Ça démarre fort ! chez
Gaelle Josse c'est courant, on a souvent que peu de pages, 215 en l'occurrence pour prendre une grande claque qui en général remet bien les idées en place.
Ce roman pour moi est un livre miroir, un de ceux où les phrases me ressemblent.
Cela commence par un « brule-dehors » parce que tu manques de « rentre-dedans ».
Clara se croyait une « warrior » mais elle est terrassée par un « nightmare » attaquée par des armées de mails, des bombes de sms, puis arrivent juste derrière les drones de petites phrases acides qui volent dans la boite crânienne et étouffent toutes les velléités. En fait il en résulte que pour son job de garantie dans une société de crédit : elle est « fragile », et s'en veut de l'être.
« Elle se déteste d'avoir pensé qu'elle pourrait réussir en faisant les choses à sa manière, sans brutalité, par la seule force de son charisme et de son enthousiasme. »
T'as pris ce boulot pour pas partir parce que ton père à fait un AVC. T'avais une autre idée : voyager pour apprendre le français à d'autres, ailleurs. Cool. Et puis voilà. Faut aider ta pauvre mère. T'as pas le coeur de les laisser.
Alors parce que tout s'accélère trop, tout ralentit, jusqu'à l'arrêt complet du véhicule vitalité. Et bizarrement, c'est maintenant qu'il faudra se serrer la ceinture.
La vie de Clara se déroule comme un rouleau de machine à calculer ses erreurs, ses attentes déçues. Elle s'est pourtant donnée sans compter mais c'est l'heure des comptes et l'addition est lourde. : « Burn-out ». Évidemment en anglais, c'est bien plus sévèrement burné.
Le fait est que t'es dans la merde, celle qui te paralyse, qui t'enfonce dans ton canapé.
Pour t'en sortir, il faudra escalader tes répulsions, gravir tes appréhensions.
Gaëlle Josse m'émeut de son acuité. Il faut avoir digérer mille vies pour restituer celles des autres sans se tromper. Qui lui a dit que plus on est soi, plus on est seul, qu'il faut recomposer avec les autres ? Quelquefois d'ailleurs avec des plus paumés que soi. Pour Clara, c'est à la campagne auprès d'une amie qu'elle va retrouver un peu d'équilibre pour tenir debout.
« Après l'embrassade, elles se regardent, chacune cherchant à deviner quelque chose dans les yeux de l'autre, quelque chose qui échapperait aux mots, quelque chose de caché par cet éclat de joie. »
Ce matin-là, j'ai bien fait de prendre ce livre-là, j'y ai appris un mot démodé, la « reverdie ». le renouveau printanier, c'est joli.
« Mais enfin, Clara, quand cesseras-tu d'en demander toujours plus à la vie ? Je ne demande rien, maman, j'essaie simplement d'arrêter de me brutaliser, je fais ce que je peux. Elle voudrait ajouter que la vie court vite, qu'elle court sur les corps et les visages, qu'elle laboure les coeurs et les âmes, que le temps nous met des gifles jour après jour et que les larmes et les souvenirs creusent d'invisibles rivières, qu'il faut courir vers son désir sans regret et sourire à ce qui nous porte et nous réjouit. »
Bien joué Clara, elle est bien cachée ta douleur derrière ton sourire.
Bien vu Gaëlle, « On ne voit bien qu'avec le coeur, l'essentiel est invisible pour les yeux. » (
St Exupéry)