Parce que j'ai adoré "
Peau d'Homme" et "
La Sirène des Pompiers", "Miss pas touche" aussi, parce que la couverture est superbe, parce que c'est Zanzim et le regretté mais si talentueux Hubert, j'ai craqué sans détours pour "Ma Vie Posthume" que j'ai dévoré séance tenante et qui met en scène un scénario pour le moins excentrique. D'aucuns emploieraient sans doute l'adjectif "barré", voire "déjanté" plus racoleur que mon "fantaisiste" mais ce dernier a pour lui le grain de folie et la poésie...
Le postulat de "Ma Vie Posthume"? L'idée que la vraie vie peut commencer après la mort... Je ne suis pas certaine d'avoir très envie d'y souscrire mais cela semble vrai pour l'héroïne de ce très bel intégral dont la couverture brille dans le noir (!).
Emma Doucet est une vieille femme acariâtre qui vit seule dans sa jolie maison qu'entoure un jardin fleuri que lui envient ses voisins et sa nièce surtout, sa seule parente, son héritière. Seule lui rend visite Annie, son aide-ménagère qu'elle connaît depuis avant la vieillesse, puisque elle fut son institutrice. Une fille gentille quoique un peu pénible... Pensez-vous, c'est qu'elle a planqué les cigarettes d'Emma...
Un soir, c'est la chute, au sens propre comme au sens figuré et lorsque la vieille femme se réveille, c'est pour se rendre compte qu'elle est morte... assassinée probablement.
Emma est morte, Emma continue de vivre et tant qu'à faire, elle tente aussi de découvrir le pourquoi du comment de sa fin tragique, tout en cachant son état aux vivants.
Au fil des pages de ce récit délicieusement grinçant, on s'attache à cette vieille dame caustique et mordante, drôle et cynique, très peu politiquement correcte qui exhume pour nous les souvenirs de son existence et qui réveille même d'entre les morts sa meilleure ennemie.
Si j'ai beaucoup aimé toute la première partie du récit (celle qui correspond au tome 1 "Ne m'enterrez pas trop vite") dans laquelle Emma revient sur sa jeunesse, son époque, son grand amour perdu avec une sensibilité poignante, permettant aux auteurs de traiter merveilleusement et en toute délicatesse du deuil et du temps qui passe, j'ai été bien moins convaincue par la seconde partie ("Anisette et Formol") et sa magouille politico-éco-immobilière. L'intrigue est certes distrayante et se dévore, le fond -très engagé- se coule parfaitement bien dans le scénario, mais je l'ai trouvé trop simple, trop rondement mené et moins profond qu'il aurait pu être, moins profond que la première partie, plus intimiste et si émouvante, sous ses dehors corrosifs et mâtinés d'humour noir.
Le dénouement est lui aussi un peu trop léger pour moi, trop simple peut-être...
Alors, non je n'ai pas passé un mauvais moment: j'ai trop aimé la première partie pour cela et l'univers du duo Hubert et Zanzim fonctionne toujours très bien, avec son trait si particulier que j'affectionne, son univers à nul autre pareil… mais cette fin me laisse un gout un peu amer, d'autant plus amer que le début de l'histoire laissait espérer tellement plus pertinent, tellement plus profond, plus émouvant aussi...
J'ai un petit pincement au coeur en pensant, alors que je rédige ce billet, que cet ouvrage est l'un des toutes dernières publications de Hubert et qu'il ressemble fort à un conte macabre... Cette idée que la vie ne commence qu'après la mort…
Voilà qui interroge, qui résonne étrangement et de manière presque testamentaire comme une oeuvre cherchant à percer le sens de la vie et de la mort. C'est un peu triste. Tragique. Et ça me fait quelque chose.