La ville de Solidor, bâtie à l'extrémité d'une presqu'île et séparée du reste du monde par de hautes montagnes, vit isolée. Si la campagne environnante recèle d'espèces particulières, les oiseaux, quant à eux, sont pour la plupart aphones. Aussi, les habitants se sont-ils tous passionnés par toutes sortes d'oiseaux exotiques, qu'ils font venir de partout, dont les chants résonnent dans toutes les rues mais aussi dans toutes les maisons. Un véritable éblouissement de couleurs et de mélodies... Illian est un jeune apprenti qui travaille pour Maître Koppel, illustre fabricant de cages à oiseaux. Pourtant passionné par tous ces volatiles, le jeune homme ne peut malheureusement pas en posséder, son maître ne lui payant que le gîte et le couvert en échange de son travail, même si les magnifiques cages aux sculptures fines se vendent très bien. Alors que, le soir venu, Koppel compte la recette du jour, Illian, lui, apporte la dernière touche à un petit rossignol qu'il a sculpté dans un rebut de bois tendre, à défaut d'avoir un oiseau vivant. Malheureusement, Koppel le surprend et le traite de voleur. Mais lorsque Flora, sa fille, dont Illian est secrètement amoureux, est émerveillée par l'oiseau sculpté, le maître lui demande de sculpter d'autres rossignols, d'autant que les commandes affluent...
Ce conte nous emmène à Solidor, il y a fort longtemps, une petite ville atypique peuplée de milliers d'oiseaux exotiques qui font le bonheur de tous ses habitants. En particulier Illian qui, à force de les admirer, finira par sculpter un rossignol plus vrai que nature. Malheureusement, sans se douter des conséquences, à ses yeux désastreuses, que cela va entraîner. Bien que situé en des temps fort lointains, ce conte aborde, étonnamment, des thèmes très actuels tels que les effets de mode, l'exploitation, la consommation de masse, le matérialisme... Les personnages, travaillés et fouillés, sont magnifiquement dépeints. Qu'il s'agisse de Kopper, un artisan manipulateur et profiteur, d'Illian, jeune apprenti exploité pour qui l'on éprouve, dès les premières pages, une infinie tendresse, de par sa sensibilité et son empathie, Flora, une jeune femme timide qui n'ose tenir tête à son père, ou encore les oiseaux, véritables personnages à part entière. Il se dégage de cet album une véritable délicatesse, une certaine poésie, une harmonie éclatante et une profonde humanité. Les dialogues, intelligents, laissent place, parfois, à des silences lourds de sens. Graphiquement,
Gaëlle Hersent fait montre d'un travail original et vivant, empreint de poésie et de liberté. Sans ambages, ses planches sont de toute beauté, des visages très expressifs aux pleines pages époustouflantes.
Une fable profonde, intemporelle et bouleversante...