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Impossible de cacher le gros coup de coeur que me procure toujours ce charmant musée créé en 1934 à la suite du legs de son hôtel particulier par
Paul Marmottan à l'Académie des Beaux-Arts !
Grâce à l'importante donation en 1964 de Michel Monet, fils de Claude Monet, complétée par d'autres donations exceptionnelles, le musée devient la plus importante collection mondiale de l'oeuvre de Claude Monet et, par la suite, de celle de
Berthe Morisot.
La particularité de ce beau-livre est de montrer les cent cinquante oeuvres les plus importantes de l'artiste avec une excellente qualité de reproduction sur papier glacé. Il ne s'agit pas d'une monographie, mais la carrière du peintre est déroulée, de ses débuts de caricaturistes au Havre jusqu'aux merveilleux Nymphéas des dernières années de vie. Les oeuvres sont analysées par genre : figures et silhouettes, bords de l'eau, effets de neige, villes, voyages. La partie la plus intéressante est consacrée à Giverny.
Lorsqu'il rencontre Eugène Boudin au Havre, le jeune Claude Monet à dix-huit ans et Boudin trente-quatre ans. Il passe son temps à dessiner des caricatures des bourgeois de la ville, avec succès. Boudin lui dit : « Vos croquis sont amusants, c'est enlevé, vous êtes doué. » Ils peignent ensemble. Plus tard, Monet qualifie les moments passés avec Boudin d'éblouissants : « Ah quelle révélation !... La lumière venait de jaillir. »
Avant de devenir exclusivement paysagiste, Claude Monet fait des portraits choisis le plus souvent parmi ses proches. Après son mariage en 1870 avec la jolie Camille, il va mettre sa femme à contribution comme modèle. Il la peint sans cesse. Plusieurs toiles importantes de Camille sont dans le musée :
« Sur la plage de Trouville », 1870 : Ce bel été de leur mariage semble marquer un tournant dans le style de Monet. L'étude de la lumière devient désormais sa préoccupation essentielle. Camille passe ses journées à poser sur la plage, au point que sa robe se teinte d'une couleur sable lorsqu'il la croque dans toutes les positions en regardant la mer.
« Promenade près d'Argenteuil », 1873 : À Argenteuil, la Seine, les jardins fournissent à Monet des sources d'émerveillement. Sa couleur se libère. Il oblige Camille à parcourir les champs fleuris afin de l'insérer au mieux dans le décor. La silhouette de la jeune femme se confond avec les herbes et les fleurs des champs, sa figure s'estompant dans le paysage.
Monet peut-il se douter que la toile qu'il appelle « Impression, soleil levant » sera la vedette de l'exposition des artistes indépendants en juin 1874 chez Nadar ? Tous ses amis avant-gardistes sont présents. Un journaliste du « Charivari » la moque. le mot impressionniste est né.
Cette toile est devenue la toile la plus recherchée par les visiteurs du musée Marmottan.
Camille, le premier amour de Monet, s'éteint 9 années après leur mariage. Une période importante de son existence se termine devant le visage glacé de cette morte dont les beaux yeux se sont définitivement fermés.
Le vieux complice de jeunesse de Monet, Auguste Renoir, peindra le délicat visage de Camille dans un portrait que le musée a la chance de posséder : « Portrait de madame Claude Monet ». Je suis allé sur sa petite tombe dans le cimetière de Vétheuil au bord de la Seine. Quelques fleurs tapissent encore le monument entouré d'un ouvrage en fer forgé.
Monet découvre Giverny sur la rive gauche de la Seine entre Bonnières et Vernon. La région l'inspire, il s'y installe définitivement. Il s'est remarié avec Alice.
Il a créé lui-même un curieux jardin. Toutes les teintes de fleurs se côtoient de façon un peu désordonnée et apportent la touche de folie de l'artiste… Monet aime peindre plusieurs toiles en même temps aux diverses heures du jour, comme les meules ou peupliers aux alentours. Blanche, sa belle-fille, le suit dans ses promenades et installe son chevalet à ses côtés. « Regarde la nature et peins ce que tu vois, comme tu peux. », lui dit-il.
Il a aménagé un étang et planté des nénuphars. Ses yeux fatigués fouillent inlassablement l'horizon liquide et reproduisent l'apparence éphémère des choses…
Le Musée possède un grand nombre de Nymphéas. J'observe les courbes gracieuses des « Agapanthes » et « Hémérocalles » qui ne pouvaient qu'inspirer l'artiste.
La plupart des Nymphéas exposés à Marmottan ont été retrouvés dans l'atelier du maître après son décès. Elles servaient d'études préparatoires pour les « Grandes Décorations » données à l'État par Monet en 1927. L'on y retrouve l'harmonie picturale des grands panneaux que j'avais admirés dans les grandes salles ovales du musée de l'Orangerie à Paris : la symphonie des couleurs, les saules pleureurs trempant dans l'onde, les reflets des nuages dans l'éclat du soleil primesautier, les vibrations des feuillages dans l'eau troublée par le vent, la lumière volage. Seul Monet était capable de rendre ce fouillis aquatique de façon aussi réaliste, souvent proche de l'abstraction.
« J'ai fait comme peintre ce que j'ai pu et cela me semble assez. »
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