L'exposition actuellement consacrée au Grand Palais à
Elisabeth Vigée le Brun (1755 – 1842) a trouvé un écho sur les tables des librairies, où l'on voit fleurir les ouvrages la concernant (c'est d'ailleurs eux que j'avais repérés avant d'avoir connaissance de l'événement justifiant ce soudain regain d'intérêt pour le peintre). Les éditions Tallandier, à cette occasion, rééditent la biographie d'Inès de Kertanguy, initialement publiée en 1994 par la Librairie Académique Perrin.
Rédigée d'une plume alerte, cette biographie agrémentée d'un encart de huit pages de reproductions des tableaux de l'artiste, a l'insigne mérite de se lire aisément car elle va à l'essentiel (en témoigne son nombre de pages limité, allié à une police de caractère confortable). Elle permet donc au néophyte d'en savoir un peu plus sur ce peintre réputé, sans se perdre dans un pavé indigeste et/ou trop érudit, fourmillant de détails dont il n'a que faire, ce que sont parfois (pour ne pas dire trop souvent) les biographies de ce genre. Les chapitres sont courts et portent des intitulés qui peuvent être triples et en annoncent précisément le contenu. L'auteur veille à intégrer le parcours du peintre dans son contexte historique, ce qui offre au lecteur la possibilité de survoler près de 87 ans d'une histoire de France fort troublée.
La Révolution n'y est pas présentée sous son meilleur jour, c'est le moins qu'on puisse dire, au point que je me suis demandée si l'auteur n'avait pas été contaminée par les convictions royalistes de son sujet d'étude ou bien si elle ne les partageait pas, tout simplement. Elle a, par ailleurs, une petite tendance au name-dropping, en nous fournissant de temps en temps une série de noms de personnages de la noblesse pas forcément célèbres et présents ici ou là, sans que cela apporte grand-chose au récit quand on ne les connaît pas.
Pour ce qui concerne l'artiste,
Inès de Kertanguy semble ne lui trouver quasiment aucun défaut, au point que l'image qu'elle en offre en est presque trop lisse. J'ai guetté, en vain, l'apparition d'un ou de plusieurs amants, car après tout la dame n'était guère éprise de son mari et de toute façon il ne l'a pas accompagnée lorsqu'elle a émigré et séjourné hors de France pendant plus de dix ans. J'ai aussi eu la surprise, quand j'ai regardé ensuite le documentaire d'Arte sur le même sujet, de découvrir que la fille du peintre, Julie, était morte de la syphillis après être tombée dans la prostitution. de cela il n'est fait nulle mention dans l'ouvrage : la brouille entre Elisabeth et la jeune femme, survenue des années auparavant, y est pourtant clairement expliquée mais, au moment du décès de celle-ci (en 1819, à 39 ans), l'auteur évoque seulement une maladie qui l'avait rendue méconnaissable et le fait qu'elle était criblée de dettes.
Malgré tout, même si pour les raisons que je viens d'évoquer, j'ai parfois été un peu agacée en la lisant, j'ai apprécié cette biographie qui m'a permis de satisfaire ma curiosité. J'ai admiré la manière dont
Elisabeth Vigée le Brun, très jeune, avait dû se mettre à gagner sa vie, suite à la mort de son père, et réussi à percer dans le milieu des portraitistes (de ce point de vue-là, j'aurais aimé que l'aspect peinture proprement dit soit davantage développé, il y a des précisions fournies dans le documentaire d'Arte qui ne l'étaient pas dans le livre). Je pense qu'effectivement elle était dotée d'une personnalité volontaire mais très affable, qui doit se refléter dans les Souvenirs qu'elle a rédigés à la fin de sa vie, où elle raconte les choses avec pas mal de diplomatie (l'auteur en cite des extraits, toujours bienvenus). Il reste que son parcours, impressionnant tant elle a vu d'années, de pays et de personnalités, m'est désormais un peu plus familier.
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