Sur le quatrième de couverture, on peut, entre autre, lire "Styliste exigeant, Bastien Fournier tente le pari de marier l'écriture poétique et la trame policière". Et bien, force est de constater, que le pari est magistralement gagné.
L'écriture est précise, ciselée, elle vous emporte dans un tourbillon d'émotions distillées de main de maître au gré de chapitres courts, qui s'enchaînent à un rythme soutenu et qui nous tient tout du long, un vrai régal.
Quand à l'histoire, elle relate l'assassinat d'un politicien connu, dont la ressemblance avec un personnage réel n'est certainement pas fortuite et ajoute du piquant au texte. La trame se tient, serrée autour de l'inspecteur, personnage principal de cet ouvrage. On suit l'enquête de loin car il s'avère vite que l'essentiel du bouquin ne se situe pas là, mais bien plutôt dans l'ambiance, dans l'atmosphère qui se dégage du tout. Une lecture enivrante dont je suis ressorti un peu groggy.
Une fois la dernière page tournée, un seul regret, l'ouvrage est court, beaucoup trop court... J'aurai aimé prolonger mon face à face avec Armand Fauchère, le personnage principal, inspecteur, encore un bout de temps...
Donc s'il y a un livre qu'il faut absolument retenir de la cuvée 2014 c'est bien celui-ci.
Ouvrage reçu dans le cadre d'un Masse Critique, je remercie chaleureusement les éditions de L'Aire et Babelio pour cette magnifique découverte !
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Un politicien ou plutôt le politicien d'extrême-droite a été retrouvé assassinat devant sa télévision. Nous sommes... en Suisse, de nos jours. "... À part son talent d'orateur, sa facilité de repartie et un sens de l'humour avéré, quoique puant, rien ne distinguait Rudolph Schumacher des démagogues en vogue de la scène européenne; ironie a l'encontre des revendications féministes, haine des étrangers, dénigrement des intellectuels et des élites, simplification du discours, positionnement victimaire, théorie du complot, maquillage des chiffres, fréquents recours au mensonge, plaintes continuelles, attaques personnelles et adoration de soi-même émaillaient ses interventions. Une utilisation performante des moyens de communication lui conférait une omniprésence médiatique..."
L'inspecteur Armand Fauchère mène l'enquête. "...Et Fauchère conduisit son véhicule bringuebalant, claquant et cahotant de partout... Et Fauchère pestait, jurait, renâclait dans l'idiome charretier auquel sa mère, de guerre lasse, avait à la fin de son adolescence cessé de vouloir qu'il renonce..."
Des chapitres courts où les personnages se croisent et une écriture sobre, sont les ingrédients de ce roman. La lecture est rapide et efficace, pas de violence, ni dans le langage, ni dans le tableau.
À mon avis c'est un bon polar, à découvrir.
Je remercie Masse Critique et les éditions de L'Aire pour cet envoie.
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Imaginez, je vous prie, une vallée encaissée, large de trois ou quatre km, enserrée de part et d'autre par deux barrières de montagne haute de trois à quatre mille mètres, traversée d'un bout à l'autre par un fleuve au cours contraint dans deux digues parallèles et comparables à la grande arrête d'un poisson. Imaginez que cette plaine, creusée jadis par un glacier, forme au deux tiers de sa longueur un coude à angle aigu et continue en s'ouvrant sur une plaine plus vaste et un lac où plonge le fleuve. Si vous remontez son lit, vous le verrez s'étrécir, se changer en torrent, être enfin sauvage et, là où le sol monte vers le cirque montagneux où il prend sa source, imaginez son filet d'eau claire heurté sur les pierres à travers les prairies où paissent vaches et moutons. Songez que de cette plaine on ne s'extrait, à l'est, que par un col difficilement praticable, et à l'ouest par un défilé où passe une mauvaise route coincée entre falaise et fleuve. Des tunnels ont été creusés pour faciliter la sortie; des deux côtés, on ne la quitte ainsi qu'après être passé dans un boyau de roche qui accentue l'impression d'être parti d'un monde pour en gagner un autre.
(p. 9)
Il fallait tout reprendre à zero, tout refaire, tout nettoyer pour commencer une nouvelle enquête. Rudolph Schumacher était un homme politique, certes, et chargé d'ennemis comme les arbres sont chargés de fruits. Cent mille personnes avaient de bons mobiles pour assassiner cette ordure. Mais qu'était-il comme époux, comme frère, comme amant? Avant d'être un homme politique, il était homme, comme Armand Fauchère était homme avant d'être un flic. Sans doute Schumacher possédait-il ses mystères, ses zones d'ombre, ses secrets. Ces secrets, il était temps de les percer...
Peut-être qu'on ne devrait pas défendre la loi, inspecteur; peut-être qu'on devrait défendre la justice. Ce n'est pas exactement la même chose.
Elle fatigua la salade...
Payot - Marque Page - Bastien Fournier - Le cri de Riehmers Hofgarten