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EAN : 978B005Q4OKRY
(27/09/2011)
4.25/5   4 notes
Résumé :
Histoire d’un homme du peuple (suivi de Les Bohémiens sous la Révolution) : L’ « Homme du peuple » est un ouvrier de Saverne, Jean-Pierre Clavel, orphelin élevé par une brave marchande des quatre saisons, la mère Balais, pauvre mais généreuse, qui a fait de lui un bon artisan et l’a envoyé à Paris pour se perfectionner dans son état de menuisier. À Paris, Jean-Pierre se loge dans le quartier des Écoles, où il retrouve Emmanuel, un de ses anciens camarades, étudiant ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
La révolution dans le Paris de 1848, comme si on y était. Une sorte de reportage très vivant pour les amoureux d'histoire (mais ce témoignage n'est pas sans parti pris) et de la capitale.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Dans ce temps, le pâté de maisons entre la tour Saint-Jacques et la place du Châtelet n’était pas encore abattu. C’est là que se trouvaient les vieilles rues Saint-Jacques-de-la-Boucherie, de la place aux Veaux, de la Lanterne, etc. C’était sale, gris, vieux, décrépit, étroit. En levant les yeux, on voyait toujours au-dessus des pignons le haut de la tour, avec son lion ailé, son bœuf griffon et son vieux saint Jacques, qui vous regardaient comme au fond d’une citerne.



Les jours ordinaires, lorsque les porteurs d’eau, les marchands d’habits, les chanteurs en plein vent, entourés de monde, les lavandières de la Seine, les gens de la Halle et du marché des Innocents allaient, venaient, criaient dans un rayon de soleil, c’était bien. Mais un jour de pluie, au milieu des pavés soulevés, cela changeait de mine.



La première chose que je fis, ce fut de regarder par-dessus la barricade, du côté du quai, et chacun peut se figurer mon étonnement, en voyant les troupes en colonne à deux cents pas de nous, les sapeurs en tête, le grand bonnet à poils carrément planté sur les sourcils, le large tablier de cuir blanc descendant de l’estomac jusqu’aux genoux, le mousqueton en bandoulière et la hache sur l’épaule, prêts à marcher.



Oui, cette vue m’étonna. J’aurais tout donné pour avoir un fusil ; mais ma surprise fut encore autrement grande en regardant les camarades, et, pour dire la vérité, je n’ai jamais revu leurs pareils. Ils étaient une quinzaine ; un vieux tout blanc, la poitrine débraillée, le nez en crampon, la bouche creuse ; les autres, des hommes faits, et deux garçons de dix à douze ans : tout cela couvert de boue, trempé par la pluie, des souliers éculés ; quelques-uns en blouse, d’autres en veste, et même deux ou trois sans chemise.



Notre barricade n’avait pas plus de trois ou quatre pieds de haut ; la pluie qui tombait formait des deux côtés une mare où l’on enfonçait jusqu’aux genoux. Ces gens entraient dans une allée à gauche, pour charger cinq ou six vieilles patraques de fusils à pierre, et deux grands pistolets mangés de rouille, qu’ils venaient décharger ensuite de minute en minute sur les sapeurs, en riant comme des fous. Il leur fallait du temps pour mettre la poudre, pour déchirer une mèche de la blouse qui servait de bourre, et serrer la balle. Chaque coup retentissait dans ces boyaux comme le tonnerre.



De temps en temps il partait aussi quelques coups de fusil d’autres barricades aux environs, qu’on ne voyait pas ; des feux de peloton leur répondaient.



Jamais on ne se figurera rien de plus triste, de plus sauvage, de plus terrible que cette espèce de massacre dans des recoins détournés, sous la pluie continuelle. Le crépi des vieux murs pleuvait, les volets détraqués se balançaient à leurs gonds, les enseignes étaient criblées. Ces pavés entassés en triangle vous représentaient un véritable coupe-gorge, quelque chose d’effrayant et de sinistre.
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Lorsque mon père, Nicolas Clavel, bûcheron à Saint-Jean-des-Choux, sur la côte de Saverne, mourut au mois de juin 1837, j’avais neuf ans. Notre voisine, la veuve Rochard, me prit chez elle quinze jours ou trois semaines, et personne ne savait ce que j’allais devenir. La mère Rochard ne pouvait pas me garder ; elle disait que nos meubles, notre lit et le reste ne payeraient pas les cierges de l’enterrement, et que mon père aurait bien fait de m’emmener avec lui.
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Au milieu de ces pensées, je repris le chemin de la maison, la bretelle de mon vieux fusil rouillé sur l’épaule. Jamais l’idée ne me serait venue que la bataille continuait encore le long des quais ; que M. le duc de Nemours avait oublié de prévenir les municipaux de suspendre leurs charges, et de leur dire qu’ils en avaient assez fait, qu’il n’était plus nécessaire de massacrer les gens ! Eh bien, en repassant par la place du Châtelet je les vis encore là, prêts à charger. Leurs chevaux tremblaient sous eux de fatigue et de faim, eux-mêmes grelottaient de froid ; mais la rage d’entendre crier : « Vive la ligne ! À bas les municipaux ! » durait toujours.
Presque toute la troupe de ligne s’était alors retirée vers l’Hôtel de ville et les Tuileries.
Sur le pont Saint-Michel, un brancard marchait lentement, deux hommes le portaient. Presque tous les autres blessés de la rue Saint-Martin allaient à l’Hôtel-Dieu. Dans la rue de la Harpe quelques femmes entourèrent le brancard. Moi je tombais de fatigue, et j’entrai dans le caboulot, où je mangeai seul au bout de la table.
Mme Graindorge paraissait désolée ; elle me dit que pas un seul d’entre nous n’était venu dans la journée, et que M. Armand lui-même avait fini par s’en aller, en criant qu’il ne voulait pas passer pour un lâche !
Pendant qu’elle me racontait cela, je tremblais de froid ; mes habits, ma chemise, mes souliers, tout était trempé, et seulement alors je sentis qu’il fallait me changer bien vite : mes dents claquaient. Je sortis dans la nuit noire et je courus à la maison. Le portier, en me reconnaissant sur l’escalier, me cria :
– Eh ! monsieur Jean-Pierre, vous en avez fait de belles ! vous êtes signalé dans tout le quartier. On est venu demander de vos nouvelles.
Et comme il était sorti sur le pas de sa loge, en apercevant mon fusil il s’écria :
– Ah ! ah !… Je pensais bien… On va venir vous agrafer !
– Celui qui viendra le premier, lui dis-je en ouvrant le bassinet, n’aura pas beau jeu ; regardez… l’amorce est encore sèche.
Il ne répondit rien, et je montai quatre à quatre.
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