Une mère évoque la mort de son enfant et son absence, qu'elle vit jusqu'à la folie. L'absence de son fils devient presque une « absence - présence » dix ans après sa mort.
Evacuons tout de suite ce qui est le moins intéressant : la polémique de plagiat qui a fait suite à la publication de ce livre.
Camille Laurens a accusé
Marie Darrieussecq d'avoir plagié son livre
Philippe (inspiré de sa vraie vie, contrairement à
Darrieussecq, qui n'a pas perdu d'enfant). Je crois que l'accusation ne tient pas la route quinze secondes, quand on lit quelques pages de
Tom est mort. le style de
Darrieussecq est là dès le début, caractéristique depuis
Naissance des fantômes, distance quasi clinique, intellect en permanence à l'oeuvre décortiquant tout ce que la mère éprouve, tout semble rejeter l'accusation de
Camille Laurens : le livre de
Marie Darrieussecq est le livre d'une femme qui réfléchit au sujet, avec toute la distance dont son cerveau peut faire preuve, pour être la plus exacte dans l'expression des sentiments que la mère endeuillée éprouve. Ce n'est pas un livre viscéral, c'est l'inverse. Et donc le contraire du livre de
Camille Laurens. Mais précisément c'est sans doute la raison pour laquelle cette dernière s'est sentie plagiée, ou parodiée. Mais elle a oublié en route que le sujet en question n'était pas son pré carré, et que quiconque a le droit d'écrire sur le sujet, ce qui me semble être le fondement de la littérature, d'ailleurs.
Pour en venir maintenant au livre de
Darrieussecq, il a précisément les défauts de ses qualités, il est trop scrupuleux. Presque bavard. En tout cas, la capacité de
Darrieussecq à sonder ce que ressent la mère qui a perdu son enfant est étonnante. Trop peut-être. C'est un peu le « syndrome
Darrieussecq ». Un parfait devoir d'une ancienne élève de la rue d'Ulm, sur un sujet qu'elle s'est imposé à elle-même. Tout est si scrupuleusement analysé que ça sonne presque (paradoxalement) faux à force de vouloir être véridique. L'image même de l'enfant se désintègre, c'est presque un livre sur le narcissisme de la douleur. Mais c'est peut-être ça d'ailleurs, la perte d'un enfant : un repli sur soi.
En revanche, je lui reproche son écriture tout le temps cérébrale, l'abord du sujet avec des références, parfois, qui font que le livre ressemble à une (très bonne) dissertation sur le sujet. Tout est décrit de la douleur d'une mère, et pourtant,
Darrieussecq ne parvient pas à faire naître l'empathie chez le lecteur, tout est trop mis à distance. C'est récurrent dans chacun de ses livres, sauf le premier,
Truismes, qui est presque une incongruité dans la biographie de l'auteur, puisque c'est une farce littéraire.
Finalement, les réflexions de
Marie Darrieussecq sont brillantes, mais il lui manque irrémédiablement l'émotion pour parvenir à donner de la chair à ce livre. Une lecture en demi-teinte.