Massaba....
Tu étais palais majestueux, tu étais cité prospère, bâtie de pierres et d'or...
Tu étais mère des mères, l'âme des rois des terres d'Afrique, matriarche et perle d'un royaume dont les villes et villages s'étendaient jusqu'aux confins du monde, là où nul n'avait encore jamais battu poussière, là où seuls l'océan et les ténèbres subsistaient...
De mémoire d'homme, le monde n'avait jamais été aussi grand depuis toi.
Tu étais la fierté de ton roi, Tsongor, qui pris les armes et mena campagne vingt ans durant, pour faire enfin de toi le coeur battant d'un royaume de paix, unifié, heureux et fidèle à son souverain...
Partout, aux quatre coins de cette contrée sans limites, des terre de sel jusqu'aux collines du Nord, des hautes murailles blanches et jardins suspendus de Saramine jusqu'à la forêt des baobabs hurleurs, de l'archipel des manguiers jusqu'aux plateaux rocailleux des terres du Centre, des dunes du vent et du fleuve Tanak jusqu'au royaume des rampants, partout, femmes, hommes et enfants honoraient ton fidèle bâtisseur comme le plus bon et le plus grand des rois que ta terre ancestrale n'ait jamais connu.
A
la mort du roi Tsongor, pourtant, le jour où ce dernier devait marier Samilia, son unique fille, tes murs se mirent à trembler.
Rivalité, traîtrise, colère, violence et désolation devinrent les mamelles nourricières de ta chair auxquelles l'amour et les liens du sang n'auront pu survivre.
Les armes se levèrent, les clans se formèrent, déchirant cette descendance que Tsongor rêvait tant de voir s'unir le jour de son passage vers le royaume des morts.
Massaba, tu devins ville de sang, de cendres et de poussière, dévastée et meurtrie sous le fer des lances, les charges des chevaux et les feux qui te consumèrent jusqu'aux marches du tombeau de ton roi.
Le passage de Tsongor vers l'au-delà aura un prix, celui d'une simple piécette à payer lors du grand voyage. Mais ce prix sera élevé.
Tsongor le glorieux, le bâtisseur et l'explorateur, Tsongor le père et le sage mais aussi Tsongor le guerrier et le sauvage... Tsongor aux sept facettes confiera, avant de mourir, son repos éternel et la destinée de sa lignée à Souba, son plus jeune fils.
C'est à une longue marche rédemptrice qu'il le condamnera en son nom. Souba n'aura alors de cesse, dans son exil, de chercher réponse à cette solitude, pour vaincre la malédiction de ses aïeuls, laver de la honte qui l'imprègne son nom à l'eau du Savoir, et honorer le souvenir de Samilia, pour qui les hommes déchaînèrent les enfers.
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Avec
La mort du roi Tsongor,
Laurent Gaudé nous emmène aux origines du monde, en terre d'Afrique. Il y développe déjà des thèmes qu'il reprendra deux ans plus tard dans
le soleil des Scorta : réflexion sur la nature humaine, malédiction familiale, exil...
Sa plume m'est toutefois apparue ici moins précise et avec un sentiment d'immersion moins intense que celui qui m'avait habité pour
le soleil des Scorta.
Ce roman n'en demeure pas moins un très bon Gaudé, où le thème amoureux abordé ne fut pas sans me rappeler celui de la guerre de Troie, où Pâris et Menélas se livrèrent bataille pour la main de la belle Hélène.
A défaut de m'avoir procuré de grandes émotions, l'histoire abordée et le style Gaudé valent pour moi leurs quatre étoiles.