Dans ce tome 20 de cette « Star Edition » aux nouvelles illustrations de couverture dessinées par l'auteur, on est de plein pied dans le championnat national (donc dans la partie du manga non couverte par l'anime pour des raisons que la raison ignore). Les champions de Sannô affrontent les outsiders de Shohokû : pour nos héros c'est quitte ou double, et pour nous autres lecteurs et lectrices c'est l'enfer ou le paradis !
Takehiko Inoue utilise 250 pages pour mettre en scène les trois dernières minutes d'un match de basket, Dont 100 pages quasiment sans phylactères. Car ici nous sommes dans la quintessence de l'art séquentiel, et les images n'ont plus de besoin de mots pour nous amener vers l'infini et au-delà… Après autant de tension et de retournements de situation le match bascule dans la folie, et le public acquis aux champions se met à supporter et à acclamer les challengers. Joueurs comme spectateurs, tous rêvent de vivre de tels moments : les uns et les autres sont à la fois habités et dépassés par les événements, et l'univers devient une communion ou plus rien d'autre ne compte que les sensations et les émotions. le match entre Saint-Étienne et le Bayern Munich à Glasgow en 1976, le match entre la France et l'Allemagne à Séville en 1982, ou ce qu'a vécu le dénommé Luca Loutenbach un certain 28 juin 2021 :
https://img.huffingtonpost.com/asset/60de30a33b00000c43ecb141.png?cache=euuJbrhfKu&ops=scalefit_630_noupscale
Il y pléthore d'intellectuels qui prétendent réfléchir au sens de la vie, mais il est là sous nos yeux il n'y pas besoin de réfléchir pour y parvenir. Ressentir et partager, plutôt que de se regarder le nombril en haut de sa tour d'ivoire,
Mari Yamazaki explique si bien cela :
Quant aux athlètes du monde entier, je compte sur chacun d'eux pour réussir, à travers leurs performances, à communiquer toute la richesse de leur humanité et à exprimer la spécificité de leur parcours de vie. C'est la meilleure manière, selon moi, de donner du courage au plus grand nombre.
Le sport est un merveilleux moyen d'expression inventé par les hommes, au même titre que les arts. Les athlètes s'expriment au moyen du sport. Leurs performances peuvent parfois ne pas être à la hauteur de leurs attentes, le spectacle de leurs efforts suffit à nous émouvoir.
Bien au-delà de la victoire ou de la défaite, le sport comme divertissement de masse peut transmettre des valeurs aussi précieuses qu'elles sont authentiques. C'est là, j'en suis convaincu, que réside sa vérité.
A chaque fois que les champions de Sannô enfonce la tête de leur adversaire, les challengers de Shohokû se relève encore et encore, et au final les deux équipes se rendent coup pour coup. Arrivé à ce niveau la, tout est dans le mental et c'est dans la tête que la lutte continue. Et tout ce qu'ont vécu Akagi, Mitsui, Miyagi, Rukawa et Sakuragi les pousse à aller toujours plus vite, toujours plus haut, et toujours plus fort. Sauf que Sakuragi s'est blessé au dos sur une récupération désespérée en dehors du terrain, et que rapidement il doit prendre une décision cruciale qui risque bien d'impacter toute sa vie : privilégier la possibilité de l'emporter, ou protéger la poursuite de sa carrière…
ATTENTION SPOILERS le mangaka met fin au manga de manière très abrupte, avec un changement de style graphique assez abrupt lui aussi. Les challengers de Shohokû ont sorti de la compétition les champions de Sannô en réalisant le match de leur vie, mais se sont eux-mêmes fait sortir de la compétition par l'Institut Aiwa de manière un peu obscure au 3e tour. On nous présente donc la nouvelle équipe de Shohôku (ainsi que leurs adversaires), avec un Sakuragi en convalescence qui ronge son frein tout en se faisant bolosser par un Rukawa désormais en équipe nationale. FIN SPOILERS
On sait le
Takehiko Inoue tellement sensible et tellement exigeant avec lui-même qu'il finit par craquer sur chacune de ses séries. Mais ici il a fait trop de foreshadowing en amont pour qu'il n'ait pas pensé à poursuivre la série en aval... D'un autre côté il est loin d'être le seul mangaka à avoir arrêté prématurément sa série au milieu des années 1990. Faut-il y voir la main invisible des Marchands du Temple du Weekly Shonen Jump ou un malaise social plus profond ? Dans tous les cas, merci, ô combien merci à l'auteur ne nous avoir offert autant d'émotions en haute définition !!!
Au fil des pages j'ai encore été victime d'hallucinations auditives, et les musiques de Bill Conti pour une célèbre franchise cinématographique consacrée au noble art de la boxe sont une fois de plus rentrées dans ma tête sans prévenir :
https://www.youtube.com/watch?v=PvvDj2fnKoQ