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EAN : 9782020063586
442 pages
Seuil (01/02/1983)
4.5/5   11 notes
Résumé :
Dans Le vent noir, Luc est attaché à son passé : Edith l'a quitté et entre eux demeure une incompréhension radicale. Il parcourt les rues de Paris en cherchant le mot qui pourrait le libérer des images qui le hantent, une improbable rencontre qui permettrait de régler ses comptes avec l'absente. Il suit aussi Marcelle, celle
qui a succédé à Edith auprès de Madame Monge.
Les personnages se succèdent et se côtoient sans se comprendre et le roman cir... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Je ne m'aventurerai pas à critiquer ce roman, qui mériterait une place de choix dans la littérature française; pour faire simple, c'est l'histoire d'un homme qui s'obsède peu à peu pour une femme qui n'est pas très réceptive à ses charmes; il se montre d'abord prévenant, mais cela tourne vite à l'excès. L'écriture est tortueuse, torturée, l'écrivain étant visiblement hanté par la question de la séparation, de la solitude inhérente à l'être humain. On ne comprend pas tout, et c'est le but de l'auteur qui préfère évoquer les choses de façon indirecte, détournée, à travers un narrateur qui s'enfonce dans l'esprit des personnages entraînés par leurs tourments.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Est-ce que je n'étais pas en train de me disqualifier? Je me le demandais parfois avec désespoir craignant de trouver un jour devant moi quelque juge à la face terrible, connaissant l'emploi que j'avais fait des minutes de mon existence depuis trois ans. Qu'aurais-je pu répondre ? J'avais commencé un livre pour me justifier et ne l'avais pas terminé. J'avais tendu mes efforts, mes espoirs vers Marcelle, c'est-à-dire vers cette minute de paix que je cherchais parmi les détours de son caractère et du mien, à travers un labyrinthe d'événements obscurs. J'avais cherché Marcelle à tous les carrefours, dans tous les cafés, sur toutes les avenues; j'étais prêt à la chercher dans toutes les villes, afin d'obtenir d'elle, fût-ce par la violence, cet instant d'harmonie qui devait être le signe, le point de départ pour moi d'une vie nouvelle. Oui, je savais maintenant ce que je cherchais sur la terre; je cherchais la Réconciliation. Ces hommes qui jouaient à la belote ne savaient pas pourquoi ils étaient sur la terre. Il fallait que je fusse bien déprimé pour avoir eu un instant l'idée de me comparer à eux. Les voyant, je me sentais relevé vis-à-vis de moi-même. Je le sentais d'abord à la colère que me faisait éprouver leur vue. Ces hommes étaient morts, moi je vivais. Je n'avais pas besoin de chercher comme eux à « tuer le temps». Ah, non! mais c'était le temps qui me tuait, et cela me faisait sentir ma vie davantage. Je vivais. J'avais une vie misérable, mais je vivais. Mon cœur à l'intérieur de moi était tout rouge. Quoi qu'il pût advenir, j'aurais goûté la vie, j'aurais humé sur mes lèvres cette saveur de vase et de sang; même au plus fort de mon dégoût, j'aurais connu les ivresses de la conscience. J'étais conscient même de mes hontes. Je sentais une gêne en moi du côté de Marcelle. Je voulais supprimer cette gêne, et c'était par là que je sentais ma dépendance. Rien ne pouvait faire que je comme fusse si cela, cette gêne, ce souci, comme si Marcelle n'avaient pas été. Je pouvais bien (si les choses impossibles sont de notre ressort) décider, par un décret de ma volonté, l'inexistence, la suppression de Marcelle. Ma conscience me disait que Marcelle existait, qu'on ne supprimait pas Marcelle. J'avais beau me dire que Marcelle n'était pas le véritable objet de ma poursuite, que Marcelle n'était là qu'à la place d'une autre, qui n'était là elle-même que pour autre chose, cela ne la supprimait pas. Décider, par un effort de ma volonté, que Marcelle n'existait pas, c'était me condamner à penser à Marcelle, c'était entériner son existence. Il n'y avait qu'un moyen de supprimer Marcelle, c'était de la faire exister plus fort, de lui donner ma vie. Ou si elle ne voulait pas de ma vie, c'était de vivre une heure, une minute parfaite avec elle; c'était de me rapprocher d'elle, ne fût-ce que pour une heure, une minute, mais assez fort pour qu'il n'y eût plus aucun vide à combler entre nous. C'était cela que je voulais. Il fallait abolir, pendant une heure, tout ce qui nous avait séparés, éloigner de nous toutes les pensées qui ne nous étaient pas communes, afin de réaliser une union sans défaut, d'offrir une fois au monde, avant son engloutissement, un exemple lumineux, de quoi le faire rougir de sa folie : comme si sa folie et la nôtre n'étaient pas la même folie, ne procédaient pas du même foyer allumé à l'aube des temps... Tels étaient l'image, le désir, qui m'avaient guidé jusqu'à Cette ville, qui m'avaient conduit de la rue Boulard à ces rues tristes et inconnues où j'attendais Marcelle. Une heure de ce bonheur, mettons une journée (qu'est-ce qu'une journée ?) mettons une nuit et je tenais Marcelle quitte pour toujours. J'étais sincère, affreusement sincère et affreusement décidé décidé à obtenir, par tous les moyens, cette heure parfaite, qui devait faire de moi un homme libre. J'imaginais la chambre lointaine et sans attache avec la terre où, au plus profond de la nuit, je tiendrais pour une fois le corps et l'âme de Marcelle entre mes bras où je tiendrais pour une fois les yeux de Marcelle sous mes yeux. Je m'en irais content avec cela, j'étais prêt à le jurer; après cela l'univers pourrait se remettre à exister sans Marcelle.
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Il comprit alors que la perte, ou plutôt la disparition de Marcelle avait transformé sa vie; en même temps que cet événement le désespérait, il lui inspirait une sorte d'énergie à rebours. Il ne serait jamais le mari de Marcelle, peut-être même jamais son amant d'une heure, il ne luttait plus pour cela. Il luttait avec un terrible entêtement, avec l'énergie du naufragé, pour une heure de paix avec elle. Une grande patience, une patience implacable lui était venue. Il ne se disait pas qu'il aurait dû avoir honte. La honte disparaissait sous la poussée d'un sentiment plus fort. Les autres l'ignoraient, le piétinaient; il était sous leurs mains, comme un insecte. Seul, au fond de son cœur, il savait ce que, sous l'apparence de gestes démesurés, il demandait réellement à cette femme; c'était une chose dont personne n'aurait pu avoir le courage de rire. Mais ici, les mots ne suffisaient plus. Et déjà dans son grand désir, dans sa lutte contre ce monde fermé, au fond de la plus amère privation, il trouvait ce qu'il n'avait jamais trouvé, ce que Marcelle elle-même n'aurait pu lui donner à ce degré la sensation d'une mystérieuse présence. Et il lui semblait par moments qu'il la volait, et qu'à son insu même il lui retirait un peu de sa vie, pour lui en donner une autre que ni elle ni lui n'avaient voulue.
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Arrivé à ce moment de son histoire, l’homme se rend compte que, par l’abandon de cette femme, quelque chose d’essentiel a été rompu dans sa vie, que ses relations avec les êtres, avec l’univers, avec lui- même, en sont à jamais altérées. En l’abandonnant, cette femme a pris une décision dont il... mettons, s’exagère l’importance, car il la sent peser sur lui comme une condamnation. Oui, voilà : il interprète sa rupture, son échec, comme une condamnation. Il a été condamné, et le reste. C’est un condamné à vie, pour lequel il n’y a pas de rémission. Il tremble sous cet arrêt qui le sépare du monde, de lui-même : il a perdu son unité. Il lui semble que cette condamnation doit se lire sur son visage, qu’il est dans l’univers comme une espèce de rebut... Vous comprenez ? Il sent qu’il n’y aura pas de vie possible pour lui tant qu’il restera dans cet état de divorce avec lui-même, avec tout ce qui l’entoure, tant qu’il ne sera pas «réconcilié», vous comprenez ?
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Vidéo de Paul Gadenne
Marie, photographe, lit "Baleine" de Paul Gadenne (Éditions Actes Sud, 2005) Dans le cadre de "A vous de lire !" © Des auteurs aux lecteurs, 2010
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