai tenté de faire taire mon esprit raisonneur en lui faisant valoir qu'après tout, on se foutait du lieu où on était. Pour autant que j'en savais, on pouvait aussi bien être en Laponie, dans le Montana ou en Alaska, l'auteure ne le précise pas. Elle sème quand même quelques indices : les prénoms, Liam, Ava, Aru, Mike, Helen, Henry… et un panneau indicateur sur une route avec des miles inscrits dessus. Amérique du Nord, donc.

Ce petit problème avec moi-même à peu près réglé, un autre a aussitôt surgi : Ava se fait tuer par un ours en l'absence de Liam parti traquer le loup. Ce que ressent cet homme à l'instant où il découvre le corps déchiré de sa femme est proprement insoutenable, la tristesse s'est abattue sur moi comme un mauvais rêve et m'a poursuivie, tenace, tandis que Liam embarque son gosse dans un périple à cheval avec la ferme intention de le confier à la seule famille qui lui reste, un oncle et une tante :
« Moi je porte des armes j'abats des cerfs et je pars chasser pendant une semaine en bivouaquant sous les étoiles ou dans une tente, et au milieu de ces espaces-là il n'y a pas de place pour un enfant. »

Franchement, je n'aime pas la tristesse, je la fuis comme la peste. Pourtant, je ne peux pas dire que je lis habituellement des livres d'une folle gaieté, mais ils ne me rendent pas triste. Peut-être parce que les livres que je lis d'ordinaire se situent dans l'après. Ils reviennent sur des événements traumatisants ou tragiques vécus plusieurs années ou décennies plus tôt, événements que leurs auteurs mettent à distance, et cela, cette mise à distance est pour moi salutaire et réjouissante parce qu'elle m'apparaît comme une tentative (le plus souvent réussie) de mise en ordre du chaos. Alors qu'avec le livre de Collette, le chaos, je suis plongée dedans jusqu'au cou, car le chaos, il est dans la tête de Liam, et je suis dans la tête de Liam, une tête totalement retournée par la mort brutale de sa femme, et comment va-t-il faire, lui le chasseur, lui le trappeur, avec ce gosse sur les bras?
J'ai refermé le livre en me promettant qu'on ne m'y reprendrait plus.
Las, la prose envoûtante de l'auteure, d'une beauté âpre à l'image de son taiseux personnage et de la nature sauvage, a été la plus forte, j'ai repris ma lecture.

J'ai chevauché en compagnie de Liam et de son fils dans ces montagnes que je connais bien pour les avoir maintes fois parcourues à pied ou à cheval. Des montagnes sans doute moins sauvages qu'en Amérique du Nord, mais des montagnes quand même. Des taiseux farouches comme Liam, j'en ai connus. Pas des chasseurs ni des trappeurs, mais des bergers, des guides et des pisteurs. Des hommes vivant seuls dans des coins de nature préservée à trois heures de marche de la première habitation, j'en ai connus. Je n'ai en revanche jamais rencontré une jeune femme acceptant de vivre cette vie-là. Aussi isolée et loin de tout. Une partie de l'année à la rigueur, mais toute l'année, hiver compris, non. Surtout que l'hiver en montagne, c'est long, très long même, me revoilà en train de raisonner, c'est plus fort que moi.

À mesure que le périple de Liam et d'Aru se précise et se poursuit, je me sens de plus en plus dans mon élément, cela dit. Les chevauchées sur le bas-côté le long de routes sur lesquelles roulent des véhicules inconscients ne ralentissant pas l'allure, la rage qui vous prend à ce moment-là. le soulagement quand on s'éloigne de ces foutues routes, que le bruit agressif des moteurs se fait grondement lointain, puis murmure, puis silence.
Les marches harassantes dans des montées qui n'en finissent pas, les sentiers balcons à peine plus larges qu'une bordure de trottoir, avec la montagne abrupte d'un côté, le vide de l'autre, et les pierres qui roulent sous les pieds et sous les sabots, et il vaut mieux ne pas penser à ce qui se passerait si un pied ou un sabot venait à déraper ne serait-ce que de quelques centimètres. du reste, dans ces cas-là, comme dit Liam, il ne faut pas laisser le cerveau et surtout pas la peur prendre le dessus. Il faut rester connecté à ses sensations, laisser parler l'instinct, parce que sinon on est mort. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles Liam ne veut pas garder son fils avec lui maintenant que sa femme n'est plus. Son fils, ça le fait gamberger, il a peur pour lui, et dans la vie qu'il s'est choisie et qu'il refuse farouchement d'abandonner, il ne peut pas se payer le luxe d'avoir peur.

« Aru c'est la naissance de la peur dans ma tête et quand on commence à avoir peur on est exactement comme un con qui tiendrait une pique en l'air sous l'orage : on attire la foudre. »

De toute façon, quoiqu'on fasse, l'incident ou l'accident se produira. La vie, ça ne consiste pas à chercher à éviter les coups durs ou le malheur parce qu'ils sont inévitables. le mieux que l'on puisse faire, c'est se faire confiance, c'est faire confiance en notre capacité à les gérer, à les surmonter.
« Les accidents j'en ai vu j'en ai vécu je sais les aborder. Les accidents ça arrive toujours, c'est ça qu'on ne veut pas comprendre et ça ne sert à rien de vouloir les éviter, il faut apprendre à faire avec. »

J'ai accompagné jusqu'au bout ce père et ce fils dans leur périple de plus en plus incertain, de plus en plus dangereux aux allures de récit initiatique atteignant la dimension d'un mythe, j'ai frémi pour le petit Aru et j'ai grandement plaint la solitude de Liam.
« Je crois que c'est le plus effrayant me dire qu'elle ne reviendra pas et il y a un réflexe d'espérer qu'elle est partie pour un jour ou un mois ou même un an et puis non – d'espérer qu'un matin elle sera devant la porte devant la maison et la vie reprendra comme avant, mais l'avant n'existe plus et quand ma raison arrive à ce point-là ça vacille. C'est ce plus jamais qui m'accable il n'y a rien à négocier, ni un jour ni une heure, et je suis seul voilà la vérité. »

Cet homme traversé par des pensées et des émotions contradictoires, que la colère et la rage submergent par vagues —  « Je suis en colère contre la terre la vie le monde, et le monde je jure je lui ferai la peau » — ce père qui, n'ayant pas eu d'enfance, se demande comment il pourrait en offrir une à son fils, ce père qui a tant de mal à aimer, à aucun moment Sandrine Collette ne le juge. Elle sait que ce qui se joue là est aussi vieux que le monde et combien le chemin pour devenir le père de son enfant peut être tortueux, semé d'embûches, imprévisible, et dans certains cas, impossible.
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Dans « On était des loups », Sandrine Collette nous place dans la tête de Liam, un homme qui préfère les montagnes aux gens, la solitude à l'agitation citadine et aux relations foireuses. Ses parents, alcooliques et violents, ne lui ont pas appris à aimer. À 16 ans, il s'est enfuit la rage au ventre et l'envie de taper sur tout ce qui bouge. Pour éviter toute bagarre, il s'est isolé alors dans les montagnes, et a pris la décision de vivre désormais en marge de tous. Lors de l'une de ses rares sorties en ville, il a pourtant rencontré Ava, qui succombera à ses charmes autant qu'à ceux des montagnes où il vit. A deux ils bâtiront cette vie autarcique, peuplée seulement de quelques marginaux qui leurs ressemblent ; une vie où il part chasser toute l'année pour pouvoir survivre l'hiver, laissant Ava s'occuper seule des champs, animaux et travaux domestiques. Une vie de reclus qui leur convient où ils se complètent parfaitement, se gorgeant chaque jour de la beauté du monde, admirant sa vie sauvage ramenée à l'essentiel, loin de tout folklore citadin inutile.
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Une vie parfaite et bien rôdée, jusqu'à la naissance d'Aru et surtout la mort d'Ava cinq ans plus tard. Alors le monde s'écroule. Notre homme perd la femme qu'il aime, la routine nécessaire à sa survie ; N'ayant pas eu de modèle, il ne sait pas aimer son enfant et subit un trop plein d'émotions dont il ne sait que faire. Surtout, il ne sait pas s'occuper d'Aru, qu'il ne peut ni emmener à la chasse avec lui, ni laisser seul à la maison. Cette vie n'est pas adaptée à un enfant. Alors ils sellent les chevaux, et s'en vont à la recherche d'une solution. Quelles sont les options : faire adopter l'enfant ? L'abandonner ? Ou encore le noyer, comme ces chatons d'une portée dont on ne voulait pas ? Une chose est sûre pour Liam, abandonner sa vie est impossible : vivre au milieu des gens le met hors de lui, il deviendrait violent et Aru ne serait pas heureux. Mais la vie ici est trop dangereuse pour un enfant, sur qui il ne peut pas veiller sans arrêt. Alors que faire ? Ces jours de randonnée à cheval seront l'occasion d'un long monologue intérieur, défilé bousculé et bouillonnant des pensées les plus intimes de Liam, souvent les plus inavouables, où la plume de l'auteur prend la forme de ce qu'il ressent. Ce récit est donc noyé des émotions qui déchirent Liam, un condensé de joies et de peines profondes qui nous font comprendre et aimer le personnage, nous y attacher, vibrer avec lui devant la beauté et les malheurs de ce monde. Jusqu'à ce qu'un événement vienne de nouveau bouleverser le cours des choses. Que trouveront-ils au coeur de ces montagnes hostiles ?
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Une immersion d'une extrême justesse, que le langage et la ponctuation utilisés par l'autrice contribue à rendre plus vrai que nature. Des propos parfois durs mais totalement compréhensibles dans le contexte. Un roman extrêmement émouvant, sombre mais qu'éclaire chaque émotion dont il est perclus. (critique écrite avec la fonction dictée du traitement de texte, désolée s'il reste des fautes^^).
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Nouvelle embardée avec Sandrine Collette. D'elle, je n'avais lu que « Et toujours les forêts », une lecture qui m'avait laissé un souvenir mitigé. Alors je suis entrée à pas de loups dans ce nouveau roman.
Premières lignes, j'ai un peu du mal avec le style abrupt. Peu de ponctuation, on est dans la tête de Liam, un grand gaillard bas du front qui a répondu à l'appel de la foret et traque, dans une étendue montagneuse et glacée du bout du monde, les cerfs et autres bêtes sauvages pour assurer sa pitance, et de bien maigres revenus. Liam, trente-sept ans, est un chasseur, sa carcasse taillée pour les grands espaces qu'il parcourt inlassablement pendant des jours à la recherche de sa proie. Ses moments de solitude sont interrompus par de brefs séjours dans sa cabane perdue dans les bois dans laquelle l'attendent sa femme Ava et son fils Aru.
Il vit dans son monde, sa bulle, en dehors du temps, sans portable, juste quelques amis ou connaissances pour s'en jeter un après une bonne partie de chasse.
Mais un beau jour, de retour chez lui, le petit Aru ne le guette pas, ne se précipite pas sur lui, quelque chose ne tourne pas rond. Abasourdi, Liam découvre Ava mourante, attaquée par un ours, réunissant les forces qui lui restent pour protéger Aru.
Ava morte, c'est l'explosion dans la tête de Liam, que va-t-il bien pouvoir faire de ce gamin de cinq ans ? Impossible de l'emmener chasser avec lui… Liam refuse de renoncer à sa vie d'avant et ne voit qu'une solution ; se débarrasser au plus vite du gamin encombrant, qui ne fait que lui rappeler la mort d'Ava, et remuer le couteau dans sa plaie.
Liam prépare les bagages, selle les deux chevaux, hisse le gosse et c'est parti pour plusieurs jours de chevauchée avant d'atteindre la ville. le plan de Liam est simple, refourguer vite fait le gamin à son oncle et retourner à la chasse, la traque, les pièges.
Évidemment, vous me voyez arriver avec mes gros sabots, ça ne va pas se passer comme prévu…
Sandrine Collette explore avec talent les méandres des relations parents-enfants amour, désamour, haine quand le parent ne parvient pas à faire à l'enfant la place qui lui revient.
Son récit addictif m'a happée, j'ai tremblé pour le petit Aru face à la haine, le rejet, la violence du père. Mais la force du récit est de nous faire comprendre les réactions de Liam et nous faisant entrer dans le flot de ses pensées et l'on ressent compassion, dégoût, effroi, incompréhension, stupeur, … Un roman dont je vous recommande la lecture en apnée dans les tréfonds de la noirceur de l'âme humaine.
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L'art de l'écrivaine dans ce livre est de condenser en moins de deux cents pages autant de sentiments contraires, autant de difficultés de vie, de souffrances, d'éclaircies dans les malheurs et de conclure par une fin puissante, peut-être espérée ou attendue par ceux qui affirment souvent la voir venir, ce ne fut pas mon cas.

Le long monologue du père confronté au malheur, aux souvenirs d'une enfance torturée dans tous les sens du mot, emporte le lecteur vers un inconnu qui rend un temps ce père détestable. Il faut donc suivre son cheminement vers l'indicible, son chemin de croix, de recherche de pardon et, finalement, son besoin de donner de l'amour.

Il ne sait guère ce que peut être le don d'amour, alors, forcément, il mélange, perd les pédales, perd le sens de la vie, de sa vie qui ne vaut rien à ses yeux, de celle de son fils qui ne vaut pas davantage et qui ne mériterait finalement pas mieux que d'être abrégée.

Et puis, il est tout à coup sur son chemin de Damas et reçoit l'illumination. Est-il encore temps pour lui et l'enfant? Sandrine Collette sait introduire un suspense habilement dosé par une interférence qui puisse peut-être bouleverser le cours des choses.

Je conseille vivement à ceux qui ont abandonné cette lecture, certes par moments insupportable du fait de l'insuffisance de ponctuation, de virgules, et un fond plus noir que celui de la nuit où chantent les loups, de la reprendre. Ils rencontreront ce qui, chez cet homme perdu, flirte avec le mystère, disons même avec le divin.
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Sous le charme de la pureté grandiose du lac en couverture, je me suis laissé entraîner au bout du monde, dans les extrémités d'une contrée montagneuse et sauvage – sans doute au nord du Canada. Là-bas, Liam a décidé de vivre une existence primitive avec sa femme, son fils de cinq ans et ses chevaux. Mais un jour, un ours tue Ava, laissant l'homme fou de désespoir. Comment mener cette vie, seul avec l'enfant ? A-t-on jamais vu quelque chose d'aussi fragile qu'Aru survivre dans un endroit pareil ? Tête baissée, l'homme emporte son fils dans un long périple dont la destination reste funestement insaisissable…

La nature ici n'est pas un décor romantique mais un univers gigantesque et terrible, un monde impitoyable, indifférent aux êtres humains. Mais un monde dont Liam a fait son refuge, loin de la civilisation, du bruit, des gens, des souvenirs de son enfance. Un demi-retour lui semble au-dessus de ses forces. Mais comment élever un enfant dans un endroit pareil ?

Ce dilemme terrible fait tournoyer les pensées dans la tête de Liam sans répit ni ponctuation. Ses mots résonnent et restituent puissamment la tectonique des liens filiaux. L'un semble constamment acculé, sur le point de déraper sous l'effet de la rage et du chagrin. L'autre est d'une vulnérabilité désarmante mais pourtant tient bon – on ne sait plus lequel des deux s'agrippe à l'autre.

La tension est d'emblée au plus haut : où cette chevauchée nous mène-t-elle ? Comment basculera la relation entre père et fils ? Il y a quelque chose de très juste et bouleversant dans la manière dont Sandrine Collette évoque, de sa plume instinctive et presque animale, l'attachement infini que nous vouent nos enfants que nous le méritions ou non. Les ressorts de l'instinct paternel, l'amour maladroit des parents qui voudraient protéger leurs petits de la dureté de l'existence. La difficulté de savoir aimer quand on n'a pas été aimé. La honte de savoir qu'on n'est pas toujours à la hauteur. La magie des étincelles de complicité qui surgissent parfois malgré tout.

Omniprésentes, les forces de la nature enveloppent, émerveillent et ballottent tour à tour les personnages. Ce roman, c'est aussi une poétique du chant des loups, de la cabriole des papillons et de la brume après l'orage. Un hommage poignant à un monde majestueux mais fragile.

Loin des sentiers battus, quelque-part entre drame, nature-writing et conte, un texte beau et sombre sur la paternité qui vient d'être récompensé par le Prix Jean Giono et le Renaudot des lycéens.
Lien : http://ileauxtresors.blog/20..
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" J'vais t'dire on est des loups, on est fait pour vivre en bande" chante Renaud dans la chanson Manu.
Liam, lui, n'a rien d'un loup qui vit en groupe. Il a tout du loup solitaire, qui aime vivre loin de toute civilisation, loin des hommes et de leur folie, s'adonnant à de longues chasses dans les forêts montagneuses.
Alors, lorsque sa femme se fait attaquer par un ours et qu'il se retrouve avec son petit garçon de cinq ans, son monde s'écroule.
Sa vie sauvage ne peut pas convenir à un petit garçon et lui, il ne se sent pas prêt à vivre autrement...

Quel roman âpre et rude !
Je découvre l'écriture si particulière de Sandrine Collette à travers ce roman et je crois bien que j'en lirai d'autres.
Au fil des longues phrases à rallonge, à peine ponctuées, on suit le cours des pensées d'un homme au caractère plutôt taciturne, aux réactions parfois brutales, qui vit passionnément son amour pour la nature sauvage et isolée de tout. Cet homme-là, il est comme ces montagnes inhospitalières qu'il arpente : abrupt, intraitable, robuste et peu enclin à se laisser amadouer.
Même par un petit garçon de cinq ans qui vient de perdre sa maman...

On envie cet homme là de vivre comme un loup. Libre et en parfaite osmose avec la nature. Supportant des températures rigoureuses, se déplaçant en cheval, vivant de peu mais heureux dans ses montagnes. Mais son égoïsme et sa rudesse laissent en nous un gouffre d'incompréhension et d'angoisse.
Alors, on cherche au milieu de toute cette âpreté l'étincelle qui ravivera et réchauffera nos coeurs.
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Si la lecture de ce nouveau roman de Sandrine Collette demande un petit temps et des efforts d'adaptation, écrit à la première personne avec une ponctuation très peu présente, très vite, on était des loups vous poignarde, vous fouille de l'intérieur faisant remonter des flots d'émotions qui, pour les plus sensibles des lecteurs, s'accompagneront de larmes.
Liam, vit dans une forêt à la montagne, loin de tout, en compagnie de sa femme et leur jeune garçon Aru. Ce dernier passe plus de temps avec Ava sa maman qu'avec son père souvent absent pour la chasse. Mais bientôt alors que Liam rentre, fait inhabituel, son fils n'est pas là pour se jeter dans ses bras. Une attaque d'ours vient de semer le chaos dans cette famille. Ava est morte en protégeant son fils. Ne sachant pas comment faire face à la situation le père et le fils prennent la route pour un bouleversant voyage.
Ce roman nous plonge dans la tête de Liam qui, à sa manière, nous raconte comment il va devoir devenir vraiment père.
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Un autre livre qu'on pourrait qualifier de « nature writing » à la française, et un nouveau bon moment de lecture. Décidément, je suis gâtée ces derniers temps …

Roman dans la nature, roman de la nature peut-être, qui se passe on ne sait pas bien où… Moi il m'a plu d'imaginer cette histoire au Canada : grandes forêts peu peuplées si ce n'est de loups et d'ours, rivières infranchissables, villes parsemées, ... Une famille y vivote en quasi-autarcie jusqu'au drame qui poussera le père, un personnage assez rustre, plus proche des loups que des hommes, à retourner auprès des hommes, et surtout à trouver sa part d'humanité.

On lit ce roman pour l'histoire et on ne le lâche pas. Pourtant le style est très rudimentaire, et j'avoue que ça m'a parfois un peu tapé sur les nerfs, ce style un peu boiteux un peu simplet. On est très proche du bavardage et des lieux communs, du genre « Moi j'ai de la chance, je suis un bon chasseur un très bon même, c'est ce qu'ils disent tous ici mais quand c'est l'hiver c'est l'hiver. » Mais est-ce le style de l'auteure ? Ou a-t-elle adapté son écriture à son personnage ? Je ne sais pas c'est mon premier Sandrine Collette. On m'a conseillé son précédent roman « Et toujours les forêts » et j'ai hâte de le découvrir…
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Liam ,après une enfance difficile,sans tendresse n'est pas un homme très sociable,il préfère vivre retiré ,au fond de la forêt , avec sa femme Ava et leur fils Aru ,sans voiture , ni téléphone .Liam est un chasseur, trappeur, il s'absente beaucoup et de ce fait n'a pas tissé beaucoup de liens avec son fils , l'enfant c'est l'affaire de la mère .Mais un soir qu'il rentre après une chasse au loup, il trouve sa femme tuée par un ours .Liam va se trouver seul avec ce fils qu'il n'a pas désiré qu'il considère comme une charge , il ne sait pas quoi en faire. le sentiment qui domine chez lui c'est la colère, colère parce que sa femme est morte en voulant sauver leur fils, colère envers son fils à qui il en veut, il aurait préféré que ce soit lui qui meurt .Liam va essayer de caser Aru chez un oncle et une tante qui refusent.
En rentrant chez eux , le chemin du retour est long et non dépourvu d'embûches le père et le fils vont pouvoir faire connaissance.
j'ai détesté Liam dans la première partie du roman je l'aitrouvé antipathique , dur , sans empathie pour son enfant j'ai eu un peu de mal avec le style abrupte et dénué de ponctuation de Sandrine Collette, par contre la deuxième partie du roman m'a emballée,plus rapide, le suspens s'installe et la fin est émouvante.
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