Cette "nuit en mer", moment tellement attendu, pourtant cent fois repoussé par la tentation d'un autre livre, s'est, au final, plutôt révélée comme décevante.
Derrière cette nuit de vent et de tempête, de pluie et de brume ne se cachait qu'un petit livre indigne de la plume de son talentueux auteur.
En 1902, au temps où résonnait encore la prière sur les vaisseaux de France, un jeune enseigne de vaisseau s'apprête à prendre un quart de nuit à la passerelle du croiseur le "Vautour".
Mais auparavant il achève le neuvième conte d'un recueil qui s'appellera "Fumées d'opium" ...
Claude Farrère nous offre, avec "Une nuit en mer", un petit livre de souvenirs.
Mais ni l'écrivain prestigieux, ni l'officier de marine averti ne sont au rendez-vous.
Bien sûr, le livre se lit avec plaisir et intérêt.
Mais l'on était en droit de s'attendre à tellement mieux.
Car lorsqu'après avoir suivi la plume de Claude Farrère, le sentiment est mitigé, c'est que la manoeuvre est manquée.
Pire, il se dégage de ces quelques pages un désagréable sentiment de déjà lu.
Et puis que dire de ce jeune officier qui, au moindre coup de tabac, tombe plus souvent qu'à son tour, abandonne sa cabine où rien n'était amarré, se cogne au moindre obstacle, ne s'inquiète que trop tard des sursauts du baromètre et oublie le matelot du gaillard, lorsque de quart à la passerelle, il fait l'appel de son personnel ?
Que dire d'un écrivain qui, voulant jeter l'opprobe sur Camille Pelletan, ministre de la Marine porté à gauche, se lance pour cela dans une diatribe contre les bonnes gens de la feue Encyclopédie, contre les fiers hommes de 89, contre les longues barbes de 48, contre les médiocres avocats du 4 septembre, qu'il enferme tous dans le même sac des petits étrangleurs d'une grande nation !
Décidément, ici, le grand écrivain maritime se montre par trop mesquin pour emporter l'adhésion et pour susciter l'admiration.
Et tout ceci ayant été dit, il ne reste qu'un petit livre qui sera vite oublié ...
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- Eh bien ! Monsieur l'officier de quart ? ... Pour une fois, nous aurons enjambé cette vieille Mer Noire sans peur ni malheur ?
Hier, au départ de Sébastopol, calme plat. La nuit dernière, calme plat. Tout aujourd'hui, calme plat.
C'est incroyable, mais c'est tout de même comme cela ...
Vingt-trois décembre mil neuf cent deux. Trois heures cinquante-cinq après midi.
J'écris dans ma chambre d'officier.
Et il fait si calme que, n'étaient les trépidations de l'hélice, je pourrais croire le "Vautour" encore à l'ancre dans ce port de Sébastopol que nous avons quitté hier soir, ou amarré déjà à notre coffre de Salibazar, dans le Bosphore, où nous arriverons demain matin ...
Claude Farrère :
La maison des hommes vivantsOlivier BARROT, installé dans une chambre, présente une réédition de "
La maison des hommes vivants" en poche Librio ; une histoire
fantastique écrite par
Claude FARRERE, auteur populaire, élu à l'Académie française.