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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Laurent Genefort est, depuis une trentaine d'années, un auteur prolifique de science-fiction et de fantasy.
A la suite de sa première publication en 1988, le Bal des Ténèbres chez Fleuve Noir, il explore les différents genres des romans sfff en littérature adulte et jeunesse.
Auteur d'une thèse sur les livres univers dans la SF, il a également reçu de nombreux prix littéraires pour ses publications (prix de l'imaginaire et Rosny entre autres)
Dans son dernier roman, Les Temps Ultramodernes, il explore le rétrofuturisme avec ses références au passé et de nombreux éléments futuristes .

Paris 1924. La cavorite a changé le visage de la révolution industrielle. Grâce à ce matériau permettant de déjouer la gravité, les voitures et tramway volent, les immeubles grattent le ciel et des aéronefs permettent de se rendre sur Mars, planète en pleine colonisation. Mais le rêve prospère se fissure lorsque Marie Curie découvre que les effets de la cavorite sont temporaires. L'économie s'effondre et le bilan social est désastreux. C'est dans ce contexte particulier que Renée, une jeune institutrice en quête d'une nouvelle affectation depuis la fermeture de sa classe et la désertification rurale, débarque sur Paris.

Récit :
Roman choral uchronique à l'ancrage historique bien daté, Les Temps Ultramodernes décrit les années 20 et les remous politiques et économiques de cette époque. On retrouve entre autres les noms les plus célèbres des scientifiques, la politique économique et le climat de sortie de guerre.
C'est également un roman ambitieux qui explore l'histoire à travers les événements marquants de l'époque, la science par l'explication du fonctionnement de la cavorite, la société par les conséquences du progrès et des avancées technologiques et le colonialisme par l'exploitation des ressources martiennes et le devenir du peuple primitif qui l'habite.
Le point de vue des différents personnages, tous plus ou moins liés à une enquête criminelle sur un trafic de cavorite, nous offre une exploration précise de l'époque.

Coté scientifique :
L'auteur emprunte à H. G Wells son invention du cavorium pour son roman.
La cavorite découverte par Marie Curie et sur laquelle d'autres scientifiques de l'époque travaillent également, a donné naissance à une nouvelle physique dans laquelle la gravité est une force nucléaire. La cavorite, en se désintégrant, génère de l'antigravité (invention physique de l'auteur)
La cavorite, en tant qu'élément chimique, doit être traitée et alliée à d'autres matériaux pour être exploitable. Ainsi, le plomb permet d'orienter l'antigravité et de faire naviguer des bateaux ou des voitures dans les airs.
Les conséquences économiques, matérielles et culturelles de cette découverte sur le monde nous sont introduites par des articles de presse qui s'insèrent entre les chapitres.
La France, notamment, règne en maître sur ce matériau et se trouve économiquement et politiquement puissante.
L'exploitation de la cavorite permet de construire des immeubles équivalent à nos gratte-ciel modernes, aux voitures de voler, et des paquebots entiers effectuent la liaison Terre-Mars, charriant sans cesse de nouveaux colons pour la planète rouge.


Une société à deux vitesses :
L'arrivée de la cavorite a entraîné des répercussions sur toute la société en modifiant les métiers, la façon de concevoir les déplacements ainsi que les villes.
La bourgeoisie et l'aristocratie se partagent les « cieux » tandis que la classe ouvrière vit au sol.
La bourgeoisie méprisent les ouvriers et les conditions de vie de ces derniers sont bien représentées.
Sans être misérables, ils ne bénéficient pas de l'ensemble des bienfaits que la cavorite a apporté.
L'auteur nous décrit une nouvelle révolution industrielle avec des bons et des mauvais côtés.
Les progrès permis par la cavorite dépeignent une société où les plus riches possèdent des voitures volantes et tutoient les cieux depuis leur balcon tandis que les plus défavorisés bénéficient des miettes. L'auteur illustre son propos, par exemple, avec les déchets jetés depuis les voitures volantes sur la tête des gens au sol.

Un contexte de raréfaction :
Le roman s'ouvre en 1924 dans un contexte de raréfaction de ce matériau.
De plus, Marie Curie a découvert que le cavorium étant un élément radioactif, une fois tous ses atomes désintégrés, la cavoradiance disparaît à jamais, posant le principe d'une durée de vie limitée à une quinzaine d'années.
Dès lors, la technologie révolutionnaire connaît de nombreux dysfonctionnements. A Paris, le magasin Bonmarché, qui supporte un nombre impressionnant d'étages, s'effondre car construit avec du cavorium, ainsi que plusieurs résidences privées. D'autre incidents du même type nous sont relatés par le biais d'articles de journaux entre les chapitres du roman.
C'est toute l'économie qui est frappée par ricochet jusqu'à ce qu'un crack boursier survienne, un certain vendredi noir.
La découverte d'un trafic clandestin de cavorium d'origine inconnue soulève donc de nombreuses interrogations chez Maurice, un commissaire de police.

Roman social :
Le crack boursier a certes entraîné la ruine de puissants marchands mais ses répercussions sont arrivées jusque chez les classes moins aisées.
Lorsque Marcel, un jeune peintre-apprenti, débarque à Paris, il rencontre un groupe d'anarchistes qui rêvent d'une révolution sociale. A travers son regard d'artiste, c'est également toute l'époque art-moderne qui nous est décrite. Les retrouvailles avec la femme qu'il aime et anarchiste convaincue l'entraînent dans les mouvements révolutionnaires gauchistes.
Les différents personnages sont conformes au modèle de l'époque.

Exode rural à destination de Mars :
L'exode rural qui a accompagné les progrès technologiques s'effectue non vers les villes mais vers Mars. Les habitants des campagnes deviennent des colons sur la planète rouge où la main d'oeuvre bon marché est recherchée. Mars est une planète riche en ressources, parfaitement habitable pour l'homme avec un écosystème adapté.
Les Erloors, sorte d'humanoïdes croisés avec une chauve-souris, sont un peuple primitif natif de la planète Mars. Bien que capables de communiquer avec les humains, les Erloors sont les victimes de la colonisation et d'une forme de ségrégation. Un fort sentiment de rejet est développé parmi les colons tandis que sur Terre, des spécimens sont exhibés dans des zoos et deviennent une attraction exotique. Dans la deuxième moitié du roman, ils seront victimes d'exploitation de la plus affreuse façon.
L'auteur s'est inspiré pour le nom et les caractéristique de l'espèce du roman « Le Prisonnier de Mars » de Gustave le Rouge.
A Paris, la jeune institutrice Renée tombe nez-à-nez avec Ogloor, un représentant de cette espèce, qui s'est enfui du zoo où il était parqué. Elle le cache et décide de l'instruire comme si c'était un de ses élèves. Leur relation permet à l'auteur de développer tout un pan d'histoire et de culture pour ce peuple extra-terrestre.

Conclusion :
Laurent Genefort livre un récit ambitieux qui rend hommage aux auteurs de science-fiction des années 50.
J'ai beaucoup aimé ma lecture.
Enfin, l'objet livre est de toute beauté avec la magnifique couverture de Didier Graffet sous forme d'affiche rétrofuturiste art-déco.
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« La nécessité d'en savoir plus sur la cavorite devenait urgente. Sa première impulsion fut de composer le 12 sur le cadran du téléphone, et de demander le numéro de l'Institut du Cavorisme. le centre, fondé par les époux Curie, s'était donné pour mission d'étudier la cavorite sous ses aspects purement scientifiques. À l'autre bout du fil, l'un des étudiants des Curie répondit. Aux questions de Maurice, la voix juvénile usa d'un jargon qui acheva de noyer le policier dans le brouillard. « Antigravitescence », « radiations kappa », « cavorurgie »… le moindre terme le faisait achopper. »

Pas la moindre Porte de Vangk à se mettre sous la dent dans ce nouveau roman de Laurent Genefort, une uchronie « steampunk » à la française. Mais pour autant les voyages spatiaux n'en sont pas totalement absents, car des colonies ont été fondées sur Mars, au détriment des autochtones, les Erloors. Il faut dire que leur apparence ne plaide pas en leur faveur. Et qu'ils se nourrissent du sang des animaux locaux.

La cavorite, découverte à la fin du 19ème siècle, a permis ces voyages. Elle a pour effet d'annuler la gravité. Mais voilà que ce minerai, que l'on pensait inusable, se révèle avoir une durée de vie beaucoup plus courte que prévue. Des crises économiques se produisent en réaction à sa raréfaction. Les pouvoirs publics et les services secrets font tout pour trouver de nouvelles sources d'approvisionnement.

Dans ces temps troublés, nous suivrons en alternance quelques personnages bien trempés. A commencer par Renée Manadier, institutrice licenciée de son poste à la campagne. Elle ira sur Mars pour y enseigner. Marthe Antin est une scientifique qui est aussi journaliste. Elle sera mêlée à bien des événements et en enquêtant mettra sa vie en danger. Je place au premier plan ces personnages de femmes tenaces car ils m'ont paru être les plus convaincants.

Mais nous suivrons aussi Georges Moinel, un jeune homme qui se dit artiste et qui deviendra anarchiste, Maurice Peretti, un commissaire de police, Marcel Chery, un docteur plus proche de Mengele que de Schweitzer. Sans oublier Aknood, un erloor.

Ce roman est plaisant à lire et les aventures s'enchaînent sans temps morts, ou presque. « Qui trop embrasse, mal étreint » dit-on parfois mais grâce ses inventions ébouriffantes je pardonne volontiers à l'auteur quelques longueurs. Et je suis prêt à lire la suite, s'il y en a une, car ce roman se suffit à lui-même.
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Embarquement pour un voyage imaginaire futuriste vers le passé. Un temps où les bateaux volaient, où Paris accueillait cinq tours Eiffel, et où les martiens étaient présentés au public dans des cages. Bienvenue dans cette uchronie rétrofuturiste, qui réinvente un passé qui n'est pas tout à fait le nôtre, en nous plongeant dans l'ambiance des années 20. Juste après le Krach boursier de 1923, dû à l'effondrement de la cavorite.

La cavorite, kesako ? C'est un métal découvert au début de ce XXème siècle-là, et qui a fait virer le monde entier de bord. Grace à lui, tout objet, tout véhicule peut se jouer de la gravité, et permettre de voyager vite et loin. Par les airs, et même dans l'espace jusqu'à Mars. Sauf que ces propriétés extraordinaires ont une durée de vie limitée…

Les temps ultramodernes est avant tout un vibrant hommage à la littérature de science-fiction de la fin du 19ème et du début du 20ème siècle. Cette cavorite a été inventée par H.G. Wells dans son roman sorti en 1901, Les Premiers Hommes dans la Lune. Laurent Genefort lui témoigne son respect autant qu'il développe son propre imaginaire, fruit d'un projet qu'il mûrit depuis 15 ans.

C'est une véritable aventure à laquelle nous convie l'auteur, à travers une folle imagination, et qui pourtant garde aussi les pieds sur terre. Je m'explique : tout à été pensé, pesé dans ce récit pour que l'irréel ait le goût du réel, même quand les idées sont les plus insensées.

L'intrigue se veut distrayante, au plus près des personnages, mais l'écrivain développe également avec force détails les aspects politiques, économiques et sociaux dans un tel monde chamboulé.

Cette époque alternative permet de pousser vers des réflexions sur ce que l'Homme fait des dons la nature. Sur son ambition démesurée à vouloir aller toujours plus haut, toujours plus loin, en laissant une majorité sur le carreau.

On y parle donc de lutte des classes, de géopolitique, de colonisation, de rejet de l'autre et des différences, de crimes à grande échelle, de la place des femmes, d'écologie…

Et de science, le tout à travers une enquête qui se veut divertissante et qui implique des protagonistes bien campés.

La balance se devait d'égaliser le tout. Elle est globalement à l'équilibre, même si j'ai trouvé l'aspect politique un petit peu trop présent à mon goût, ressenti tout personnel.

Laurent Genefort se veut avant tout conteur, mais ne lésine pas sur les détails pour distiller son histoire. Ces détails qui font toute la différence, qui font briller les yeux du lecteur, en faisant virevolter son imagination.

Il fallait oser parler de Mars, de sa végétation, de son atmosphère et de ses habitants, comme on pouvait les imaginer il y a plus de 100 ans. L'auteur arrive rapidement à faire adhérer le lecteur à son récit anachronique, au charme volontairement désuet. Ce n'est pas le moindre des exploits.

A l'image d'un autre clin d'oeil au roman le Prisonnier de la planète Mars de Gustave le Rouge (1908) et ses martiens ailés, digne représentant de la mouvance de la littérature merveilleuse-scientifique de l'époque.

Cette lecture dépaysement est l'occasion de décrire nombre de soubresauts de l'humanité, sans pour autant que l'auteur ne tombe dans un travers moralisateur. le récit est engagé politiquement, mais reste du vrai divertissement. Avec l'avantage de raconter à la manière du début du siècle dernier tout en ayant l'avantage du recul actuel.

Les temps ultramodernes est un plaisir d'une étonnante richesse. Laurent Genefort a peaufiné son décor pour le plus grand plaisir du lecteur. Étonnant.
Lien : https://gruznamur.com/2022/0..
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Roman choral uchronique à tendance steampunk ? Ok, ce n'est pas une appellation orthodoxe (ni certainement juste), mais je le sens comme cela.
Choral, ça je suis sûre. Chaque personnage est consacré à un personnage, qui nous donne donc sa part de l'histoire, qui se construit, se complète au fur et à mesure. le tout est plutôt réussi, chacun apportant un éclaircissement, un point de vue, avec parfois une temporalité différente, ce qui est loin d'être inintéressant. un bémol toutefois : je n'ai pas accroché au personnage de George, et n'ai pas bien compris son utilité.
Côté construction d'un univers, il y a beaucoup de travail qui est fourni ici. Tout part de la découverte d'une nouvelle matière (la cavorite) et donc d'un développement technologique (et politique) dû à sa propriété : matière capable de lever la contrainte de la gravité, et donc de soulever, élever, faire voler. Les hommes (et plus particulièrement les français) ont donc conquis l'espace, et mars en particulier. C'est l'aspect qui m'a le plus convaincue. L'univers est bien construit, dans le détail, avec ce savant mélange d'années 30 et d'avancées technologiques, de montée du "nazisme" mais avec d'autres acteurs et d'autres victimes.
Là où j'ai moins accroché, c'est la fin, que j'ai trouvée très précipitée. La résolution arrive en peu de page, sans profondeur, alors que le reste du roman prend son temps et plante un solide décor (défait en 2 temps 3 mouvements). Ah et le méchant un peu trop manichéen à mon goût. En réalité, le roman manque de nuances parfois dans l'opposition bien/mal.
Globalement, une bonne surprise, même si quelques réserves.
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À l'orée de l'année 2022, un nouveau roman de Laurent Genefort s'annonce avec un titre prometteur, et ce désormais chez les éditions Albin Michel Imaginaire : Les Temps ultramodernes !

Intrigues martiennes dans les années folles
19 novembre 1924, Renée Manadier et Georges Moinel se rencontrent dans un transport ferroviaire les emmenant vers Paris. L'une est institutrice, l'autre est artiste, tous deux ne savent pas trop à quoi s'attendre dans cette capitale qui les attire pour tant de raisons différentes. Or, il s'agit ni de 1924 de notre ligne temporelle, ni de la cité parisienne que nous connaissons. En effet, comme abordé dans l'Abrégé de cavorologie, le monde n'est pas le nôtre : c'est un monde cavorié, imprégné donc de cavorite, minerai radioactif qui permet de contrer la gravité. Les voitures s'envolent, le transport devient spatial et quantité d'objets du quotidien s'équipent de matériaux antigravitiques. Cette transformation de la société a eu des conséquences drastiques sur la science qui s'est concentrée sur la cavorite, sur l'organisation spatiale (par exemple, les tours Eiffel-Rousseau, sûrement une référence aux représentations du Douanier), sur la géopolitique (la France et l'Allemagne déclenchent une guerre en 1912), sur le vol spatial désormais possible et donc aussi sur la colonisation de la planète Mars par la puissance française. Or, deux événements viennent chambouler ce monde qui s'envolait pourtant si vite : la physicienne Marie Curie découvre que la durée de vie de la cavorite est bien plus limitée que prévu (il sera nécessaire de renouveler les stocks) et, en plus, le 11 mai 1923 survient le « vendredi noir » du krach boursier, quand les bourses financières chutent drastiquement, énième fin de cycle du capitalisme financier spéculateur, cette fois avec la bulle de la cavorite. Dans ce monde en plein changement mais qui craint sa fin accélérée, la colonisation martienne laisse entrevoir quelques espaces accessibles à l'innovation avec deux limites problématiques : jusqu'à quand les voyages aller-retour pourront-ils se tenir sans énergie pour les conduire ? et qui surveillent les agissements des puissants dans ces contrées lointaines ?

Conspirations, martiens et krach boursier
Dans la façon déjà de présenter l'ouvrage, on se rend vite compte qu'il est nécessaire de bien expliquer le contexte, l'univers, avant d'aller plus loin. Pourtant, des personnages intéressants, il y en a, et nombreux en plus. On a rapidement parlé de Renée Manadier, elle fait figure de première protagoniste, et joue le rôle d'ingénue pour nous faire découvrir non seulement la Paris cavoriée et industrieuse, mais aussi de nous faire côtoyer les indigènes martiens avec l'individu Ogloor au départ utilisé dans un zoo, mais qui cherche à rentrer chez lui. de son côté, on retrouve un peu plus loin l'artiste Georges Moinel, qui découvre les bas-fonds, les coups bas entre socialistes et anarchistes ; avec lui, c'est tout un pan du roman qui navigue un peu à part, qui trouve son lien avec tout le reste uniquement vers les derniers chapitres. Entre ces deux tendances, se trouve une vaste enquête policière et journalistique menée par le quasi-retraité commissaire Maurice Peretti et la têtue Marthe Antin pour découvrir d'où provient un stock clandestin de cavorite, apparemment cela aurait un lien avec Mars et certaines entreprises sur place. Enfin, Marcel Chery, médecin eugéniste déchu, est recruté par une société clandestine pour organiser un camp de travail efficace et ordonné… Un par un, ces personnages sont plutôt très bien développés, attachants même malgré le racisme, le sexisme ou le fascisme de certains (pas de panique, d'autres compensent) ; toutefois, la liaison entre toutes les parties du roman se fait véritablement à la toute fin au point qu'on aurait pu carrément croire à l'annonce d'un tome à suivre.

Rétrofuturismes
Pour une fois, Laurent Genefort mise sur un roman se fondant sur du rétrofuturisme, un surgissement d'une technologie avancée dans une période qui n'est pas censée le connaître pour l'instant. Ici, ces années folles ne s'appuient pas sur des machineries faites de cuivre et de vapeur, donc nous ne sommes pas nécessairement dans du steampunk, mais plutôt de l'atompunk, car l'instrument essentiel est le matériau radioactif appelé cavorite. En tout cas, le rapport de l'auteur à la science reste le même : capable du meilleur comme du pire. Les liens avec notre société sont assez aisés à faire, notamment sur le fait d'être dépendant à l'extrême d'une énergie miraculeuse mais tout à fait fossile. Les chercheurs de profits sont alors aux aguets, soit par spéculation classique, soit en tentant par tous les moyens de ralentir la transition désormais nécessaire en s'accrochant à des « alternatives » parfois complètement fantasques et pourtant bien réelles. Enfin, il est intéressant de remarquer que l'auteur utilise ces thématiques pour écrire ses propres Chroniques martiennes (Bradbury) ou son Cycle de Mars (Burroughs) et revenir à ce qu'il a davantage l'habitude de côtoyer dans ses autres romans de science-fiction de planet opera : les populations indigènes, leurs cultures et leur acclimatation à des changements violents de leur environnement. le parallèle réalisé entre cette invasion et l'expansionnisme européen en Afrique du milieu du XIXe au milieu du XXe siècle est là aussi bien trouvé.

Laurent Genefort se renouvelle donc assez bien avec ces Temps ultramodernes, il y propose un rétrofuturisme imparfait, parfois naïf (cependant n'est-ce pas les Années Folles ?) mais qui donne envie d'y retourner.

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Le gros point fort de ce roman, c'est le worlbuilding absolument excellent : l'univers est riche et complexe, entre parallèles sociétaux bien vus qui tapent là où ça fait mal et innombrables références plus ou moins obscures (j'en ai repéré quelques-unes et sans doute manqué beaucoup d'autres).

Par contre, la narration m'a parue très froide et distante. On a du mal à s'attacher aux personnages et à s'intéresser à leur sort, d'autant que les péripéties sont très survolées (sans mauvais jeu de mots) et la fin un peu expédiée. Cet effet, qui rappelle les canons narratifs du 20è siècle, semble parfaitement voulu par l'auteur et en accord avec l'époque qu'il met en scène : un exercice intéressant sur le plan intellectuel mais qui rend la lecture assez poussive. Sans surprise, les passages que j'ai préférés sont les articles qui approfondissent l'univers.

Bref, une lecture en demi-teinte: à lire pour la construction d'univers et l'aspect méta-narratif plutôt que pour l'intrigue ou les personnages.
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Les Temps Ultramodernes est un joli petit pavé de presque 500 pages qui nous emmène au début du XXème siècle mais pas celui que l'on connaît. Dans l'univers parallèle créé par l'auteur, la Cavorite, un nouvel élément chimique permettant de s'affranchir de la gravitation, a été découvert (Si vous voulez en savoir plus sur cet élément et ses applications, je ne peux que vous conseiller de lire L'abrégé de Cavorologie - disponible gratuitement en numérique). Mars est habitable, colonisée par l'Homme et peuplé par les Erloors, sous-considérés et exploités par l'espèce humaine. La France, pays phare de l'Europe, règne sur l'Empire de la Cavorite. Malheureusement l'âge d'or du précieux métal n'est plus, son efficacité est éprouvée sur le moyen terme et les nouveaux gisements se font rares, il faut trouver d'autres sources d'approvisionnement. Les tensions économico-industrielles se font sentir.

Comme à son habitude Laurent Genefort prend son temps pour poser et développer son univers. La première moitié du roman malgré un rythme assez lent n'est jamais ennuyeuse, la plume très visuelle de l'auteur faisant le reste. En quelques mots, quelques pages, nous voilà plongé au coeur d'un nouveau monde, découvrant avec émerveillement les us et coutumes, les transports ou encore la géopolitique. Rien n'est oublié, tout est millimétré, les petits détails font la différence et la rigueur est le maître mot.

Les chapitres courts qui alternent entre différents personnages, un artiste, une professeur, une journaliste, un commissaire de police…, chacun racontant un bout de vie, donnent du relief à l'univers et permettent de construire l'histoire. Pas besoin d'artifices, de cliffhangers incessants pour maintenir le suspense et tenir en haleine le lecteur, les faits s'enchaînent d'eux-mêmes, les révélations distillées à bon escient rendent la lecture addictive. Une certaine facilité dans l'avancée de l'intrigue et une résolution un peu trop rapide sont les seuls bémols du récit.

On ne pourra s'empêcher de faire des parallèles entre notre monde actuel et celui développé par Laurent Genefort : ressources qui s'épuisent, fascisme montant, racisme et sexisme exacerbés… toutes les horreurs et la violence des Hommes.

Avec Les Temps Ultramodernes, Laurent Genefort nous démontre encore une fois que l'on peut concilier une imagination débordante et une rigueur scientifique. Grâce à un worldbuilding exceptionnel, l'auteur nous délivre un roman aussi divertissant qu'intelligent, une uchronie de haute qualité, un plaisir de lecture.


Lien : https://les-lectures-du-maki..
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Que ce soit en musique ou en littérature, j'avoue avoir un faible pour l'univers steampunk et rétrofuturiste. Cela tombe bien, le premier titre à paraître en 2022 chez Albin Michel Imaginaire se réclame de cette mouvance. Il s'agit de Les Temps ultramodernes de Laurent Genefort. Dans ce livre, nous sommes à la fin de la période habituellement couverte par l'appellation steampunk, puisque l'action se situe dans les années 20 à Paris et sur Mars.
Dans Les Temps ultramodernes, le point de déviance par rapport à notre ligne temporelle se situe en 1895 par la découverte d'un certain Georges H. Cavor d'un élément, la cavorite, ayant la particularité d'émettre un rayonnement contrant la gravité terrestre. Depuis, toute une industrie a prospéré avec notamment des voitures volantes, et des paquebots spatiaux qui ont permis la conquête de Mars. Les grands empires coloniaux européens — à savoir l'Angleterre, l'Allemagne et la France — se battent pour qui étendra ses conquêtes dans le système solaire et qui s'appropriera les mines de cavorite. Las, les quantités disponibles arrivent à épuisement et les propriétés d'antigravité s'estompent plus vite que prévu. Après une guerre éclair en 1912, un krach boursier a exacerbé les tensions sociales et économiques dans la vieille Europe. C'est dans ce contexte que nous suivons plusieurs personnages : Renée, institutrice de province montée à Paris et prête à instruire tout le monde, « indigènes » martiens compris ; Georges, artiste fauché qui se laisse séduire par la violence politique ; Maurice, inspecteur de police proche de la retraite rêvant d'un dernier gros coup et Marthe, journaliste scientifique spécialiste de la cavorite. Leurs destins vont se mêler au sein d'une enquête qui les mènera des bas-fonds de Paris et de sa banlieue aux avant-postes coloniaux martiens.
Avec Les Temps ultramodernes, Laurent Genefort signe donc un roman d'aventures uchronique bourré de rebondissements tels les feuilletons qui paraissaient dans les quotidiens du début de ce siècle. Il se livre également à un exercice de style en empruntant le rythme et le ton de son livre à cesdits feuilletons, mais également aux romans de « merveilleux scientifiques » vivaces en ce début de XXe siècle, avec des clins d'oeil plus qu'appuyés tant à H.G.Wells qu'à Gustave le Rouge. Tout en y ajoutant une dimension sociale forte et une critique du colonialisme, de la spéculation capitaliste et de leurs travers modernes (même si celle-ci était déjà présente chez les autrices et auteurs anarchistes dès la fin du XIXe siècle). le tout forme un roman au style volontairement désuet, mais plein d'actions et aux personnages bien campés. Dommage d'avoir une résolution si rapide, après une mise en place soignée des différents pions en présence.
À noter qu'en complément du roman, l'auteur sous le pseudonyme d'Hippolyte Corégone commet un Abrégé de Cavorologie reprenant le format des vieux manuels scolaires de sciences. Celui-ci retrace l'histoire de ce minerai fictif, en détaille les propriétés et les différents usages possibles ainsi que son influence dans le monde de l'art. Cet abrégé est téléchargeable gratuitement et offre un bon complément à lire avant ou après Les Temps ultramodernes pour mieux en savourer certaines implications.
Lien : https://www.outrelivres.fr/l..
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Les Temps Ultramodernes de Laurent Genefort nous propose un patchwork d'existences qui formeront un tableau charmant et vivant dans un monde rétrofuturiste. le roman se lit avec plaisir et ne manque pas de faire penser à un texte d'un Jules Verne moderne. Il en emprunte avec bonheur le merveilleux scientifique sans tomber dans l'admiration béate alors que la trame dessine tôt des rebondissements qui sont au rendez-vous!

plus complet sur mon blog
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L'histoire se passe dans un Paris des années 20 qui est assez différent du nôtre depuis la découverte de la cavorite. Ce matériau aux propriétés étonnantes a notamment permis aux hommes de commencer la colonisation de mars.

Nous suivons ici plusieurs personnages qui vont se trouver mêlés malgré eux à des affaires douteuses en rapport avec la cavorite, et notamment l'existence d'une potentielle mine de cavorite clandestine…

Malgré un début un peu laborieux car assez lent et descriptif, j'ai vraiment passé un chouette moment de lecture avec ce roman. La plume fluide et le contexte très intéressant m'ont aidé à dépasser ces premiers chapitres un peu lents pour rentrer dans cette histoire passionnante.

Ce que j'ai particulièrement aimé, c'est qu'il m'a fallu pas mal de temps pour comprendre où on allait. Les différents points de vue étaient très prenants dans l'ensemble (à une exception près) mais il faut bien atteindre la moitié du roman pour vraiment comprendre comment ces différentes intrigues sont liées, ce que j'ai beaucoup apprécié.

A travers les différents personnages et en nous faisant découvrir la race des erloors, l'auteur nous parle beaucoup d'anthropocentrisme, de colonialisme et du mauvais traitement des autochtones, notamment lors de passages sur Mars. On assiste aussi parfois à des expériences assez choquantes sur ces sympathiques martiens qui ne sont pas sans rappeler des choses qui ont pu exister pendant de sombres périodes de l'histoire.

Ce livre est aussi un roman choral avec 5 ou 6 points de vue principaux qui, je le disais, m'ont beaucoup plus dans l'ensemble. J'ai beaucoup aimé les personnages féminins, des femmes très indépendantes et plutôt en avance sur leur époque. J'ai aussi aimé découvrir le personnage de Marcel qui, s'il n'est pas du tout sympathique, est intéressant à suivre de par son éthique plus que douteuse et sa morale inexistante. En revanche, je suis complètement passé à côté du personnage de Georges, que j'ai trouvé franchement inintéressant, et dont les péripéties semblaient assez superflues car un peu à part de l'intrigue principale et pas vraiment utiles d'une manière générale.

Je parlais au début de l'aspect assez descriptif du roman mais, paradoxalement, j'ai parfois trouvé qu'on manquait de détails sur certaines choses comme la géographie de Mars ou même sur le mode de vie des erloors. J'ai trouvé ça un peu dommage même si ça n'empêche pas l'immersion dans le roman.

Concernant la fin, j'étais un peu inquiet à l'approche des derniers chapitres parce que j'avais du mal à voir comment l'auteur allait pouvoir clôturer cette histoire en si peu de pages. Au final, je suis plutôt satisfait du dénouement qui est un peu rapide à l'échelle du reste du récit mais que j'ai trouvé cohérent et satisfaisant.
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