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EAN : 9789737078292
171 pages
Editura Trei (01/01/2013)
5/5   2 notes
Résumé :

Écrites sur un ton froid, presque autoritaire, les proses courtes de Les grandes joies et les grandes tristesses réalisent, avec un œil lucide, une véritable monologie de l’esseulement contemporain. Les récits, harmonisés dans un tout unitaire, sont placés au sein de la société roumaine d’aujourd’hui, de sorte que la trajectoire des personnages s’imprègne des paradoxes de cette société en transition, comme dans un enregistrement « en prise directe », où le b... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Aujourd'hui je vous écris quelques lignes à propos d'un coup de coeur littéraire: Augustin Cupșa, „Marile bucurii și marile tristeți” (2013)
Même dans nos vies les mieux remplies, il y a des blancs, nous dit l'auteur, à l'instar de cette couverture que j'aime tant. Il y a, en effet, toujours, quelque chose qui échappe à notre communication et qui nous isole tout comme seuls ils sont également ces autres avec lesquels nous semblons partager «les plus grandes joies et les plus grandes tristesses».
Venant de moi, cela ne semble peut-être pas trop clair, mais en lisant les 11 nouvelles de Augustin Cupșa, ce constat est limpide: ça coule de source, ça va de soi et la délicatesse littéraire y est éblouissante. Oui, l'auteur nous parle de cette condition fondamentale qui est la nôtre: la solitude dans laquelle nous nous retrouvons constamment. Mais il le fait d'une manière très gracieuse eu égard à la gravité du sujet.
L'ensemble est à la fois très vivant et très littéraire, voire poétique, et c'est là tout l'art de l'écrivain. J'ai lu ces nouvelles dans le désordre. En commençant, par «Une figure un peu ancienne» (il y a un jeu de mots, car un des personnages joue un mauvais tour, „o figură cam veche”) avec la figure emblématique de Orveni, bibliothécaire et avec le pouvoir du livre comme personnage à part entière: il peut nous assurer, comme le font les psychiatres, que «la vie a cependant un sens», pour peu que nous soyons patients et disposés à le «chercher» (p. 77). C'est explicite, mais surtout tristement beau dans l'implicite, dans le non-dit.
J'ai poursuivi avec ma nouvelle préférée, l'histoire de Daria («Qu'adviendra-t-il à ma mort», p. 27-44), la postière qui depuis huit ans distribue consciencieusement de bonnes et de mauvaises nouvelles et qui fait la rencontre joyeuse(?) de Otilia Dumitrașcu, 90 ans. Comment bien souhaiter «joyeux anniversaire» à cet âge-là, quand le roumain veut qu'il s'agisse de souhaiter encore de nombreuses années à vivre? Et d'ailleurs comment traduire la spécificité du „La mulți ani” (Ad multos annos)!
Neuf autres textes pour constituer ce livre subtil et riche qui nous parle si bien de nos vies ordinaires pour en extraire la «substantifique moelle» de bonheur. Les mots retrouvent leur force expressive et les blancs acquièrent du sens.
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« Il se passe encore des choses simples » (p. 105). Voilà que ce livre délicat me rappelle qu'il fait encore bon de vivre, malgré tout. Il traite en effet, de ces choses ordinaires de la vie quotidienne, comme le beauté simple et la grâce d'une jeune femme à qui on a envie de faire l'amour, des souvenirs d'enfance avec de bons amis qui resurgissent lors de la vente de la maison parentale, le plaisir simple d'une bière pour fêter ses 90 ans, et bien d'autres choses encore.
Les grandes joie et les grandes tristesse est le titre éponyme de la dernière des 11 nouvelles que comporte ce recueil très homogène: la communication, la solitude en constituent le fil rouge.
Il m'a été tout aussi agréable de rencontrer de subtiles références littéraires, notamment à Verlaine et à Rimbaud, mais aussi à Heinrich Böll ou a des auteurs roumains, comme Octavian Paler.
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Citations et extraits (71) Voir plus Ajouter une citation
En français, suivi de l'original, page 156-157 :

C’est-à-dire s’oublier complètement lui-même jusqu’au présent. Cela ne semble pas si difficile. Il faut seulement se concentrer. On dirait qu’il est dans un hover. C’est juste que celui-ci se lève un peu plus par rapport au sol, il peut faire quelques cabrioles dans l’air.
Il se retourne et oublie. Il oublie cette journée, le voyage avec le train, les affaires dans son entreprise, les gens avec lesquels il a parlé et avec lesquels il doit encore parler, la demande de congé qu’il doit déposer au service du personnel.
Il oublie les heures de travail, les femmes qu’il a eues. Le jour où il a connu son épouse lors d’une fête. Il oublie les autres fêtes et s’approche vertigineusement de ce jour d’octobre qu’il désire tant. Vingt ans s’en vont très vite avec ce truc là.
Il oublie des émotions de toutes sortes, le temps perdu dans le jardin a déchiré les feuilles du lierre de Nisipeanu, laissant ses yeux courir sur les racines ombragées qui se hissaient sur les murs et l’envahissaient intégralement. Il oublie les après-midi avec les regrets et les jurons pour avoir si stupidement perdu Carla. Il oublie sa dispute avec Luca pour cette affaire-là. Et comment le crétin a ricané. Il oublie ces trucs. Il est assez proche. Le bruissement d’une voiture dans la rue. L’odeur d’aubergines grillées de chez les voisins. Complètement désarmé. La fille lui plaisait.
Il doit encore oublier qu’il a démarré à nouveau le film The Doors, les verres encore intacts.
Il oublie qu’il a oublié la lumière allumée dans le couloir après le départ de la fille.
Il oublie comment Carla, nerveuse et déçue, descend l’escalier et claque la porte derrière elle.
Son étonnement à elle, son étonnement à lui. Il reste si peu.
Il est allongé sur le canapé. Exactement ainsi.
Dans la lumière des réverbères de la rue, les fleurs dessinées sur le rideau se projettent sur le mur.

On entend un caillou dans la vitre.
– Tavi, tu es à la maison ?
*
Adică să se uite complet pe el de-atunci până în prezent. Nici nu pare aşa de greu. Trebuie doar să te concetrezi. Parcă se dă cu un hover. Doar că ăsta se ridică mai mult de la sol, poate să facă nişte tumbe prin aer.
Se învârte şi uită. Uită ziua de azi, călătoria cu trenul, treburile de la firmă, oamenii cu care a vorbit şi cu care mai are de vorbit. Cererea de concediu pe care trebuie să-o predea la personal.
Uită orele de serviciu, femeile pe care le-a avut. Ziua în care a cunoscut-o pe nevăstă-sa la o petrecere. Uită şi celălalte petreceri şi se apropie veritiginos de ziua aia din octombrie pe care şi-o doreşte atât de mult. Douăzeci de ani se duc foarte repede cu şmecheria asta.
Uită emoţii de toate felurile, vremea pierdută prin grădină, rupând frunze din iedera lui Nisipeanu, umblând cu privirea pe vrejurile umbroase, care se căţărau pe ziduri şi îl împânzeau cu totul. Uită după-amiazele cu regrete și înjurături că o pierduse atât de stupid pe Carla. Uită cum s-a certat cu Luca după faza asta. Și cum a rânjit tâmpitul. Uită chestile ăstea. E destul de aproape.
Un fâşâit de maşina pe stradă. Mirosul de vinete coapte de la vecini. Dezarmarea completă. Îi plăcea fata.  
Mai are de uitat că dat drumul iarăși la filmul cu Doors, paharele de vin neatinse.
Uită că a uitat lumina aprinsă pe coridor după ce-a plecat fata. Uită cum coboară Carla nervoasă și dezamăgită pe scară. Și trântește ușa după ea. Uluiala ei, uluiala lui. Mai e atât de puțin.
El stă lungit pe canapea. Exact așa.
În lumina felinarilor de pe stradă, florile desenate în perdea, se proiectează pe perete.
Se aude o pietrică în geam.
- Tavi, eşti acasă?
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– Voyons, ne te fatigue pas, ma chère. Pourquoi te fatiguer, précisément toi qui ne me connais pas très bien ? En plus, mon âge n’est plus une chose dont on peut s’enorgueillir c’est-à-dire se réjouir, crier et boire un verre de bière, peut-être même deux, tu vois ce que je veux dire ?
Daria se rendit compte que probablement presque personne ne l’avait cherché à l’occasion de son anniversaire et cela lui sembla triste. L’air chaud de dehors, dans lequel les arbres, les bancs, les allées entre les immeubles et en fait, toutes les autres choses demeuraient immobiles comme si elles avaient été immergées dans du formol, lui renforçait cette sensation douloureuse.
– Pourquoi parlez-vous ainsi ? Moi aussi j’aimerais atteindre mes 90 ans.
Elle mentait, bien évidemment, et lui sembla que sa voix ne résonnait pas de manière convaincante.
– Laisse, il vaut mieux que tu sois en bonne santé.
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Les filles s’éloignèrent dans la rue en rigolant. Le vieux les regardait encore, ensuite il observa la pile de livres qui gisait dans un coin de la table. Le garçon les lui avait tous retournés. Whitman, Verlaine, Simic, Pavese, Faulkner, Sigrid Undset. Eh merde, à quoi bon cette Danoise avait-elle élevé trois enfants seule, s’évertuant à gagner de l’argent en écrivant le matin à compter de cinq heures et jusqu’à avant de partir au travail ? Et à quoi bon Carver était-il mort mariné dans l’alcool et le cancer des poumons et pourquoi merde, Hemingway s’était-il tiré une balle dans la tête ? On ne peut pas arrêter d’écrire et puis vivre après, c’est impossible. Rimbaud l’a fait, mais ce n’est qu’une exception.
– Il y a un mal invisible qui m’entoure, disait-il quand il gagnait un pari. Je sais comment bougent les choses, je sais comment elles viennent et comment elles s’en vont, la vie est encore en moi et le talent pareil, il n’est pas encore parti, écoute ce que je te dis. Le poète doit être un clairvoyant.
Et c’est ainsi qu’il ressentait, cette chose-là il l’avait depuis qu’il était enfant, cette sensation de pouvoir se placer en un équilibre parfait avec le reste du monde : entre le ciel et le fond de l’eau, en flottant purement et simplement à la surface d’une rivière invisible. C’est ainsi qu’il pouvait écrire, inventer des choses ou en avoir l’intuition.
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– La Maison des veuves ? lui demanda-t-elle avec une once d’inquiétude dans la voix.
– Ma foi, la traduction est imparfaite. Il serait plus juste de dire La maison sans maître.
Elle regarda brièvement le livre, mais elle se rendit compte rapidement qu’elle n’avait pas corrigé sa bourde, et même qu’elle l’avait accentuée d’une certaine façon.
La femme s’en empara, en fronçant les sourcils, et le fourra dans son sac à main en même temps que le sac en plastique froissé.
– C’est tout ?
Orveni sourit avec sous-entendu.
– Il va vous surprendre.
Elle avait peut-être quelqu’un dans sa vie et de toute façon elle ne lisait pas. Une femme si jeune et si belle ne pouvait pas s’abstenir. Ou bien, si elle pouvait, il allait le savoir.
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Il connaît bien la ville. L’eau s’infiltre dans les sous-sols des maisons du quartier à cause d’un lac d’accumulation. Le parquet grince à chaque fois qu’il passe dans les chambres vides. Il a enlevé presque tous les meubles. Il reste encore quelque corps de bibliothèque avec des étagères de livres dépareillés. Les enfants ont pris ce qui leur a plu. Il a pas pu les obliger à prendre, par exemple, Sadoveanu. Les œuvres complètes. Sept volumes. Lui non plus n’a pas pu les lire. Mais pour certains, il a dû le faire. Les Frères Jderi étaient au programme du lycée.
Il s’arrête devant les tomes. D. R. Popescu. Le Pont de glace, Le lièvre éclopé. Titus Popovici. La Soif. Octavian Paler. La Vie sur un quai. Les livres ont été rangés par ordre alphabétique. Des auteurs roumains.
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