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"Tel vous le versez, tel vous le boirez."
(proverbe russe)

Je ne me suis jamais considérée comme une inconditionnelle de la littérature post-moderne russe, mais "Moscou-Pétouchki" ("Moscou-sur-Vodka", en français) vaut vraiment le détour. C'est une sorte de manifeste de son époque (1969), un peu comme "On the Road" de Kerouac, mais profondément et désespérément russe.
Sur les 200 pages à peine, "l'âme russe" se dévoile dans toute sa largeur, profondeur et bassesse; dans un envol métaphysique plein d'un incroyable pathos.
En général, j'aime qualifier ce type de livre de "ragoût", mais ceci est une authentique solianka littéraire agrémentée d'aneth frais. L'essence même de la Russie, envoyée par un lanceur de couteaux professionnel directement dans le coeur, pour vous épingler au mur avec la force inouïe de la Zubrovka matinale. Le vent glacial de novembre plein de vapeurs éthyliques vous mettra les larmes aux yeux, et vous privera de parole jusqu'à ce que vous réussissiez à mettre la main sur la première bouteille disponible.

Je ne sais pas comment définir ce petit livre, que je considère comme intraduisible. Prenez la souffrance contenue dans l'âme russe depuis toujours, ajoutez y un peu de mélancolie hurlante, la propension à la dépense mélangée à la misère ambiante, un brin de jovialité et la passion pour l'alcool, et secouez... Vous obtiendrez Vénitchka Erofeïev, qui discute être et non-être avec des quantités d'éthanol capables de mettre à genoux toute une armée Viking; mais lui, il ne ressent qu'une infinie tristesse dans l'âme.

Je pourrais simplifier, en disant qu'il s'agit d'un voyage dans un train de banlieue entre Moscou et Pétouchki. Mais vous ne savez pas si vous êtes en train de lire un discours incohérent d'un ivrogne, ou un texte subtil et réfléchi d'un génie hors-normes, avec un verre de "Baiser sans amour" (rebaptisé plus tard en "Nadejda Kroupskaïa") dans sa main tremblante.
Vénitchka a mal, mal, mal au corps et à l'âme; mal à cause de tout ce qui était et tout ce qui sera, il veut juste arriver sans encombre à Pétouchki, mais comment ? Pour l'amour de Dieu qui n'existe pas et pourtant si, comment, quand le trajet est parsemé de tant de pièges, tant d'alcool, tant d'arrêts et tant de voyageurs qui n'hésitent pas à partager leur fond de bouteille en abordant des sujets aussi divers que les rots et la théologie ? Comment faire un pas décidé droit devant, quand le filet avec les bouteilles est si lourd, le travail sur le chantier si fatigant, et puis ces anges qui s'en mêlent... Il faut juste réussir à descendre à la bonne station !

C'est une lecture absolument dépressive, qui vous cassera en morceaux pour remettre ensuite ces éclats d'une façon toute différente : vous ne verrez plus jamais la Russie comme avant. Bien sûr que c'est drôle, mais c'est un humour qui vous dressera les cheveux sur la tête. Je ne peux que le recommander. Ca ne va pas vous plaire, mais ce n'est pas important.

Et puis, quoi... je vous invite tous à trinquer avec "Tripe de chienne" ("Soutchiy potrokh"), une boisson qui éclipse toutes les autres.
Notez :
- Bière Jigoulovskoie, 100 ml
- Shampooing Sadko-Riche marchand, 30 ml
- Gel anti-pelliculaire, 70 ml
- Colle BF, 15 ml
- Liquide de frein, 30 ml
- Insecticide contre les petits nuisibles, 30 ml

"Laissez macérer pendant une semaine avec toutes sortes de feuilles de tabac, et servez. Ce n'est plus une boisson, c'est une musique des sphères."

Za vashe zdorovie ! Je dédie ce billet à Booky, en remerciement pour sa "Tête légère". Ceci laisse la tête lourde qui tourne... mais aussi quelque chose de plus.
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Le postmoderne et moi, c'est deux. Mais je me prête à l'exercice à l'occasion, comme pour cette oeuvre, Moscou-sur-vodka. Il s'agit d'un roman paru tout d'abord sous forme de samizdat, une sorte de feuilleton interdit. Quand on sait qu'il est impossible d'éviter la censure soviétique, il faut recourir à la publication clandestine. C'est une raison suffisante pour vouloir la lire… Et heureusement que Venedikt Erofeïev l'a fait ! Son roman satirique, sous couvert d'humour, tourne en dérision (et autodérision) les revers de la société russe. Sacrilège !

Son anti-héros, Vénitchka (double de l'auteur), déambule à moitié ivre dans les rues de la capitale russe. C'est le début du long parcours de cet intellectuel alcoolique, de la gare de Moscou à celle de Pétouchki, en passant par Karatchavoro, Tchoukhlinka, etc. Pendant ce long trajet, il ne cesse pas un instant de boire et il ne se limite pas à la vodka ! Tous les spiritueux y passent, gnôle, vermouth, etc. Il ne manque que le cocktail Molotov…

Mais Vénitchka n'est pas le seul à boire. Il vit dans un monde d'alcooliques, tous ne survivent dans ce pays difficile que grâce à la bouteille. C'est triste. Ensemble, ils se laissent aller aux confidences, à parler politique, art et littérature (Blok, Gorki, Dvorak, Marx, etc), à philosopher. En fait, ils divaguent. Surtout, tous y vont de leurs trucs pour continuer à boire. C'est pathétique. Est-ce vraiment l'image qu'Erofeïev se faisait de ses concitoyens ?

Dans tous les cas, Vénitchka est tellement bourré qu'il s'endort dans le train qui, après être arrivé à destination, fait demi-tour. le pauvre homme se retrouve là où son périple a commencé : Moscou. La finale m'a beaucoup surpris mais je la trouve appropriée. En effet, il ne pouvait que se retrouver victime d'autres alcooliques.

Mais pourquoi tout ce beau monde est ivrogne ? Il y a tant de raisons ! Certaines sont sérieuses et d'autres, moins. C'est là que le côté satirique d'Erofeïev ressort. C'est déjanté, irrévérencieux, je peux comprendre pourquoi le régime soviétique de l'époque n'aurait pas apprécié. Mais est-ce suffisant ? Original, oui. Fascinant, je n'en suis pas convaincu. Je peux comprendre que de telles oeuvres soient importantes mais, d'un point de vue strictement littéraire, je ne peux pas dire que ce soit ma tasse de thé… Pardon, ma bouteille de vodka.
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Vénédict Erofeiev quitte Moscou à la gare de Koursk pour rejoindre sa récente conquête à Pétouchki. Il boit comme un trou depuis environ quarante-huit heures et continue à se saouler à bord du train, alors même qu'il est complètement cuit. Cela n'a pas grande importance, du reste, car les autres passagers et le contrôleur sont dans le même état que lui.
Mais ils sont tous alcooliques, là-dedans? Oui, absolument. Nous sommes en Russie après tout et pas à n'importe quelle époque : dans la Russie communiste. L'auteur consacre d'ailleurs un joli paragraphe aux raisons qui poussent les gens à se pinter autant.
Mais Pétouchki, alors? Eh bien, comble de malchance, le narrateur n'arrivera jamais à Pétouchki. Il a trop bu et s'est endormi dans le train. Voilà. Ce sont des choses qui arrivent. Il se retrouve donc à Moscou, son point de départ, et, ce qui en revanche arrive moins souvent, se fait poursuivre par quatre hommes qui veulent le tuer. Dans sa fuite, il tombe nez à nez avec le Kremlin, lui qui ne l'avait jamais vu !

Je n'aurais jamais connu ce roman s'il n'avait pas été cité dans Limonov par Emmanuel Carrère. J'en avais noté la référence et grand bien m'en a pris. C'était si drôle !
Le récit semble n'avoir ni queue ni tête (et pour cause, on part de Moscou et on finit à Moscou) mais il est plein d'humour et contient en réalité une critique de la société dans laquelle vit l'auteur.
En somme, je vous conseille cette lecture si vous voulez passer un bon moment, sans prise de tête mais en riant un peu et en vous plongeant dans l'Union soviétique via les yeux d'un de ses habitants.

Challenge ABC 2023/2024
Challenge XXème siècle 2024
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L'une de mes lectures les plus marquantes, pour ses qualités littéraires, pour l'originalité de ce roman postmoderne russe, ainsi que pour sa capacité de s'ériger en emblème, onirique et éthylique, du passage au post-communisme et de la désorientation de la jeune génération concernée. le voyage en train du personnage, ainsi que sa disparition sont peut-être totalement imaginaires. Seules les recettes de breuvages ont l'air réel!
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Note : 3243
Habitation 3 : on y retourne, tel l'ivrogne
Edification 2 : on y apprend l'intéressante pratiquedu zapoï
Emotion 4 : excessivement drôle
Style 3 : fluide, sans grumeaux, ça se boit tout seul
Lien : https://www.facebook.com/not..
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J'ai été très déconcertée par ce livre. C'est un livre totalement inclassable selon mes critères. L'auteur (qui est aussi le héros de l'histoire) est complétement ivre du début à la fin. Il navigue totalement saoul dans un monde d'ivrognes.Le héros prend le train à Moscou pour aller à Pétouchki à quelques que 150 km de Moscou. Après de nombreuses réflexions philosophiques noyées dans l'alcool, il finit par se retrouver à son point de départ où l'attend une fin tragique. Pendant tout le périple le personnage boit et nous fait part de ses idées qui bousculent les théories généralement admises sur la politique et les « grands hommes ».C'est assez difficile à lire. Ce n'est vraiment pas toujours une sinécure de suivre le fil de la pensée de l'auteur.
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"Moscou-sur-Vodka" raconte les dernières heures de la vie d'un alcoolique au bout de son rouleau. Les événements se passent sur une des onze lignes de métro de la ville de Moscou. le ton était très comique mais j'ai très peu ri. le protagoniste qui cite énormément des auteurs russes, allemands et francais et supposé être un ouvrier ce qu'il n'est pas.

Je l'aurai probablement mieux aimé si je n'avais pas lu beaucoup dans le genre. Je suis bien d'accord avec les autres sur ce site qui disent que "Moscou-sur-Vodka" fait penser à "Sur la route" de Jack Kerouac. Cependant il faut dire qu'il fait penser aussi au "Festin nu" de William S. Burroughs et à "Au-dessous du volcan" de Malcolm Lowry. La liste est longue chez le anglais.

J'aurai probablement mieux aimé ce roman si je n'avais pas lu autant dans le genre. Je recommande ce roman aux jeunes lecteurs qui ne sont pas encore blasées.
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Du moderne pour cette époque, de l'absurde et une vision très détaillée des Zapoï russes. Un de mes livres russes préférés !
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L'originalité ne me rebute pas, le style littéraire de l'auteur, même s'il est loufoque, est d'une grande qualité.
Mais je n'ai jamais réussis à rentrer dans l'histoire.
J'ai eu beaucoup de peine à le terminer.
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