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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Un chef d'oeuvre du roman psychologique.

Ayant pour notre part découvert l'oeuvre protéiforme de Joseph Conrad (né Teodor Josef Konrad Korzenioniowski en 1857 en Ukraine et de parents polonais, devenu citoyen brittanique dès 1886, disparu en 1924), embarquant par son "Heart of Darkness" [Au coeur des ténèbres, 1898-99], puis abordant son "Typhoon" [Typhon, 1903] puis nous déroutant par son volumineux "Under Western Eyes" [Sous les yeux de l'Occident, 1911], nous voila à nouveau plongés dans le clair-obscur d'une âme condamnée : celle de l'étudiant Kyrilo Sidorovitch Razumov, que le Destin vint chercher en sa pauvre chambre dans la nuit incertaine qui succéda à un attentat commis à l'encontre d'un dignitaire saint-petersbourgeois...

Inoubliables personnages de Victor Victorovitch Haldin (en "terroriste" halluciné... ), de ce K. S. Razumov "central" (presque l'envers "innocent" de l'étudiant criminel Raskolnikov du "Crime et châtiment de Fiodor Dostoievski), du Conseiller princier Mikulin, du Prince invisible, de la très pure Nathalie "Natalia" Hadin (soeur de l'exécuté), de sa mère détruite par le chagrin, de l'ivrogne Ziemianitch (ce "faux-traître" cocher qui se pendra dans son écurie), de Pierre Ivanovitch le théoricien exilé "féministe" ridicule fomenteur de complots, de la cadavérique Mme de S. (son égérie), de Julius Lespara l'intellectuel aux deux filles négligées, de l'ignoble Nikita "Necator" (bourreau et agent double physiquement répugnant), de Sophia Antonovna (agent de liaison à l'âme généreuse), de la pauvre Tekla à l'âme christique : toute une galerie fantastique... sans oublier le narrateur, ce vieux professeur d'anglais de "Natalia" l'exilée - confident et amoureux trouble de son élève.

Infiniment contrasté, "l'horizon des événements" (un St-Petersbourg ténébreux puis cette paisible Genève où veille ironiquement la statue de ce "bon" philosophe que fut J.-J. Rousseau) en devient hallucinant par la seule présence de ce méphitique Château Borel, hoffmannien, vide et délabré - surtout si totalement vide de bienveillance...

Infiniment sinueux, le "mouvement des âmes" : ces mouvements psychologiques du personnage central (l'étudiant devenant "complice puis traître malgré lui", à la Destinée terrifiante) mais aussi de quelques autres qui accompagnent notre principal protagoniste en son "passage de la ligne" pré-simenonien... Chez Conrad comme chez Simenon, on fonctionne en empathie : on ne juge pas l'âme qui se dévoile sous nos yeux.

Une lecture qui rendra enthousiaste tout amateur de Littérature : elle nous prépare - pour notre part - à explorer "The Shadow Line" [La Ligne d'ombre, 1917] qu'adapta au cinéma le polonais Andrzej Wajda...

Joseph CONRAD était un homme qui avait vécu avant d'écrire : son art littéraire pérenne n'a pas pris une ride. Il se "mérite", c'est sûr, et son style - que certains qualifieront de "lent" - nécessite en effet notre attention sans failles.

Et n'oubliez pas de découvrir (et imprimer très vite) les 2 remarquables analyses de nos amis babéliotes mercutio (son article-fleuve passionnant du 9 décembre 2016) et 5Arabella (son article enthousiaste du 28 juillet 2016) ci-après !
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L'édition de poche "Classiques GARNIER-FLAMMARION" (447 pages) est d'un prix très modique (10 euros) - l'ouvrage solide, d'une présentation très agréable, comprend une passionnante introduction d'André TOPIA (pages 7 à 36) ainsi qu'une riche partie bibliographique (actualisée en 2014) assurée par Victoire FEUILLEBOIS. Enfin, la traduction de l'anglais par Philippe NEEL est d'une sobriété remarquable, fidèle à la rythmique particulière et à la poétique sans effets du romancier.
Lien : http://fleuvlitterature.cana..
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SOUS LES YEUX D' OCCIDENT de JOSEPH CONRAD
L'histoire qui est racontée vient d'un document tenu par un russe, M. Razumov, étudiant en troisième année de philosophie à l'université de Petersbourg. le début relate l'assassinat d'un homme,M de P., Ministre d'état du Tsar aux larges pouvoirs qui traquait à travers le pays tout ce qui pouvait ressembler, vaguement, à la liberté. Deux bombes meurtrières mirent un terme à son activité ainsi qu'à la vie de nombreux passants. Victor Haldin, un des camarades d'école de Razumov passe le voir chez lui et lui déclare être l'auteur de l'attentat. Il lui demande d'aller prévenir un cocher de ses amis Zemianitch, pour un rendez vous nocturne afin qu'il puisse s'enfuir. Razumov est très surpris car ils se connaissent à peine. Victor dit avoir confiance en lui. Razumov va donc aller à la rencontre de Zemianitch, le trouve ivre et le frappe violemment. Énervé il va trouver le prince K. auquel on l'avait présenté précédemment et dénonce Victor. Dès lors la machine est lancée et Victor sera arrêté. La première partie du livre s'achève sur cette arrestation. Ensuite, on change de narrateur, de perspective, et on va suivre l'évolution de la vie, des pensées de Razumov.
Impossible de ne pas penser à Dostojevski, à Crime et Châtiment et à Raskolnikov. Comment Razumov va pouvoir vivre avec cette trahison, dévoré de remords, une analyse brillante de l'âme humaine qui si elle n'est peut-être pas au niveau de Dostojevski n'en est pas moins fascinante car Conrad va soigneusement emmêler l'intrigue à rendre Razumov fou.
Conrad n'aimait pas les russes, ça se sent dans les descriptions et les sentiments qu'il prête à ses héros, il ne leur fait pas de cadeaux. le titre choisi met également en lumière ce contraste qu'il voit entre un Occident libre et ouvert et un Orient embourbé dans une forme de médiocrité et de dictature. Conrad était polonais, on peut comprendre qu'il ait peu d'affinité avec ses voisins russes. Un roman passionnant.
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Dans lignée de "L'agent", Conrad livre un second excellent roman d'espionnage. Quelques années avant la révolution d'Octobre, des conspirateurs russes exilés se réunissent à Genève, dans un château à l'allure abandonnée. Parmi eux, le jeune étudiant Razoumov, que l'on acclame en raison de l'attentat meurtrier auquel il a participé à Moscou. Mais les apparences sont trompeuses ... L'histoire est contée par un professeur d'anglais, un "occidental", témoin du drame qui se noue. Grâce à une narration non linéaire, Conrad ne cesse d'opposer l'Occident à la Russie sur tous les plans : moral, logique, caractère et esprit. Lui-même Polonais, il affirme dans sa note d'auteur avoir cherché à demeurer objectif. Il y parvient peut-être grâce à sa galerie de personnages très crédibles, tous plus ou moins coupables, cyniques, à l'exception notable d'une jeune femme, Victoria Haldine. Si on retrouve des thèmes chers à Dostoïevski (le remord, l'autocratie, l'anarchisme), Joseph Conrad s'éloigne de l'auteur russe par son style ; plus distant, ironique, moins fiévreux. Un récit historique, violent et nuancé, bénéficiant de l'habituelle maîtrise de mon auteur favori, dans l'atmosphère morne d'une ville endormie. Conrad était vraiment un pionnier du genre, dont la modernité et les échos contemporains entretiennent une fascination intacte.

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Razoumov, un jeune étudiant aux origines incertaines, se retrouve, bien malgré lui, mêlé à un attentat contre un homme d'Etat russe, très impliqué dans des répressions contre les milieux révolutionnaires. Il se trouvera de ce fait en position délicate, entre la police tsariste et les milieux révolutionnaires, il doit faire des choix, politiques et moraux qui décideront de sa vie.

Un roman d'une très grande force et complexité. le contexte de l'époque est très bien rendu, les personnages sont décrits de façon magistrale. Conrad est d'une lucidité extrême, certains ont même voulu y voir du cynisme, il ne se fait aucune illusion ni sur le pouvoir tsariste, et il le connaît puisque lui même et sa famille en ont souffert (ils ont connus la déportation) ni sur les milieux révolutionnaires, ni surtout sur le type de monde que la prise du pouvoir par les révolutionnaires va faire surgir. Les idéalistes comme Victor Haldine et sa soeur seront forcement les premières victimes de ce nouveau pouvoir.

En fait Razoumov n'a pas vraiment le choix : soit il devient révolutionnaire, soit il devient mouchard, les deux étant parfaitement inacceptable pour lui. Conrad décrit un monde dans lequel la notion du choix fait par un individu est dérisoire, le monde est dominé par des systèmes, des appareils d'état, des idéologies, et l'individu est écrasé. Ou c'est un opportuniste qui ne recherche qu'un gain matériel, une position et il est prêt à tout pour l'obtenir.

C'est un roman finalement très désespéré et noir, mais terriblement juste, une lecture bouleversante, le dénouement est vraiment terrible, mais c'est en même temps un livre terriblement humain, qui pose énormément de questions importantes, et qui démontre à quel Conrad point était à même de comprendre le monde dans lequel il vivait ainsi que les évolutions à venir.
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Le roman de Joseph Conrad « Sous les Yeux de l'Occident (Under Western Eyes) » se passe à moitié à Saint-Pétersbourg et à moitié à Genève. Razoumov est un étudiant à l'université de Saint-Pétersbourg qui est impliqué malgré lui dans un attentat terroriste contre le pouvoir tsariste : il a aidé un autre étudiant, Haldine, un des assassins d'un Ministre d'Etat à s'échapper, mais va ensuite le dénoncer à la police qui l'arrête et l'exécute le jour-même. On retrouve ensuite Razoumov à Genève, où parmi la nombreuse communauté russe, il fait la connaissance de la mère et de la soeur d'Haldine.
Lien : http://www.lecturesdevoyage...
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