1931. André Citroen a un plan totalement fou : prouver la supériorité des voitures qu'il construit en leur faisant traverser l'Asie de Beyrouth à Pékin ! Treize mille kilomètres de montagnes, de déserts et d'abimes. Ce n'est pas son coup d'essai ; six ans auparavant, ses véhicules avaient traversé l'Afrique du nord au sud. On avait appelé cela « la croisière noire ». Là ce sera «
la croisière jaune ».
Il reprend également le même chef :
Georges-Marie Haardt, un homme brillant, froid et méthodique. Les véhicules seront le fleuron des industries Citroën : des autochenilles. Roues à l'avant, chenillettes à l'arrière. Il y aura deux équipes différentes : l'une partira de Beyrouth, l'autre viendra à sa rencontre depuis Pékin.
Bien vite les difficultés s'accumulent. L'URSS annule les autorisations de passage, confrontée qu'elle est à la violente révolte des Ouzbeks. C'est ensuite la Chine qui, pour de complexes raisons de diplomatie interne, accumule les difficultés pour délivrer les permissions nécessaires. Quand l'expédition s'ébranle enfin, l'itinéraire a été fortement modifié, et passe dans des endroits bien plus difficiles que prévu.
A l'ouest, le groupe « Pamir » arrive sans trop de difficultés jusqu'au contrefort de l'Himalaya, puis vivra un calvaire. Ils devront faire face à des chaleurs étouffantes, des froids polaires. Les rivières seront franchies avec des ponts de corde, les voitures oscillant au dessus de l'abîme. In fine, c'est démontées et portées à dos d'homme que les deux dernières passeront le col de Gilgit.
A l'est, les choses ne vont pas si bien pour le deuxième groupe, tombé en pleine révolte. Tout à l'ouest de la Chine, la province du Xinjiang est en feu. Ses habitants, les Chantous (aujourd'hui on dit plutôt Ouïghour) rejettent l'autorité des Hans. Les combats font rages, et la distinction entre soldats, rebelles et pillards est plutôt ténue. Pour ne rien arranger, le seigneur de guerre local est très intéressé par leur matériel, et leur interdit catégoriquement de poursuivre leur chemin…
In fine l'expédition sera un succès, qui permettra également de recueillir de précieuses données historiques et scientifiques. le père
Teilhard de Chardin, qui en faisait partie, y fera notamment de nombreuses découvertes. En revanche d'un point de vue économique c'est un échec total, qui précipitera la faillite de Citroën. Mais l'oeuvre accomplie demeure.