Quand il était tout petit,
Claude Gutman s'appelait Dany, parlait hébreu, jouait au soleil de Césarée et vivait en communauté. Un bonheur simple... jusqu'à ce que ses parents divorcent. Pour se venger de son épouse infidèle, le père quitte Israël et revient en France avec l'enfant qui est alors sommé d'oublier tout ce qui le rattache à son ancien pays: son identité, sa langue et surtout sa mère restée au kibboutz.
A Paris commence alors une toute autre vie, plutôt misérable et entièrement soumise aux foucades d'un père tyrannique. Craignant les représailles, Claude obéit sagement à tous les ordres, subit en silence les incohérences, les mensonges, les secrets, les entourloupes et les interdictions absurdes imposées par ce père qu'il aime autant qu'il le déteste. Seules les visites à ses grand-parents maternels apportent le réconfort dont il a besoin mais celles-ci sont soumises au bon-vouloir plus que capricieux du despote. Otage, tampon, pantin déplacé au gré des besoins paternels, Claude doit s'accommoder de la solitude, de l'ennui et d'une infinie tristesse. Et ravaler sa colère..
Dans ce roman autobiographique l'auteur ouvre les vannes de son ressentiment pour se libérer de ce qui lui pèse sur le coeur et ainsi régler ses comptes avec son géniteur. Pour ce faire, il restitue avec minutie le souvenir de sa vie familiale chaotique et de sa souffrance d'enfant mal aimé qu'aucun adulte n'a pu, su ou voulu entendre et qui ne pouvait s'exprimer qu'à coups de maux de ventre et de gorge. Au delà de l'histoire personnelle et de son contexte particulier, c'est toute la détresse de l'enfance totalement démunie face à l'omnipotence des adultes, qu'exprime ce texte aussi touchant que prenant malgré quelques longueurs. Beaucoup de romans ont été écrits sur le sujet mais celui-ci a le mérite de se distinguer par sa délicieuse petite saveur ashkénaze. Un régal.