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sur 73 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
« Est enim magnum chaos ».

Le monde de Philippe Forest est un monde dévasté par le deuil, hanté par la perte et la disparition : le premier tiers du livre nous engloutit d'abord dans une immense dépression, celle du narrateur qui vit comme un zombie depuis la mort de son enfant , morte à quatre ans - comme l'auteur lui-même qui, de livre en livre, ne cesse , avec opiniâtreté et une grande cohérence, de creuser le sillon de ce deuil de toutes les façons possibles et dont l'oeuvre se définit et s'origine dans cette catastrophe. La même perte a laissé le narrateur de CRUE sans foi dans l'existence.

J'ai tout de suite été comme magnétisée par cette écriture blanche sans pathos, sans ironie et pourtant si profonde, si viscéralement juste, que j'avais l'impression à chaque ligne d'apprendre des choses fondamentales sur moi …et sur tout le genre humain.

Mais c'était presque trop : j'ai laissé mijoter ce premier tiers, et coupé court à mon vertige en lisant d'autres livres. Mais j'y suis revenue aujourd'hui, et j'ai tout lu d'une traite, fascinée, touchée, emportée.

Submergée serait le terme plus juste, puisqu'il s'agit d'une crue, la crue centennale d'une ville spectrale, de toute évidence Paris, dans un quartier en pleine rénovation où j'ai cru reconnaître le XIIIème du côté du quai de la gare, où quelques immeubles anciens se dressent encore comme une vigie du temps passé sur le relief futuriste des tours et le vaste océan des zones bétonnées et des chantiers chaotiques…

Une crue annoncée, incantée, prophétisée, mais à laquelle l'homo urbanicus ne veut croire, jusqu'à ce qu'elle arrive, telle un déluge punitif envoyé par la Nature outragée.

Sauf que, pas plus que le roman n'est une confidence sur le deuil, la perte irréparable d'un enfant, CRUE n'est pas non plus un roman écologiste. Pas du tout, même.

Il est question de croire, (crue est aussi le participe passé de ce verbe, qui revient comme un leit-motiv dans cette fable mi-intimiste, mi-philosophique) - et c'est d'ailleurs sous cette forme sémantique que le mot « crue » , malicieusement, clôt le livre.

Quand on ne croit plus à rien, quand on croit que le rien , le néant grignote notre vie , il est tout à fait étrange que soudain des choses nous arrivent qui semblent porteuses de sens, qui semblent même nous faire signe.

Surtout dans un univers happé par le vide, dans un monde où les enfants meurent, les mères disparaissent, où les chats s'évaporent, où les foyers de réfugiés brûlent provoquant la disparition de leurs hôtes, happés par le vide des rues sans abri, dans un quartier désert et sans âme où seules brillent deux lumières et où résonne le clavier d'un unique piano.

Et il est encore plus étrange que ces deux lumières correspondent à deux présences, à deux rencontres, à deux histoires, surtout quand ces histoires, ces rencontres adviennent à notre narrateur désenchanté…

Dès lors cette femme, cet homme rencontrés et fréquentés, successivement, chaque nuit, pendant dix jours semblent porteurs d'un message.

Surtout quand leur conjointe disparition précède de peu la grande catastrophe..

Non, Crue n'est pas non plus une sorte de roman gothique à l'anglaise- encore que la référence à un roman gothique anglais ne soit pas si inappropriée.. mais je vous laisse découvrir en quoi- c'est un roman poétiquement fantastique, d'un fantastique intérieur, une sorte de fantastique « mental ».

En le lisant j'ai souvent pensé à Solaris , un très beau film russe, de Tarkovsky, je crois, assez impénétrable mais très pénétrant, où une planète-océan charriait, comme une sorte de cerveau liquide, , toute la nostalgie et les souvenirs des hommes dans ses replis et ses énormes tourbillons…

La ville imaginée par Philippe Forest est comme déréalisée par le désespoir de celui qui l'habite, et son improbable rencontre avec un désir -la femme- et avec une prophétie - l'homme- redonne soudain à sa vie la foi qui lui manquait : quelque chose lui arrive, enfin, pendant dix jours, et c'est beaucoup.

Une foi hésitante, rien à voir avec la religion, une foi en soi-même peut-être, en son pouvoir d'user des mots..

Il ne sait comment la nommer, mais la catastrophe annoncée a bien lieu.

La crue, littéralement, le fait croire à une fable, à une fiction, comme à une vérité « toute crue ».

Cette crue, il en réchappe : il est mûr pour d'autres rencontres, pas si anodines qu'elles en ont l'air, pour d'autres échanges, plus apaisés.

Et pour un livre peut-être…

CRUE est un livre –gigogne, plein de sens, d'apologues, de richesse. Pas toujours facile à lire- la dépression du début demande un coeur bien accroché. Mais un livre puissamment original, follement bien écrit, qui fait rêver , qui fait penser.

Un des meilleurs livres de cette rentrée 2016, pourtant assez riche en bonnes surprises, en ce qui me concerne.
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Un homme, récemment installé dans la banlieue de son enfance pour d'évasives raisons, se trouve confronté à d'étranges phénomènes de disparition : les proches s'en vont ; les populations changent ; les quartiers d'autrefois s'évanouissent ; la réalité qu'il a connue semble désespérément fuir. Serait-ce l'oeuvre du grand remplacement, ce thème cher à l'extrême droite, avec le soutien de quelque promoteurs immobiliers avides de nouvelles constructions ? A moins que ce ne soient les signes d'un processus plus implacable encore qui nous concerne tous en tout temps ?

Raconté à la première personne du singulier par un narrateur introverti à la personnalité volontairement neutre, le roman se compose essentiellement d'impressions philosophiques et d'une succession d'expériences amenant le héros à comprendre la logique sous-jacente aux phénomènes qu'il rencontre. L'apparition de deux personnages dans la seconde moitié du roman donne un cachet plutôt plaisant à l'intrigue qui n'est pas sans évoquer l'atmosphère étrange d'un film comme Vertigo - sa bande originale siérait plutôt bien à ce roman -, avec cette impression de vertige dont témoigne le narrateur, d'être juste à côté d'une vérité à l'allure d'abîme. Il est en effet beaucoup question de vérité et de vide dans ce roman : «  On veut que la vérité soit toujours à venir, qu'elle reste à découvrir. Non, depuis les origines, elle a été révélée aux hommes » indique le héros (p. 261 ), le rôle de ce roman est ainsi moins de dévoiler des vérités inédites et cachées que de donner au narrateur et au lecteur des expériences aptes à lui permettre de faire sienne une vérité toujours en train de se manifester, à porter un regard lucide, entre angoisse et allégresse, sur le monde et son banal et pourtant si implacable déroulement. Crue s'inscrit dans une longue tradition littéraire et artistique qui fait de la fiction un outil pour apprendre à voir les phénomènes autrement. Voir autrement, c'est sentir en quoi un événement singulier est témoignage d'un processus plus universel : c'est à cette condition que la boue et les gravats d'un chantier ou d'une catastrophe deviennent l'image d'une chair meurtrie et écorchée (p.46), mais qui dépouillée de sa peau de béton révèle la substance même de la réalité et de ses multiples possibilités. Le titre de l'ouvrage prend ainsi sens : la vérité est intimement liée à être à même de voir la réalité dans sa crudité, à deviner la tension permanente entre réalisation et effacement qui gouverne le monde, il en va aussi bien de la construction et la destruction des villes que des corps et des existences qu'ils soutiennent.
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Un grand roman de cette rentrée littéraire : "Crue", de Philippe Forest, aux éditions Gallimard.

Le pitch : Tel un fantôme revenu hanter la ville de son enfance, le narrateur n'y reconnaît pourtant rien, tant les travaux de rénovation et modernisation lui donnent un nouveau visage. de nature discrète et solitaire, ce dernier semble isolé et seul, comme entouré de spectres dans une maison hantée. Voyant les êtres qui l'entourent disparaître peu à peu, le narrateur se décide à nous livrer d'étranges révélations sur la mystérieuse épidémie qui semble toucher notre monde sans que personne ne s'en aperçoive…

C'est à l'occasion d'une opération « Masse Critique », organisée cet par Babelio et Gallimard, que j'ai eu la chance et l'immense plaisir de recevoir ce roman avant sa sortie prévue ce 18 août, me permettant ainsi de me découvrir cette plume bouleversante.

Plongeant son lecteur dans un climat fantastique et apocalyptique, empreint de silence et de mystère, l'auteur aborde ici avec une troublante profondeur la question de la disparition et de l'absence, sans oublier le sens qu'il faut trouver à la vie après de telles épreuves.
Dans un décor que l'auteur a su nous suggérer avec un immense talent, le lecteur est amené à suivre ce narrateur – dont nous ne connaîtrons jamais le noms – qui tente une reconstruction par un retour aux sources suite à un deuil particulièrement douloureux, pour envisager un nouveau départ. Mais l'atmosphère lugubre de cette ville déshumanisée, qu'il ne reconnaît plus et dans laquelle il va devoir survivre lorsqu'arrive le déluge, permet de bien vite réaliser que tout n'est pas si simple.
Soumis à une intense réflexion, le lecteur est rapidement tenté de penser que le narrateur se livre bien plutôt sur son parcours intérieur, celui de son âme, du deuil qui la frappe, du chagrin qui la submerge tel le déluge qui s'abat sur la ville, puis l'annonce de la décrue, symbole qu'il fait continuer à avancer, bon gré, mal gré.
Phrase clé de ce roman, « Est enim magnum chaos » (extraite du roman « Holy Terrors » d'Arthur Machen), qui sera traduite ici par « En vérité, il est un grand vide », résume finalement tout le propos de ce fabuleux roman. Car c'est bien de ce vide dont il est question, du vide que laissent les disparus pour ceux qui restent, du sens que ces derniers cherchent à lui donner et des mots qu'ils espèrent tant lui attribuer. Tout est finalement question d'interprétation, comme le souligne si bien ce narrateur, désoeuvré et malmené par la vie, auquel chacun peut tant s'identifier.
Servi en outre par une plume tout simplement magnifique et saisissante, le lecteur ne peut qu'être happé par ce roman particulièrement poignant.

En bref, un roman poignant, d'une rare éloquence, à découvrir sans hésiter en cette rentrée littéraire !
Lien : http://deslivresetmoi7.blogs..
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« Est enim magnum chaos » : le chaos, ou plutôt le vide, voilà ce que sont nos vies.
C'est une catastrophe, un scandale insurmontable.
Et depuis la mort de sa petite fille Philippe Forest écrit inlassablement sur cette absurdité. En variant les approches et les points de vue. Sans abandonner.
Les disparitions, minuscules ou majeures, sont, dit-il, la seule réalité tangible.
Et même on peut en douter et « il n'y a rien à ajouter au fond. »
Dans « le Chat de Schrödinger », la disparition d'un chat était au centre d'une méditation sur l'absence-présence.
Dans « Crue », l'expérience de la perte est poussée à son paroxysme, puisque c'est l'eau qui va envahir une ville que l'on croit identifier comme Paris. Mais en est-on certain ?

La Seine peut-être, un quartier « près de l'immense bibliothèque », en mutation, en travaux, une « cité fantôme », « spectrale », à proximité d'un « grand cimetière gris », voilà où revient habiter le narrateur qui signe ce récit présenté comme « un rapport à la première personne. »

Quel narrateur d'ailleurs ? Serait-ce « un écrivain un peu en vue », prêt lui-même à disparaître « si les choses tournent mal », un homme qui a perdu sa petite enfant et qui vient de voir sa mère mourir ? L'auteur lui-même ? Peu importe.
Et un rapport sur quoi ? Sur tous les signes qui annoncent que le monde va disparaître.
Un chat d'abord. Une mère. de vieux immeubles ravagés par un incendie. La voisine du rez-de-chaussée, pianiste et amante du narrateur. le voisin, philosophe un peu fou, féru de théories apocalyptiques et de whisky… le narrateur lui-même « étranger au monde. » Tous sont engloutis, happés par « un puits sans fond » avant que la ville elle-même ne soit submergée par les eaux.
Comme un jeu de dominos, une perte en entraînant une autre…
Perte du récit aussi, des repères narratifs, des codes, de la chronologie. « le passé semble se modifier au gré du présent, tirant de lui sa substance changeante. »
« J'en dis trop, je n'en dis pas assez » scande l'auteur.
Histoire, rapport, parabole (déluge et épidémie), roman policier (car enquête il y a), fable, science-fiction, métaphore géante et parfois convenue ? Un peu tout cela sans aucun doute et bien plus encore.
Et ce n'est pas un hasard si le dernier mot de la dernière page est « crue », du verbe « croire » cette fois…

C'est poignant, dramatique et poétique à la fois. Notre vie quoi. Multiple et si précaire.
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Voilà un étrange roman qui commence par agacer considérablement son lecteur en raison d'interminables atermoiements (du type : si vous saviez ce qui va se passer,, non, mais vous n'imaginez pas etc. : cela fait penser à un bateleur de rues qui voudrait appâter le chaland en lui promettant monts et merveilles). Au chapitre 5 l'histoire n'a toujours pas commencé. On a planté le décor : un immeuble un peu ancien dans un quartier en pleine mutation, du côté du périphérique et avec l'autoroute à proximité, une grande bibliothèque (on imagine Tolbiac ou Saint-Denis pour les Parisiens). Cela pourrait être n'importe où, là où le paysage urbain est en pleine mutation, entre chantiers et vieilleries.

L'auteur se perd longuement dans ses réflexions - souvent justes- sur nos fonctionnements minables (ces SDF qu'on déteste parce qu'ils nous renvoient à notre propre fragilité, voire à notre égoïsme irrécupérable ; ces vieillards-enfants qui geignent en appelant leur mère depuis leur lit d'hôpital, puis nous, badauds effrayés mais heureux de ne pas être concernés, lors de l'incendie d'un foyer pour migrants). Observateur sans pitié de nos petites médiocrités, il accumule les aphorismes à la manière d'un enfonceur de portes ouvertes pas drôle, bref, il est un brin pontifiant et ennuyeux, mais très incisif.

Pourtant,si on s'accroche, vers la page 80 commence l'histoire et, quoique un peu agacé, on finit par se laisser prendre au jeu et il devient difficile de lâcher le livre ! La thèse est que l'homme se débat au bord du vide, qu'un jour où l'autre, tout sombre, que la perte nous conduit au vide et à la folie. Il sait de quoi il parle : il est revenu dans cet immeuble où est morte son enfant de quatre ans et depuis, sa vie n'est qu'une longue descente vers le rien, vers le vide absolu. Soudain il peuple son récit de personnages fantomatiques, réels ou pas : une pianiste virtuose avec qui il fait l'amour, un homme avec lequel il parle interminablement chaque nuit. Et quand la police mène une enquête pour savoir la cause de la disparition de la pianiste, nous basculons dans une sorte de faux polar, sans victime, sans témoins, sans résolution, sans. C'est un peu la constante de ce roman : l'absence, le vide.

L'écriture est originale et intéressante, quasiment désincarnée, l'homme s'exprime sur un ton détaché (on imaginerait bien Meursault parler ainsi), apparemment sans affect. Vide, aussi.


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Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé. Telle pourrait être l'épigraphe de « Crue », le dernier roman de Philippe Forest, récemment paru chez Gallimard. Un peu plus de 260 pages dans la collection blanche, au fil desquelles le narrateur raconte l'étrange « épidémie » qui a frappé le monde, sans que personne ne la remarque vraiment.
De retour dans sa ville natale, le personnage principal s'installe dans un quartier sans âme, que la population a peu à peu déserté, et dont l'architecture est bouleversée par de grands travaux. Au sentiment de solitude qu'éprouve le narrateur, se mêlent alors d'anciennes blessures, au premier rang desquelles la perte de sa fille, plusieurs années auparavant. Les souvenirs surgissent, et dans le même temps s'amorce une série de bien étranges disparitions : d'abord un chat, puis un sans-abri… et tout s'emballe.
Métaphore introspective, journal d'un deuil qui ne se fait pas, « Crue » peut aussi être lu comme un roman uchronique, porté par la menace de la célèbre « crue centennale » qui pèse sur Paris. le titre, cinglant, en suggère d'ailleurs à lui seul l'hypothétique violence… à moins qu'il ne fasse référence à la vérité « crue » que l'auteur se propose de nous dévoiler ?
Avec son écriture fluide et sa plume sensible, Philippe Forest signe ici un beau roman sur la disparition de l'être cher, et sur les blessures ouvertes à jamais par une absence qui dépasse l'entendement.
Lien : https://littereves.wordpress..
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Un nouveau Forest, un Forest nouveau. Cette fois, comme à chaque fois à vrai dire, Philippe Forest change sa manière d'écrire un roman, comme s'il ne voulait pas se laisser enfermer dans un genre unique. Nous entrons dans un rêve cauchemardesque dans lequel le monde, s'enroulant sur lui-même, se met à tourbillonner et à s'engouffrer dans une gigantesque vidange, dans un trou noir qui aspire tout : ville, voitures, animaux domestiques, individus et nous entraîne vers le grand Rien où tout finit.

Pourtant, et un peu à son corps défendant, l'écrivain nous laisse entrevoir qu'il existe peut-être un autre versant de la réalité et que l'on peut pleurer pendant des heures au soleil retrouvé après de jours et des jours de pluie, d'angoisse et de presque désespoir. Tout est dans ce "presque". Il semble que Philippe Forest n'arrive pas à dire, mais ne peut heureusement s'empêcher d'évoquer comme possible, que tout n'est pas condamné à disparaître. En parlant de ceux qui ne sont plus, n'écrit-il pas : "Je me dis qu'un jour je les retrouverai. Je passerai du côté où ils se tiennent." ?

Bien sûr, comme dans tous ses livres, il revient sur la mort de sa petite fille, mais cette fois, dans un chapitre essentiel où l'homme mûr est placé à mi-distance entre la mort de son enfant il y a trente ans et celle de sa propre mère, de trente ans plus âgée que lui. Pathétique.

Les uns verront du morbide dans ce roman ; j'y vois un exercice quasi poétique, celui de la description d'une ville en perpétuelle construction dans laquelle des êtres se croisent, s'aiment puis disparaissent dans le cadre apocalyptique d'une inondation catastrophique suivie de la réapparition symbolique d'un chat, retour annonciateur d'un autre retour possible : celui de ceux qui ont disparu et que nous avons aimés.
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Sentiment mitigé après cette lecture. Par instants, je suis emporté par la langue, par l'univers et à d'autres moments, le ton philosophique m'ennuie et je ne comprends pas bien où veut en venir l'auteur. Néanmoins, l'histoire est très tenu et je n'ai pas abandonné donc c'est que l'auteur réussit à insuffler un certain rythme.
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Philippe Forest a beaucoup écrit sur le Japon, où il a vécu. Mais son dernier roman se passe en Europe, dans une ville jamais nommée, qui ressemble à Paris, et dans un futur proche. La spéculation immobilière Philippe Forest a perdu sa fille, à 4 ans, d'un cancer. Ce deuil est au coeur de son oeuvre, c'est le thème même de son premier roman, L'Enfant éternel, et on le retrouve dans celui-ci, où le narrateur a comme lui vu mourir son enfant. Ce narrateur revient s'installer dans la ville où il a vécu et dès le début du récit, un climat étrange s'installe, à la lisière du roman d'anticipation, dans une ville désertée et marquée par des disparitions, qui semblent d'abord anodines – celle d'un chat par exemple – mais qui seront vues après coup comme les signes avant-coureurs de la catastrophe à venir. le narrateur met en garde : il se doute qu'il ne sera pas cru et qu'on lira son récit comme une fable. D'ailleurs lui même s'interroge « J'étais fou, certainement. Mais il n'y a rien de plus commun que la folie ». Et le « crue » du titre peut être interprété dans toute sa polysémie : participe du verbe croire, montée des eaux – catastrophe annoncée – vérité crue, nue. Philippe Forest installe d'emblée une atmosphère très énigmatique et troublante où les temps se mêlent. « Rien n'est plus irréel que la réalité elle-même », rêve ou cauchemar éveillé. « L'épanchement du songe dans la vie réelle ». L'écoulement du temps, la disparition, la mémoire, la solitude sont au coeur de ce récit poignant et d'une extrême nostalgie.

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Le narrateur a assisté à une catastrophe : tout est dans le titre mais rien ne le prouve. Dans un récit rythmé, Forest instille des éléments de doute et de mystère qui transforment son histoire en quasi enquête. A travers un quartier de Paris (ou pas, difficile à décider), c'est la société occidentale qui est mise à mal avec sa logique du profit insatiable; le ciel doit bien se venger. Pour le héros, c'est une double rencontre qui va jeter le mystère sur la crue et ses origines et malmener le récit qui se détruit à mesure qu'il avance, ou plutôt qui disparait pour mieux émerger plus tard.
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