Quel bijou ce petit livre !
Incipit :
L'ARBRE
« J'aime les femmes. Les femmes et les fleurs sauvages. Les fleurs sauvages portent les couleurs qui me plaisent. le blanc, le jaune et le mauve. Ce sont les couleurs du pays. C'est avec elles que les anciens peignaient les statues, et les proches aïeux leurs fenêtres. mai les crocus, les anémones, les lys et les asphodèles portent ces couleurs. le blanc, le jaune et le mauve.
Les femmes vivent les grandes passions. Elles écrivent l'Histoire et portent sur leurs épaules le poids des instants décisifs »
Ainsi commence ce récit choral avec un arbre qui parle, dont seules quelques femmes savent entendre l'oracle de ses feuilles.
Fotos va mourir. Pendant son agonie, les voix des trois femmes se mêlent pour conter l'histoire de la famille en Thessalie. Demeter, la Mère, octogénaire, Hélène sa fille, la jumelle de Fotos, celle qui entend l'oracle de l'arbre, et Roula, jeune fille moderne d'Athènes qui a promis d'assister aux funérailles de Fotos. A ces trois femmes bien vivantes qui trient les lentilles, rangent le linge et soignent Fotos, il faut ajouter les absentes : Perséphone, la première fille de Démeter, disparue, l'Aïeule déjà centenaire en 1924 qui a accueilli Demeter fuyant l'Anatolie, Despinio à l'origine de du rejet des enfants bâtards et de leur mère – du village, Archondoula, la mère de Roula. Une véritable saga sur 7 générations, comme les sept dépouilles qui ont donné le titre du livre.
Dans le récit choral, le lecteur découvre la saga de cette famille qui se mêle à l'Histoire de la Grèce : la Guerre d'Indépendance en 1824, où le mari de l'aïeul était un capitaine près de Canaris, la Grande Catastrophe et l'exil des Grecs d'Anatolie, l'occupation allemande, et la guerre civile, la dictature.Grande Histoire est comme un filigrane dans le récit.
Autre thème : la mythologie et la Grèce antique. Ulysse et sa rame qui s'enfonce dans les terres à la recherche d'hommes qui ne verraient qu'un morceau de bois dans ce que n'importe quel marin nomme une rame. La disparition de Perséphone dans les entrailles de la terre. Naissance d'Aphrodite rêvée de la Mère…..
Et les hommes dans ce récit au féminin? Ce sont des fantômes, tête d'Andronic, le gentil mari de Déméter, artiste, père de Perséphone dont la tête refait surface, comme celle d'Orphée, ou sous forme de dépouilles, le capitaine coiffé de son fez rouge, assistant au banquet funèbre, Yannis, le résistant dont il ne reste qu'une chemise tachée de sang, et puis l'odieux père des jumeaux. Étrange coutume que ce repas d'enterrement où sont présents les aînés des familles, servis par les femmes….
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