Tous ces visages croisés furtivement, tu peux le dire maintenant, encombrent toujours ta mémoire.
A des degrés divers, à des places plus ou moins privilégiées, ils sont là , bien présents, comme le sont, presque sans exceptions, tous ceux qui ont traversé ta vie et qu'il t'a plu de retenir.
Ces visages là n'ont pris aucune ride, ils ne se sont pas ternis,ils ne seront jamais méconnaissables.Ils gardent leur pureté originelle,leur gentillesse inouïe, et cette beauté insolente qui, à tes yeux de l'époque, frôlait la perfection.
Et comme les baobabs de leurs contrées ancestrales, ils ne vieilliront donc jamais...
S'il est une chose de laquelle chacun de nous est le seul survivant, c'est bien l'accumulation des images que l'on garde de notre propre passé.Qui d'autre que nous mêmes,pourrait assurer que ce passé a bien existé? et pourquoi se priver de le figer, pour quelque temps encore fut ce sur du papier, mais, au moins,au delà du terme de notre propre mémoire?
Les moments pour donner ne sont pas si courants.
Il faut déambuler, mais ce n'est pas toujours possible,loin des mouvements de foule,pour trouver une main tendue qui soit également solitaire, et qui ne fasse pas rappliquer, aussitôt, d'autres mains tentaculaires.
Mais ces mains à l'écart, qui n'ont pas la force d'aller là où passent les riches, sont déjà des mains perdues, appartenant à une lépreuse dont la maladie a effacé le visage, ou à un enfant gisant qui ne se relèvera plus...