LE BONHEUR NE SERAIT-IL QU’UN GOÛT DE CAFÉ BRÛLANT ?
Dimanche matin
Extrait 2
Il [David] se lève et Félix saute du lit derrière lui. La maison est froide, d'un froid qui aiguise son excitation. Pendant que le chat mange avidement et que le café se prépare, il allume un grand feu dans la cheminée du salon. La maison lui appartient, comme la veille au soir. Assommée par l'alcool, Lucie dormira sans doute la plus grande partie de la journée. Il goûte son absence et se détend, délivré de l'inquiétude habituelle. C'est comme s'il l'avait mise entre parenthèses. Il parle tout haut à Félix, « Tu vois, on ne possède les autres que quand ils ne sont plus là et qu'ils ne peuvent plus modifier l'image que nous voulons conserver. »
L'odeur du café emplit la cuisine et le salon. Il déjeune devant le feu. « Le bonheur ne serait-il qu'un goût de café brûlant, une journée, une vie béantes devant soi ? »
LE BONHEUR NE SERAIT-IL QU’UN GOÛT DE CAFÉ BRÛLANT ?
Dimanche matin
Extrait 1
La neige est tombée toute la nuit. Il est déjà tard quand David se réveille. Félix s'étire en même temps que lui. Dehors tout est blanc. Le soleil n'a pas encore eu le temps de faire fondre la couche épaisse qui recouvre les arbres et le paysage a perdu les arêtes vives de la veille, lorsqu'il était pris dans le givre. Il est paisible. Les lignes des haies, les bosses du pré se sont atténuées et fondues dans la blancheur. Toute aspérité s'est effacée. David espère que c'est la page vierge où va s'inscrire une autre histoire. Il ne sait ce qu'elle sera, aucun désir n'en dessine les contours, mais il attend avec confiance. La fébrilité qu'il a toujours ressentie devant la neige est cette fois impatience devant le pressentiment d'une vie nouvelle.