Le journal d'un fou du même auteur m'avait laissée quelque peu dubitative, même peut-être était-ce là la volonté de
Gogol que de décontenancer ses lecteurs. Ne souhaitant pas rester sur un sentiment mitigé, j'ai décidé de lui redonner sa chance avec
le révizor, ce que je ne regrette pas ayant savouré cette comédie satirique bien au-delà de mes attentes.
L'auteur y dénonce avec beaucoup de cynisme et d'humour la corruption gangrénant la société russe de son époque, et la manière dont les gens ont une légère tendance à se fier aux apparences pour le meilleur, le pire et le rire ! Un défaut dont va profiter allègrement un jeune voyageur désargenté qui, par le jeu des rumeurs entretenu par la peur des autorités, va bénéficier des largesses des habitants d'un trou paumé.
Alors que Khlestakov est sans le sou, on le prend pour un révizor envoyé secrètement par le gouvernement. Convaincus d'avoir démasqué sa véritable identité, les habitants vont alors multiplier les pots-de-vin, ou plutôt les « dons », « les gestes d'amitié » et « d'accueil », certains allant même très loin. Khlestakov ne comprend pas tout de suite les raisons de cette générosité, lui qui craignait la prison, mais cela ne va pas l'empêcher d'accepter avec plaisir la situation et de bien en profiter.
Le personnage n'est pas complètement antipathique, bien que je n'aie pas adhéré à son sens de l'opportunisme exacerbé, mais il n'est pas non plus sympathique ! Je dois d'ailleurs dire que son comportement vis-à-vis de la gent féminine m'a quelque peu indisposée, même si vu l'époque de la pièce, le 19 e siècle, on aurait pu s'attendre à bien pire que son côté goujat. On a ici le parfait portrait de l'oisif qui prend la vie comme elle vient, vit au-dessus de ses moyens, et qui n'hésite pas à profiter de choses qui ne lui appartiennent pas. Mais après tout, si des gens sont prêts à corrompre et certains à être corrompus, peut-on totalement le blâmer et le condamner ? Pour ma part, j'ai un avis tranché sur la question, mais j'ai apprécié la manière dont
Gogol nous invite à nous poser la question.
Quiproquos, lapsus révélateurs, avidité, envie de grimper l'échelle sociale à tout prix, corruption… le programme est réjouissant et le sourire quitte rarement les lèvres des lecteurs qui se posent alors une question : jusqu'où cette farce va-t-elle aller ? Pour le découvrir, une seule solution, vous plonger dans cette pièce qui ne manque ni d'humour ni de panache, et qui dénonce avec brio une corruption bien délétère à tous les niveaux ! Il y a en outre un petit côté intemporel des plus savoureux dans les travers sociétaux mis en scène…
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