Le peintre du moyen âge attendait des journées, des semaines, des mois, s'il le fallait, que sa couleur fût à point. S'il s'agissait d'appliquer cette couleur, sa patience n'était pas moindre. C'est quelquefois lorsque cinq couches successives avaient été étendues l'une sur l'autre après séchage complet de la précédente, que l'enlumineur espérait voir apparaître la nuance cherchée. Il y fallait du courage, car en hiver, par les temps humides, cela pouvait exiger plusieurs semaines. Dira-t-on que les résultats en sont médiocres? Après sept cents ans et plus, ces oeuvres de peinture n'ont subi aucune altération.
Le manuscrit était resté inédit et même inconnu jusqu'à nos jours. Il est conservé à la bibliothèque de Naples. Il a pour auteur un Italien et date du XIVe siècle, ainsi que les deux éditeurs l'ont suffisamment établi. Il est composé de recettes pratiques, où l'art d'imiter la nature n'est touché que par exception et d'une manière indirecte. Comme l'enluminure ne peut prétendre à une existence distincte que de cette manière, et que ses principes sont les mêmes à l'égard du dessin et de l'imitation que ceux de tous les autres genres de peinture, il est naturel qu'un traité de cet art se borne à cela.
L'enluminure d'estampes brille au XVIIIe siècle dans quelques exemples charmants. Le coloriage à l'eau lui survécut, ou plutôt refleurit sous la Restauration comme une nouveauté de ce vieux fonds, encouragée peut-être par la faveur nouvelle que rencontraient les anciens manuscrits.
On se mit à colorier les livres en abondance d'après des règles et avec une perfection qui en faisaient un art véritable : art qui s'est prolongé jusqu'en 1850, portant presque jusqu'à nos jours les derniers et lointains échos de la tradition.