Pour moi, la rue de Bruxelles est demeurée tout entière dans le petit hôtel de Zola, où il recevait gentiment ses amis. Il était gourmand, il zézayait et, d'un air futé, disait de la bécasse flambée : «La fair (la chair) est quelconque, mais la faufe (la sauce) est bonne. » Sa maison était décorée de blocs de pierre sans intérêt, rapportés d'Italie, et qui excitaient l'hilarité de Goncourt, de quleques belles toiles de Manet, Cézanne et autres, et de meubles riches, qu'il croyait anciens, mais que le même Goncourt affirmait rafistolés. Son goût, sauf en peinture, était moyenâgeux et incompétent. Mon père disait : «Il aime les stalles et les cathèdres. »
(…) Fasse la providence que, dans deux cents ou deux cent cinquante ans, nos successeurs ne soient pas des badernes, des ganaches, des pleutres comme la plupart de ceux de la Maison d’en face, des vieux petits pions ratatinés, distribuant, sans rire, des prix de vertu; rédigeant des petits discours de réception bien proprets ; astiquant, sous le nom de critiques, des dessus de pendule ; disputant, en baroco, sur tel ou tel mot à admettre dans le dictionnaire àcaca-adédé-amimique ou à rejeter ! Si cela était, nous les anciens, nous du début, nous viendrions les tirer par les pieds, renverser leurs soupe sur leurs pantalons et nous amènerions avec nous Goncourt « monsieur Edmond » comme disait Masson, qui les gourmanderait d’importance.
Marcel Jullian sur les farces littéraires
Marcel JULLIAN raconte certaines farces littéraires de
Roland DORGELES et
Léon DAUDET.