Une véritable arme de destruction massive ! La découverte du de la Nature, de rerum natura, poème de plus de sept mille vers du latin Lucrèce, Titus Lucretius Carus, apôtre de la doctrine de son maître
Epicure (et de l'atomisme de Démocrite), seule capable de libérer l'homme de la peur des dieux et de la mort, remettait en cause les fondements mêmes de la religion hégémonique européenne, le catholicisme. L'historien
Stephen GREENBLATT dans
Quattrocento en narre la passionnante découverte au début de la Renaissance en 1417 par Broccio Bracciolini dit
Le Pogge, secrétaire apostolique du pape
Jean XXIII condamné le 29 mai 1415 .
Lucrèce heurtait en effet de front l'idéologie dominante en professant des idées hautement hérétiques pour l'Eglise universelle : un univers sans bornes constitué d'atomes sans créateur ni concepteur, une âme qui meurt avec le corps, la vie intervalle entre deux néants, le principal objectif étant l'augmentation du plaisir et la réduction de la douleur.
Autant de principes qui séduiront les esprits les plus brillants de leur temps,
Galilée, Machiavel, Botticelli (Le Printemps),
Montaigne et autres, jusqu'au président américain Jefferson qui, imprégné du de Natura, rédigera la Constitution en y introduisant les notions épicuriennes de bonheur et de bien-être général .
Pour nous revigorer au souffle des cimes en nos temps d'obscurantisme, il nous faut (re)lire de rerum natura, opus bimillénaire, dont les propositions, après avoir ébranlé les dogmatismes, seront confirmées par l'avant-garde des scientifiques contemporains. " En niant les dieux indignes et criminels, il [Lucrèce] prend lui-même leur place. Il sort du camp retranché et commence les premières attaques contre la divinité au nom de la douleur humaine. " (
Albert Camus,
L'Homme révolté, Gallimard, 1951).