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Les temps ultramodernes tome 1 sur 3
EAN : 9782073005274
Gallimard (11/04/2024)
  Existe en édition audio
3.63/5   133 notes
Résumé :
En débarquant à la capitale en quête d’un emploi d’institutrice, Renée est loin de se douter qu’elle va tomber sur un Martien blessé. Mais ce Paris-là n’est pas le nôtre. Grâce à la découverte de la cavorite, un métal miraculeux, les voitures volent, des paquebots transcontinentaux appontent aux quatre tours Eiffel parisiennes, et Mars est une destination comme une autre. Quand Marie Curie découvre que la cavorite a une durée de vie limitée, elle ignore à quel point... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (58) Voir plus Ajouter une critique
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Laurent Genefort se lance dans une uchronie à la sauce rétrofuturiste avec son roman Les temps ultramodernes. le point de divergence par rapport à notre histoire se situe en 1885 avec la découverte de la Cavorite par un certain Georges H Cavor (voir Les Premiers Hommes dans la Lune de H G Wells) . Ce nouvel élément chimique possède la particularité d'annuler par son rayonnement la gravité de la Terre. Cette découverte va changer profondément le visage de notre Belle Epoque de 1920 avec des voitures qui vont devenir volantes et des paquebots qui vont se transformer en vaisseaux spatiaux.

« Alors qu'elle rejoignait la Verte, une voiture se posa à quelques mètres avec la grâce d'une feuille morte. Une Delaunay-Belleville profilée comme une torpille, la carrosserie d'un rouge profond. L'intérieur capitonné était vide. Un chauffeur en livrée descendit de la cabine de conduite. Dans une avalanche de jurons italiens, il déplia une capote plombée sur la sustentation centrale. L'interruption du champ de lévitescence fit recouvrer brutalement son poids au véhicule, qui s'affaissa sur la chaussée comme si un piano lui était tombé dessus. le chauffeur lança le moteur. Un instant plus tard, l'automobile disparaissait dans des crachotements de fumées noires. »

Avec la Cavorite, on a va se rendre sur Mars, et ce minerai va devenir un enjeu principal pour les grandes puissances de cette époque. Malheureusement, les propriétés antigravité de la Cavorite ne sont pas éternelles et plus grave encore les mines commencent à s'épuiser. Notre histoire va commencer par un krach boursier avec des tensions en Europe causées par cette pénurie annoncée.

« le drame boursier a connu son épilogue dans la journée du 7 septembre. Une frégate aérienne des douanes britanniques a retrouvé le courtier new-yorkais à trente-quatre kilomètres d'altitude. Ruiné par le krach de la cavorite, William J. Lamont s'était défenestré le 15 mai 1923, quatre jours après le « vendredi noir ». Il avait préalablement écrit une lettre d'excuses aux clients dont il avait causé la banqueroute, puis s'était sanglé dans une ceinture de cavorite. le métal antigravitatif l'avait emporté dans les airs sitôt la fenêtre du building franchie. Sa dépouille flottait depuis quatorze mois, congelée par le froid sibérien régnant dans la stratosphère. Porté par les vents ténus de haute altitude, le businessman tournoyait comme un astre. »

Le décor est planté et nous allons suivre plusieurs personnages qui finiront par se croiser et donner ainsi du rythme à notre récit. Il y a d'abord Renée Manadier, notre institutrice de province qui monte à Paris suite à la fermeture de son école rurale. Maurice Perreti, commissaire de police bientôt en retraite qui cherche à finir sur un coup d'éclat. Marthe Anvin, une spécialiste scientifique de la cavorite qui est aussi une féministe égarée dans une époque de machistes. Il y a aussi le jeune artiste Georges Moinel qui va être embarqué dans le milieu anarchique. Et enfin le docteur Marcel chery, médecin eugéniste, poursuivit à cause du scandale de ses centres de stérilisation involontaire.

« Cela n'avait pas empêché Marcel Chery d'être invité par les plus hautes instances. Son cabinet de consultation ne désemplissait pas. Il recevait des épouses de politiciens et d'industriels influents. le président du Conseil en personne l'avait félicité d'avoir monté son réseau hospitalier en un temps record. Immergé dans son sentiment de toute-puissance, Marcel avait négligé les bruits qui commençaient à courir sur les « centres Chery ». Certaines patientes, anesthésiées pendant le traitement, souffraient du bas-ventre des semaines après leur sortie. Il s'agissait toutefois de déshéritées, si bien qu'elles n'avaient personne vers qui se tourner. »

le roman de Laurent Genefort nous transporte dans le Paris des années 1920, dans un style et une prose proches des romans ou des feuilletons du début du siècle dernier. C'est tout ce qui fait son charme. On y retrouve les thèmes de l'époque : La guerre, la colonisation, les inégalités sociales, les luttes de pouvoir. le rythme soutenu et les aventures pleines de rebondissements savent nous tenir en haleine. Mais l'auteur nous propulse aussi sur la planète Mars avec le même charme suranné des Edgar Rice Burroughs ou Gustave le Rouge. La planète Mars nous est décrite avec une atmosphère respirable. Elle possède sa propre flore et faune. Et pour nos Martiens ailés, je vous ne vous dirais rien de plus sous peine d'être accuser de trop spoiler le roman.

« Un matin, elle emmena toute la classe au bas de la colline. Un ruisseau coulait à l'ombre de saules à feuilles mauves, bordé par un lit de coquilles de kotarras. L'histoire naturelle faisait partie de l'instruction, mais ici, sur Mars, la plupart de ses connaissances ne valaient rien ; quant à Odette et Simone, elles avaient purement et simplement jeté la matière aux oubliettes. Elle devait donc improviser. le piétinement des brindilles par les élèves causa la fuite d'une colonie de coléoptères dorés – « des hunurs », les nomma Ogloor lorsqu'elle lui demanda – à travers un tapis de champignons spongieux. Un lucane rouge escortait chaque hunur : peut-être le mâle, ou la femelle, ou un insecte ayant un quelconque intérêt à le faire, à la manière d'un poisson-pilote. »

Laurent Genefort possède également une plume agréable et légère qui nous entraine avec brio dans son univers. Un univers qui est riche en dépaysement mais qui nous est aussi familier par ses connaissances précises des années vingt. Son uchronie revêt des relents de steampuck à la sauce des romans fantastiques qui ont bercé notre enfance. Un vrai coup de coeur pour les nostalgiques de cette époque que sont les amoureux du Titanic et de l'Orient Express. Un univers où on a envie d'y revenir et où il fait bon perdre son temps. Un livre accessible à tous et avec une vraie fin. Et pour couronner le tout, une magnifique couverture…

« Nantie de la notification récupérée dans sa boîte aux lettres, Marthe se présenta devant un guichet de la Poste à grille ouvragée, au-dessus duquel était inscrit : Télégraphie aérienne & spatiale. Distributeurs de timbres, panneau indicateur des levées et balances de pesée électromécaniques peuplaient le grand espace d'un vacarme de central téléphonique. Une employée lui remit une feuille dactylographiée, pliée en trois et oblitérée : l'éclairogramme envoyé par Renée quelques jours plus tôt. Elle n'osa demander combien cela avait coûté à son amie, un bon mois de salaire d'institutrice au minimum : un luxe inouï, quand celle-ci aurait pu passer par la voie postale ordinaire, via l'un des paquebots spatiaux. Un précieux témoignage d'amitié, de la part de Renée. le message avait été capté par l'observatoire de Meudon, transféré par tube pneumatique au bureau central, où il avait été déchiffré. Marthe s'acquitta d'une somme de cinq francs, puis signa dans un registre. »

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Laurent Genefort est, depuis une trentaine d'années, un auteur prolifique de science-fiction et de fantasy.
A la suite de sa première publication en 1988, le Bal des Ténèbres chez Fleuve Noir, il explore les différents genres des romans sfff en littérature adulte et jeunesse.
Auteur d'une thèse sur les livres univers dans la SF, il a également reçu de nombreux prix littéraires pour ses publications (prix de l'imaginaire et Rosny entre autres)
Dans son dernier roman, Les Temps Ultramodernes, il explore le rétrofuturisme avec ses références au passé et de nombreux éléments futuristes .

Paris 1924. La cavorite a changé le visage de la révolution industrielle. Grâce à ce matériau permettant de déjouer la gravité, les voitures et tramway volent, les immeubles grattent le ciel et des aéronefs permettent de se rendre sur Mars, planète en pleine colonisation. Mais le rêve prospère se fissure lorsque Marie Curie découvre que les effets de la cavorite sont temporaires. L'économie s'effondre et le bilan social est désastreux. C'est dans ce contexte particulier que Renée, une jeune institutrice en quête d'une nouvelle affectation depuis la fermeture de sa classe et la désertification rurale, débarque sur Paris.

Récit :
Roman choral uchronique à l'ancrage historique bien daté, Les Temps Ultramodernes décrit les années 20 et les remous politiques et économiques de cette époque. On retrouve entre autres les noms les plus célèbres des scientifiques, la politique économique et le climat de sortie de guerre.
C'est également un roman ambitieux qui explore l'histoire à travers les événements marquants de l'époque, la science par l'explication du fonctionnement de la cavorite, la société par les conséquences du progrès et des avancées technologiques et le colonialisme par l'exploitation des ressources martiennes et le devenir du peuple primitif qui l'habite.
Le point de vue des différents personnages, tous plus ou moins liés à une enquête criminelle sur un trafic de cavorite, nous offre une exploration précise de l'époque.

Coté scientifique :
L'auteur emprunte à H. G Wells son invention du cavorium pour son roman.
La cavorite découverte par Marie Curie et sur laquelle d'autres scientifiques de l'époque travaillent également, a donné naissance à une nouvelle physique dans laquelle la gravité est une force nucléaire. La cavorite, en se désintégrant, génère de l'antigravité (invention physique de l'auteur)
La cavorite, en tant qu'élément chimique, doit être traitée et alliée à d'autres matériaux pour être exploitable. Ainsi, le plomb permet d'orienter l'antigravité et de faire naviguer des bateaux ou des voitures dans les airs.
Les conséquences économiques, matérielles et culturelles de cette découverte sur le monde nous sont introduites par des articles de presse qui s'insèrent entre les chapitres.
La France, notamment, règne en maître sur ce matériau et se trouve économiquement et politiquement puissante.
L'exploitation de la cavorite permet de construire des immeubles équivalent à nos gratte-ciel modernes, aux voitures de voler, et des paquebots entiers effectuent la liaison Terre-Mars, charriant sans cesse de nouveaux colons pour la planète rouge.


Une société à deux vitesses :
L'arrivée de la cavorite a entraîné des répercussions sur toute la société en modifiant les métiers, la façon de concevoir les déplacements ainsi que les villes.
La bourgeoisie et l'aristocratie se partagent les « cieux » tandis que la classe ouvrière vit au sol.
La bourgeoisie méprisent les ouvriers et les conditions de vie de ces derniers sont bien représentées.
Sans être misérables, ils ne bénéficient pas de l'ensemble des bienfaits que la cavorite a apporté.
L'auteur nous décrit une nouvelle révolution industrielle avec des bons et des mauvais côtés.
Les progrès permis par la cavorite dépeignent une société où les plus riches possèdent des voitures volantes et tutoient les cieux depuis leur balcon tandis que les plus défavorisés bénéficient des miettes. L'auteur illustre son propos, par exemple, avec les déchets jetés depuis les voitures volantes sur la tête des gens au sol.

Un contexte de raréfaction :
Le roman s'ouvre en 1924 dans un contexte de raréfaction de ce matériau.
De plus, Marie Curie a découvert que le cavorium étant un élément radioactif, une fois tous ses atomes désintégrés, la cavoradiance disparaît à jamais, posant le principe d'une durée de vie limitée à une quinzaine d'années.
Dès lors, la technologie révolutionnaire connaît de nombreux dysfonctionnements. A Paris, le magasin Bonmarché, qui supporte un nombre impressionnant d'étages, s'effondre car construit avec du cavorium, ainsi que plusieurs résidences privées. D'autre incidents du même type nous sont relatés par le biais d'articles de journaux entre les chapitres du roman.
C'est toute l'économie qui est frappée par ricochet jusqu'à ce qu'un crack boursier survienne, un certain vendredi noir.
La découverte d'un trafic clandestin de cavorium d'origine inconnue soulève donc de nombreuses interrogations chez Maurice, un commissaire de police.

Roman social :
Le crack boursier a certes entraîné la ruine de puissants marchands mais ses répercussions sont arrivées jusque chez les classes moins aisées.
Lorsque Marcel, un jeune peintre-apprenti, débarque à Paris, il rencontre un groupe d'anarchistes qui rêvent d'une révolution sociale. A travers son regard d'artiste, c'est également toute l'époque art-moderne qui nous est décrite. Les retrouvailles avec la femme qu'il aime et anarchiste convaincue l'entraînent dans les mouvements révolutionnaires gauchistes.
Les différents personnages sont conformes au modèle de l'époque.

Exode rural à destination de Mars :
L'exode rural qui a accompagné les progrès technologiques s'effectue non vers les villes mais vers Mars. Les habitants des campagnes deviennent des colons sur la planète rouge où la main d'oeuvre bon marché est recherchée. Mars est une planète riche en ressources, parfaitement habitable pour l'homme avec un écosystème adapté.
Les Erloors, sorte d'humanoïdes croisés avec une chauve-souris, sont un peuple primitif natif de la planète Mars. Bien que capables de communiquer avec les humains, les Erloors sont les victimes de la colonisation et d'une forme de ségrégation. Un fort sentiment de rejet est développé parmi les colons tandis que sur Terre, des spécimens sont exhibés dans des zoos et deviennent une attraction exotique. Dans la deuxième moitié du roman, ils seront victimes d'exploitation de la plus affreuse façon.
L'auteur s'est inspiré pour le nom et les caractéristique de l'espèce du roman « Le Prisonnier de Mars » de Gustave le Rouge.
A Paris, la jeune institutrice Renée tombe nez-à-nez avec Ogloor, un représentant de cette espèce, qui s'est enfui du zoo où il était parqué. Elle le cache et décide de l'instruire comme si c'était un de ses élèves. Leur relation permet à l'auteur de développer tout un pan d'histoire et de culture pour ce peuple extra-terrestre.

Conclusion :
Laurent Genefort livre un récit ambitieux qui rend hommage aux auteurs de science-fiction des années 50.
J'ai beaucoup aimé ma lecture.
Enfin, l'objet livre est de toute beauté avec la magnifique couverture de Didier Graffet sous forme d'affiche rétrofuturiste art-déco.
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Dans un Paris des années 1920 uchronique, la cavorite, métal antigravitationnel, permet l'utilisation d'engins volants dans les airs de la capitale, au-dessus de l'Atlantique ou vers Mars ! Car la planète rouge est le fruit de la colonisation de quelques puissances, dont la France.

Mais voilà : non seulement les mines de cavorite s'épuisent, mais en plus Pierre et Marie Curie ont découvert que le rayonnement de la cavorite, annulant la gravitation, est beaucoup plus court que ce qu'on pensait et est limité à quelques années. S'en est suivie une grave crise, puisque toute la civilisation moderne tournait autour de ce métal.

Dans ce contexte, nous suivons à Paris Renée, institutrice à la recherche d'un emploi et qui va recueillir un erloor (un Martien) blessé ; Georges, artiste sans le sou qui se mêle aux anarchistes ; Marthe, journaliste scientifique passionnée par la science mais dotée d'un mari peu encourageant ; Maurice, commissaire de police proche de la retraite et adepte des vieilles méthodes ; ou encore Marcel, médecin déchu car il stérilisait des femmes pauvres dans une perspective d'eugénisme.

Les différents arcs narratifs, qui se croiseront parfois, vont dessiner un mystère autour de la cavorite et des habitants de Mars, les erloors, espèce intelligente mais considérée par beaucoup comme des animaux puisqu'ils n'ont pas développé une civilisation technologique.

L'un des gros points forts de ce roman est la plume, fluide et agréable. Les chapitres relativement courts, passant d'un narrateur à un autre, sont très entraînants. L'univers a beau être uchronique, on s'y croit et les scènes sont très vivantes, rappelant le Paris des années 1920 qu'on connaît, mêlé à une touche de science-fiction grâce aux appareils volants — voire aux vaisseaux spatiaux assurant la liaison vers Mars — et à une Histoire modifiée. On est dans une ambiance steampunk transposée au début du XXe siècle très réussie.

La quête des personnages est l'élan du récit ; au-delà de l'intrigue générale qui expose un trafic de cavorite, le lecteur suit les péripéties qui vont bouleverser leur vie. Car le récit ne manque pas d'actions, certaines rappelant les vieux films, tandis que d'autres lorgnent du côté de la science-fiction old school (les Martiens !) mais dépoussiérée avec des thématiques modernes, la plus marquante étant les droits des « colonisés », auxquels on peut ajouter la place des femmes dans la société, le cynisme des gouvernements ou encore la dépendance d'une civilisation à une source d'énergie non renouvelable. Même si la conclusion n'offre pas de grande surprise (les révélations arrivent au fur et à mesure), on est séduit par l'univers convaincant et le rythme entraînant du roman.

Une lecture captivante.

Lien : https://feygirl.home.blog/20..
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« La nécessité d'en savoir plus sur la cavorite devenait urgente. Sa première impulsion fut de composer le 12 sur le cadran du téléphone, et de demander le numéro de l'Institut du Cavorisme. le centre, fondé par les époux Curie, s'était donné pour mission d'étudier la cavorite sous ses aspects purement scientifiques. À l'autre bout du fil, l'un des étudiants des Curie répondit. Aux questions de Maurice, la voix juvénile usa d'un jargon qui acheva de noyer le policier dans le brouillard. « Antigravitescence », « radiations kappa », « cavorurgie »… le moindre terme le faisait achopper. »

Pas la moindre Porte de Vangk à se mettre sous la dent dans ce nouveau roman de Laurent Genefort, une uchronie « steampunk » à la française. Mais pour autant les voyages spatiaux n'en sont pas totalement absents, car des colonies ont été fondées sur Mars, au détriment des autochtones, les Erloors. Il faut dire que leur apparence ne plaide pas en leur faveur. Et qu'ils se nourrissent du sang des animaux locaux.

La cavorite, découverte à la fin du 19ème siècle, a permis ces voyages. Elle a pour effet d'annuler la gravité. Mais voilà que ce minerai, que l'on pensait inusable, se révèle avoir une durée de vie beaucoup plus courte que prévue. Des crises économiques se produisent en réaction à sa raréfaction. Les pouvoirs publics et les services secrets font tout pour trouver de nouvelles sources d'approvisionnement.

Dans ces temps troublés, nous suivrons en alternance quelques personnages bien trempés. A commencer par Renée Manadier, institutrice licenciée de son poste à la campagne. Elle ira sur Mars pour y enseigner. Marthe Antin est une scientifique qui est aussi journaliste. Elle sera mêlée à bien des événements et en enquêtant mettra sa vie en danger. Je place au premier plan ces personnages de femmes tenaces car ils m'ont paru être les plus convaincants.

Mais nous suivrons aussi Georges Moinel, un jeune homme qui se dit artiste et qui deviendra anarchiste, Maurice Peretti, un commissaire de police, Marcel Chery, un docteur plus proche de Mengele que de Schweitzer. Sans oublier Aknood, un erloor.

Ce roman est plaisant à lire et les aventures s'enchaînent sans temps morts, ou presque. « Qui trop embrasse, mal étreint » dit-on parfois mais grâce ses inventions ébouriffantes je pardonne volontiers à l'auteur quelques longueurs. Et je suis prêt à lire la suite, s'il y en a une, car ce roman se suffit à lui-même.
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Après le traité de cavorologie, le roman en lui-même. Je ne sais pas très bien quel adjectif qualifie le genre de science fiction choisi par l'auteur : uchronie rétroactive¿ romance scientifico-alternative?
Il y a des références à de la "vieille science fiction", comme les "vampires" martiens (Gustave le Rouge) mais c'est très subtil et donne même envie de chercher les vieux textes originaux.
C'est sans doute la feuille de route de l'auteur, proposer un texte à la manière de... revisité avec les canons modernes.
Je trouve cela très réussi.
J'ai pris un plaisir à retrouver des personnages célèbres hors contexte historique réel, me demander à qui faisait référence l'auteur avec tel autre et surtout suivre les trajectoires des protagonistes principaux dont on sait qu'elles vont se recouper. Les représentations de l'époque (races), les drames à venir (camps) sont dans l'air du temps choisi par le narrateur.
Je crois que c'est cet aspect qui m'a le plus séduit. L'uchronie genre "si l'archiduchesse n'avait pas été assassinée ici ou ailleurs, il n'y aurait pas eu de première guerre mondiale" m'insupporte, chaussettes sèches ou pas.
Ici, l'auteur nous fait "sentir" l'air du temps, tout en proposant un monde alternatif.
Ce faisant, il évoque en finesse quelques grands défis des sociétés : limite des ressources, guerre pour se les approprier, rôle de l'information...
Dernier point positif : c'est une histoire complète. Je ne sais pas si l'univers décrit servira de cadre à des romans ultérieurs, mais celui-ci constitue déjà une entité autosuffisante.




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critiques presse (2)
LeParisienPresse
23 mars 2022
L’auteur croise les destins de Renée, une institutrice montée à la capitale, Marthe, une journaliste scientifique, et Georges, un artiste raté. Tous vont se retrouver mêlés à un gigantesque complot sur fond de raréfaction de la cavorite. Tout parallèle avec les énergies fossiles d’aujourd’hui n’est peut-être pas fortuit… Passionnant, d’autant que l’écrivain insère entre les chapitres des extraits fictifs de gazettes de l’époque, dont un certain… « Petit Parisien ».
Lire la critique sur le site : LeParisienPresse
SudOuestPresse
06 janvier 2022
Avec ce roman, Genefort installe carrément la rétrofiction dans l’uchronie. On ne lui fera pas le reproche de chercher seulement à divertir. Son livre relève de la fabulation spéculative : une des fonctions de la fiction est de prendre à rebours le réel pour mieux l’appréhender.
Lire la critique sur le site : SudOuestPresse
Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
L’esplanade contenue sous la jupe de la tour servait à la fois de zone d’embarquement et d’espaces d’attente. Sa vastitude permettait aux pavillons marchands de s’élever sur plusieurs étages. Le public avait accès aux boutiques, si bien que des soldats patrouillaient en permanence. Il restait trois heures avant l’appareillage : le temps nécessaire à l’écoulement de la foule vers les deux ascenseurs d’entrée. Marthe pénétra dans un pavillon dévolu aux partants. Elle s’était déjà pourvue du matériel indispensable à l’arrivée sur la colonie. Cela avait d’ailleurs grevé le maigre budget alloué par son éditeur. Dans les rayons s’alignaient des sacoches et des guêtres en cuir traité contre les moisissures locales, d’épaisses chemises importées du Canada, des couteaux Laguiole à la lame étudiée pour trancher les plantes martiennes, des applicateurs de latex sous pression ; mais aussi des souvenirs de la Terre : paquebots et tours Eiffel-Toussaint miniatures, sachets de terre provenant des différentes régions, billes de verre en forme de globe terrestre…

Des informations défilaient sur le panneau électromécanique. L’appareil cliquetant était surmonté d’une horloge astronomique dont les deux cadrans donnaient l’heure de Paris et l’heure de la colonie française sur Mars.
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Comme Renée entrait dans le café-véranda, la musique douce diffusée par le gramophone électrique fit broncher Ogloor qui marchait à côté d’elle. Les griffes de ses pieds raclaient le plancher de façon syncopée. L’institutrice laissait pendre la bride, en prenant soin de ne jamais la tendre. Elle ne voulait pas donner l’impression de le tenir prisonnier, quand bien même elle s’était conformée à l’injonction de l’officier de coupée. Ogloor avait été si souvent captif qu’il ne songeait pas à se plaindre. La simple notion de liberté n’avait guère plus de consistance qu’un nuage pour lui qui n’avait connu que l’adversité, se répétait-elle. Par ailleurs, il dépendait totalement d’elle dans cet environnement étranger. Mais que d’autres le voient ainsi entravé et puissent en tirer jouissance ou soulagement la mortifiait, elle.

Le service proposait des petits déjeuners anglais composés d’œufs brouillés aqueux, d’un thé insipide au lait et de saucisses. Ils étaient servis sur des tables en forme de petit beurre Lu. C’était un peu cher, mais le tintamarre de réfectoire lui rappelait son école d’antan et, pour quelque obscure raison, cela la réconfortait.
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Dans la poche de son manteau, la lettre de convocation était froissée à force d’être serrée. Renée la posa sur sa jupe, pour la lisser avec application. Sur la banquette en face d’elle, un rire étouffé lui fit lever la tête. Les quatre heures du trajet ferroviaire lui avaient permis d’étudier à loisir les passagers du compartiment. Face à elle et flanquée de deux marmots boudeurs, une matrone somnolait, le menton enfoncé dans son fichu. Assis à côté, un homme à petite moustache cirée, comme tracée au fusain, était plongé dans la lecture d’un numéro du Temps daté de la veille : le 19 novembre 1924. Son voisin de gauche, un commis voyageur d’une cinquantaine d’années, aurait pu payer double tarif tant il occupait de place. Entre ses joues couperosées, sa bouche évoquait l’embouchure évasée d’un cor de chasse. Le dernier voyageur à sa droite, avec son allure efflanquée et son air d’adolescent rêveur, semblait le négatif de son épais voisin, sans cesse à l’affût d’une saillie à caser. Celui-là aurait éclaté d’un rire gaillard au lieu d’émettre un gloussement discret.

Incipit
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Le soleil ne dépassait pas encore des toits que, déjà, un tintamarre discordant emplissait l’espace. Des klaxons au niveau de la chaussée, des klaxons dans les airs où les voitures volantes louvoyaient entre les aérotrams. Renée se demanda si elle s’y habituerait un jour. Comment pouvait-il y avoir encore un seul oiseau dans les rues au milieu d’une telle cacophonie ? Comment supportaient-ils les éructations des véhicules poissant les poumons ?
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La jeune femme décrivait le monde atomique comme s’il s’agissait de son Royaume personnel. Elle s’animait alors d’une manière extraordinaire. Ses joues s’enflammaient, son ton devenait véhément et elle se haussait sur la pointe des pieds comme pour s’élever à la hauteur de son discours. Il y avait, dans la passion qu’elle mettait à décrire les lois fondamentales, la même recherche d’absolu que Peretti avait décelée autrefois, au niveau politique, chez les anarchistes les plus exaltés (p 143).
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