Mais pour cela, l'éducation me semble essentielle. Chaque parent devrait consacrer du temps à bien expliquer aux enfants pourquoi il existe des gens différents, des gens qui ne voient pas, des adultes "en poussette" comme des bébés. Les enfants, chercheurs, véritables philosophes en herbe, veulent comprendre. Le mot "pourquoi" revient sans cesse sur leurs lèvres. Souvent, cette soif de connaissance se heurte à une gêne, et l'indifférence des parents vient détruire cet intérêt. [...] Peut-on y remédier ? C'est difficile. Peut-être ne faudrait-il pas défendre, mais plutôt apprendre à regarder autrement, à comprendre. J'ai vu des enfants changer du tout au tout. par une simple explication, leur façon de considérer devenait plus naturelle, plus amicale, plus vraie. p.70
Nier le corps, loin de s'élever, c'est s'abaisser. Nier le spirituel, même résultat !
Viser l'harmonie entre ces deux dimensions, savoir la gérer, là réside précisément le difficile apprentissage du métier d'homme.
Très tôt j'ai éprouvé la nécessité de comprendre la cruauté que revêtaient parfois les relations entre individus, la précarité de ma condition d'homme.
Je me rappelle toujours cet esprit rebelle à qui je lançais ma salutation habituelle, "Sois sage". Un jour, il me répondit à brûle-pourpoint "Et toi, marche droit !". Cela me procura un plaisir extrême. Il m'estimait pour moi-même, et n'avait pas pris les pincettes que prennent ceux qui me sourient béatement quand, à la caisse, je paie mon paquet de spaghettis aux herbes.
La blessure fondamentale de mon existence réside tout de même dans ce manque d'affection, et je ne puis taire que la distance procède de la maltraitance lorsqu'elle n'est pas naturelle, souple.
Il y a des sourires qui blessent, des compliments qui tuent.
La différence trouble, décontenance l'homme dans son souci de perfection. Quant à la peur, elle le rétrécit.
Très vite, j'eus l'intuition qu'en fuyant le handicap, on s'isole. Il est là, il faut l'accueillir comme un cinquième membre, composer avec lui. Pour ce faire, la connaissance de ses faiblesses me semble primordiale.
On m'a expliqué ,par exemple ,qu'il existe deux effets de la normalité.La normalité peut constituer une stimulation pour la personne qui s'en exclue.Elle suscite en elle le désir de devenir toujours meilleure ,de réduire de plus en plus l'écart qui la sépare des autres.La normalité peut aussi créer la marginalité,exclure....
On m'a appris un jour que "comprendre"au sens hébreu du terme ,signifiait "gouter" "faire l'expérience de".
La connaissance,dans la culture hébraique ,diverge d'un certains intellectualisme ,héritage du monde grec que tu connais beaucoup mieux que moi.Pour les juifs ,se connaitre ,c'est s'imprégner de sa propre histoire pour lui donner un sens ,une signification , faire des expériences.