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sur 526 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Dans un petit village de l'Empire du Japon, au XIIe siècle, vivent Katsuro et son épouse Miyuki. Katsuro est un pêcheur de carpes réputé car, une fois par an, il prend la route de Heiankyõ, lieu de résidence de l'Empereur, où il livre ses plus belles carpes au Bureau des Jardins et des Étangs. Or, il perd la vie lors de sa dernière pêche destinée à l'étang sacré. Katsuro mort, c'est son épouse Miyuki qui est désignée pour la livraison des carpes. Elle entreprend ce long voyage les épaules meurtries par l'écrasement de la palanche qui supporte les deux nasses dans lesquelles sont réparties les huit carpes destinées au Directeur du Bureau des Jardins et des Étangs.
Arrivera-t-elle au bout de ce long chemin semé d'embûches ?
Didier Decoin, d'une très belle écriture, livre un beau récit qui révèle les moeurs et coutumes ayant cours au Japon au XIIe siècle. À lire !
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Beaucoup d'auteurs écrivent sur ce qu'ils connaissent, sur ce qu'ils ont vécu, sur des sujets qui leur sont proches. On y trouve, moi le premier, une garantie d'authenticité, de justesse. Quand il s'agit d'un auteur qu'on aime, on se dit parfois quand il reste dans ces sujets, qu'on aimerait qu'il aille explorer d'autres territoires, pour voir comment son style s'adapterait, s'il réussirait l'exercice, s'il ne se perdrait pas en route.

Je lis pour la première fois Didier Decoin, qui est né à Boulogne Billancourt en 1945 et écrit ici sur le Japon du XIIème siècle. Quel introduction inutile me direz- vous ? Non, car malgré tant d'écart entre sa réalité et celle du livre, il parvient à nous immerger complétement dans son récit. J'en ai vécu une expérience concrète, en tant qu'utilisateur du tramway. A deux reprises, plongé dans ma lecture, je me suis trompé d'arrêt de descente (une fois trop tard, la fois suivante trop tôt). Quelle meilleure marque d'une atmosphère envoutante et prenante, alors qu'on voudra bien m'accorder qu'une rame de tram n'a rien à voir avec l'empire ancestral japonais.

Au delà de cette sensation, je peux essayer d'analyser ce qui m'a plus, touché dans son récit. C'est surtout et essentiellement un livre du deuil, magnifiquement décrit par l'auteur et dont on partage avec l'héroïne Miyuki les sensations complexes, lors d'un voyage initiatique inversé dans les campagnes japonaises et vers la capitale, à travers l'exploration de tous ses sens, de la vision des forêts, aux odeurs entêtantes des encens, en passant par le toucher des écailles des carpes. le fantôme de son époux est omniabsent, jamais là et pourtant toujours avec elle.

Au delà du deuil, c'est aussi une magnifique histoire d'amour. Une histoire simple, entre gens modestes (ce qui m'a rappelé le magnifique Quoi de neuf, petit homme ? d'Hans Fallada, dans un tout autre contexte). A l'opposé des livres d'amour décrivant des histoires impossibles entre deux êtres que tout sépare, tout unit ici Miyuki à Katsuro, et cela ne fait que renforcer ce sentiment qui n'a pas les mots pour s'exprimer mais qui n'en est pas moins là dans leurs attentions, leurs gestes, leurs étreintes.

C'est enfin la confrontation entre deux mondes, deux classes sociales unies ironiquement par des poissons plutôt communs comme les carpes, absolument indispensables aux étangs des monastères et amenant de fait une dépendance aux simples pécheurs provinciaux. La rencontre entre le chef du Bureau des Jardins et des Etangs et la veuve du pêcheur est marquante, forte, là encore totalement dans l'empire des sens, d'un sens en fait, l'odorat qui marque la différence de caste, entre les odeurs agréables ou nauséabondes, mais aussi entre les senteurs artificielles ou les odeurs naturelles et authentiques.

Bref de nombreuses strates à découvrir, où se perdre, comme dans les différentes eaux des étangs où cherchent à se cacher ces carpes qui servent de fil conducteur d'un récit prenant.
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Lorsque Katsuro, pêcheur dans un modeste village, se noie dans la rivière, c'est un compagnon de vie que perd Miyuki.
Pour le village entier, c'est la menace d'un déshonneur. En effet, Katsuro était un pêcheur renommé, fournisseur de carpes d'ornement pour les étangs sacrés de la cour impériale. Son mari disparu, c'est Miyuki qui est chargée d'emmener les carpes à Heiankyo.
Courageuse, la frêle jeune femme entreprend cette longue traversée semée d'obstacles et de rencontres plus ou moins heureuses. Si les désillusions et le découragement frappent Miyuki confrontées à la violence des éléments, à l'âpreté du chemin et aux trahisons humaines, elle est également portée tout au long de son périple par l'amour qui l'a unie à Katsuro. Celui-ci lui revient en mémoire dans les gestes qu'il lui a appris pour veiller sur ses carpes, dans le souvenir de ses propres récits de voyage, des paysages qu'il lui a décrits, des auberges dont il lui a parlé, dans les réminiscences aussi du plaisir et de la complicité partagée.

Le Bureau des Jardins et des Etangs est un roman d'une sensualité envoûtante et d'une sensibilité exquise. L'écriture délicate et subtile demande à être savourée à petites doses, pour profiter de chaque parfum, de chaque arôme, de chaque frôlement d'étoffe et se laisser bercer.

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Une très belle lecture au goût de conte initiatique. On se retrouve transporté au Japon du XII ème siècle.
Sensuel, olfactif, naturel tous ces adjectifs me viennent en tête.
J'ai senti, j'ai ressenti, j'ai vibré en accompagnant Miyuki lors de son périple pour sa précieuse livraison.
Miyuki est vraiment une belle personne, simple.
J'ai aimé ce livre comme j'ai aimé son personnage principal, cette femme veuve, Miyuki. Je l'ai suivi dans les étapes de son deuil, dans ce périple qui rend si bien hommage à son mari, ce pêcheur de carpes exceptionnel.
J'ai aimé qu'elle se confronte à ce nouveau monde pour elle, celui très codé et différent du sien dans la cité impériale.
Ce livre est une belle leçon d'humilité et d'amour.
Il décrit à merveille les us et coutumes de l'époque. Il est très poétique et met en avant tout un art de vivre japonais.
On ressent et on sent les personnages. J'ai eu envie que ce livre prenne vie en film d'animation. Mais attention, pas parce que je n'ai pas aimé cette lecture, non j'ai beaucoup aimé l'écriture de Didier Decoin.
Mais cette histoire est digne d'un film de Hayao Miyazaki. Peut-être parce que la couverture de ce roman de Yuji Moriguchi m'a totalement subjuguée.
Une illustration très sensuelle, sexuelle même et qui illustre à merveille une des scènes du livre.
Tous les sens sont mis à contribution dans ce roman. Et les odeurs, le sens de l'odorat est au centre de bien des ressentis. Je vous laisserais découvrir le concours de parfums : le takimono awase.

Alors humez chers amis,
humez toutes les odeurs de la vie,
et accompagnez Miyuki, son fantôme de mari
et ses carpes, dans la cité impériale !
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Roman de Didier Decoin. À paraître le 28 décembre.

Katsuro pêchait les plus belles carpes dans la rivière Kusagawa. Tout Shimae le respectait pour l'honneur qu'il faisait rejaillir sur le village en livrant ces superbes poissons au Bureau des jardins et des étangs pour en orner les bassins des temples d'Heiankyô. À sa mort, sa veuve, la jeune et frêle Miyuki, décide d'honorer la commande passée à Katsuro et de livrer les dernières carpes pêchées par son époux. « Si elle échouait, le village tout entier serait déshonoré de n'avoir pas été capable de fournir des poissons aux temples d'Heiankyô. » Lourdement chargée de nacelles, elle chemine lentement jusqu'à la cité impériale, dépassant des obstacles géographiques et des surmontant des mésaventures humaines. Ce voyage harassant est un deuil en mouvement, un pèlerinage amoureux. « Depuis la mort de Katsuro, la jeune femme vivait dans un brouillard qui assourdissait les sons, détrempait les couleurs. Mais elle pressentait que cette opacité se dissiperait dès qu'elle prendrait la route, et qu'elle verrait alors le monde tel qu'il est en réalité, avec ses aspects positifs et ses pentes néfastes. Puis, lorsqu'elle aurait livré ses poissons, lorsqu'ils glisseraient dans les bassins des temples, sa vie s'empâterait de nouveau, l'obscurité la reprendrait. » Mais la livraison des poissons n'est pas la fin de l'aventure pour Miyuki.

Quel dépaysement que cette lecture ! Avec ses airs d'estampes, ce roman est très exotique et très sensuel. Il est également cruel : pirates sanguinaires, pèlerins escrocs, maquerelles féroces, rien n'est épargné à la pauvre Miyuki qui porte déjà sur ses épaules le triste héritage de son époux. Didier Decoin dépeint avec précision l'absurdité de l'administration impériale, mais également la très grande beauté qui peut naître d'un concours de parfums. « L'odeur séduisante ou fétide qu'il émet ne reflète jamais la réalité d'un être, [...] elle témoigne seulement de la façon dont cet être se manifeste à nous. » Ou quand l'essentiel est invisible pour les yeux...

De cet excellent auteur, je vous conseille Abraham de Brooklyn, John l'Enfer ou encore La promeneuse d'oiseaux.
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Empire du Japon, XIIè siècle.
C'est un long voyage que s'apprête à entreprendre Miyuki. Pour une jeune femme qui n'a jamais quitté son village, la route vers Heiankyô peut sembler périlleuse, mais elle est prête à tout pour livrer les carpes promises par son mari au Bureau des jardins et des étangs. Car elle est seule désormais, depuis que Katsuro s'est noyé dans la Kusagawa. le meilleur pêcheur du village n'est plus et sa veuve se fait un devoir d'honorer la commande de l'empereur. Semé d'embûches, son périple se fera pourtant dans la joie de parcourir les paysages et les chemins découverts avant elle par Katsuro, avec pour seule préoccupation de maintenir en vie les derniers poissons qu'il a pêchés. D'ailleurs l'esprit de son défunt mari l'accompagne partout où elle va. Miyuki peut sentir sa présence, sa protection, ses encouragements, ses caresses.

Roman historique qui nous transporte dans le Japon impérial du XIIè siècle, mais aussi roman d'amour, sensuel et poétique, et encore roman d'aventures qui raconte le difficile et lent voyage d'une femme portée par la fidélité à un homme et à la parole donnée, et aussi roman spirituel où l'on rencontre les esprits des défunts ou ceux des eaux, capables d'avaler l'âme des humains...Le bureau des jardins et des étangs est tout cela à la fois, et plus encore, c'est également le parcours initiatique de la jeune Miyuki, veuve trop tôt, et qui n'a jamais quitté son village que par les histoires de son défunt mari, une ode aux cinq sens où l'on entend chaque bruissement de la forêt, où l'on sent la délicatesse des parfums ou la puanteur de l'eau saumâtre, où l'on goûte la pulpe d'un kaki trop mûr, où l'on ressent la douceur des soieries, où l'on peut entrevoir un esprit et voir la beauté d'une femme cachée sous des haillons.
Un roman élégant, sensuel, délicat, presque un conte, à l'écriture ciselée, recherchée, d'une beauté toute japonaise. Une pépite.
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Pour honorer l'engagement de son village, la jeune veuve Miyuki ira affronter un monde cupide et portera au jardin de l'empereur dans de lourdes nasses les dernières superbes carpes pêchées par son défunt mari.

Incroyables moments, du héron baillant pendant la noyade de Katsuro ou de la danse de Miyuki imitant les hérons cendrés pour protéger ses poissons, ou du concours de parfums qui répondrait au défi de restituer les effluves d'une demoiselle qui, surgie du brouillard noyant un jardin, franchit un pont en dos d'âne pour rejoindre un autre jardin tout aussi noyé de brume que le premier!

Odeurs, parfums, rites, traditions, scènes de sexe crues et vachement poétiques comme seuls les japonais ou un talentueux Didier Decoin en sont capables.
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Vivre des instants délicieux, palpitants et parfois angoissants dans l'Empire du Japon, au XIIe siècle, c'est ce que m'a offert la lecture du dernier roman de Didier Decoin : le Bureau des Jardins et des Étangs.

Même si les personnages très attachants du roman captent l'attention, les véritables vedettes sont les carpes, personnalisées par l'auteur avec un amour et un sens de la description rarement égalés.
Ces carpes, Amakusa Miyuki – au Japon, le prénom vient toujours après le nom - doit s'en occuper car son mari, Katsuro, s'est noyé dans la rivière, la Kusagawa, alors qu'il devait en livrer à Heiankyõ, où réside l'empereur, afin d'agrémenter les bassins impériaux gérés par le Bureau des Jardins et des Étangs.
Miyuko se retrouve donc seule, elle qui s'était mariée par « intrusion nocturne ». Katsuro avait le double de son âge et sa présence, son amour l'accompagnent tout au long du livre, souvenirs délicieux d'une vie commune bien trop brève. L'auteur nous gratifie d'une magnifique séquence érotique après avoir présenté son héroïne : « Une féminité pure et infantile émanait de sa peau lisse et fraîche que Miyuki ponçait à la fiente de rossignol pour la blanchir davantage. »
À pied, avec une lourde et fragile charge sur les épaules, cette palanche qui supporte deux bacs contenant les carpes qu'il faut garder vivantes malgré tous les aléas d'un chemin semé d'embûches. Une halte dans une auberge, la Cabane de la Juste Rétribution, apprend à Miyuki le vrai travail de celles que l'on nomme « les empileuses de riz » et voilà qu'elle passe sa première nuit hors de chez elle.
Au fil des pages, les traditions, les croyances vivaces dans un pays où « huit cent mille dieux règnent », sont bien détaillées toujours avec précision. On apprend que « le bouddhisme, dont l'influence était grandissante, tenait la mise à mort pour l'une des souillures dont il était difficile de se purifier. » À cette époque, le tanka est l'ancêtre du haïku. Chaque mot japonais utilisé est traduit et souvent expliqué en bas de page sans gêner la lecture.
Des détails incroyables, d'une finesse étonnante agrémentent un récit qui intrigue, surprend, angoisse parfois. Dans le domaine des senteurs, des parfums, le summum est atteint à Heiankyõ où Miyuki rencontre enfin Nagusa Watanabe, le Directeur du Bureau des Jardins et des Étangs.
J'ai découvert « la sapidité de l'eau - une saveur douce, légèrement alliacée, avec un arrière-goût de cèleri, de champignon… »
Miyuki aussi s'étonne : « … il lui sembla bien, en effet, qu'un parfum singulier montait de la partie basse de son corps. C'était une odeur tiède, fruitée, avec une légère acidité qui rappelait un peu l'astringence de la chair de kaki. »

Il faudrait citer encore tant d'expressions savoureuses, pleines de délicatesse et de finesse qui font de ce roman un voyage merveilleux.
Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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Oh Pépite d'Or ! Une merveille des merveilles ! ...
On respire, on hume, cette histoire ! Prise dans les filets de l'auteur ! dommage que le livre ne soit pas parfumé ! ...on s'enivre page après page. Le Japon du XIIe siècle : nous cheminons avec Miyuki, jeune veuve qui doit d'aller livrer les carpes sacrées à la capitale, à la place de son mari Katsuri, car celui-ci est décédé dans la rivière de son village. Va-t-elle braver l'inconnu et arriver jusqu'au bout de sa mission ?

Quel périple ! ...et quel périple pour le lecteur ! D'une poésie envoûtante, les descriptions olfactives sont saisissantes,un rythme soutenu d'une singulière sensualité superbe pour quelques passages sur l'échange amoureux. Cette héroïne empreinte de candeur, va au fil des péripéties affronter la Nature, la cruauté des hommes, le monde des superstitions et des croyances. Portée par sa philosophie de vie et la spiritualité asiatique, celle-ci va réussir à traverser toutes les épreuves avec le soutien fantomatique de son cher disparu...

Un roman saisissant, puissant par l'écriture, d'un esthétisme fantastique et qui me fait écho à un film magnifique "le secret des poignards volants "..
Mon enthousiasme n'a d'égal que le nombre de pages de ce volumineux roman captivant qui a été lu avec fluidité et qui a comblé avec joie ma nuit blanche !
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Lecture mitigée.
J'ai apprécié le récit du voyage de Miyuki à travers le Japon jusqu'au Bureau des Jardins et des Étangs, ainsi que les souvenirs de sa vie avec son défunt mari, la vie et les règles de la Cour de l'Empereur.
Par contre j'ai moins accroché à l'histoire de son séjour à la capitale et à la fin du roman.
C'est peut être dû à la lecture du roman le lecteur de cadavres qui m'avait particulièrement emballée.
Cela reste un livre très bien écrit, avec une belle histoire très poétique, des belles descriptions. A découvrir.
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