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Espace Nord (31/12/1996)
3.75/5   4 notes
Résumé :
Ils avaient coupé une partie des sapins de Masure, là-bas, au coude de la Messancy.
L'eau s'en allait en radotant à travers les hautes herbes, parfois engloutie sous le vert, et ailleurs reparaissant en boucles blanches aux arêtes d'un gros caillou, et cela coulait, vaille que vaille, jusqu'aux premières terres de Tige où, alors, la Messancy s'évasait, prise par le barrage rudimentaire qu'on avait construit en aval du moulin.
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique

Il y a tout juste 2 ans, le 17 mars 2017, que j'ai décidé d'adhérer à Babelio. Une décision que je n'ai pas encore regretté une seconde. Bien au contraire, puisqu'elle m'a permis de faire la connaissance d'une multitude de gens intéressants qui partagent ma passion des livres et, parce qu'à travers leurs suggestions et conseils, j'ai fait de nombreuses découvertes et passé maintes heures de lectures agréables et mémorables.

C'est comme cela que grâce à mon amie Cécile, latina sur Babelio, j'ai découvert ét ce roman ėt cet auteur belge. Hubert Juin qui a vécu - avant de déménager à Paris - exactement de l'autre côté de la Belgique que moi : né en 1926 à Athus, près de la frontière luxembourgeoise et française. Quoique j'aie vécu aussi quelques décennies au Grand-Duché de Luxembourg, mais dans un coin moins isolé, rural et rude que l'endroit où est situé son roman de 1966.

C'est bizarre, mais cet ouvrage m'a rappelé "Le sanglier" d'Henri Bosco, que j'ai lu sur la recommandation explicite de Michèle d'Avignon, notre amie oran sur Babelio, la grande experte de l'oeuvre d'Albert Camus. le Prix Nobel avec qui Hubert Juin s'est d'ailleurs lié d'amitié lors de son premier séjour à Paris en 1945-1946 et qui l'a introduit dans le milieu littéraire parisien.

La ressemblance réside principalement dans l'évocation de la nature sauvage et de l'isolation de ses habitants. Quand bien même si le climat est, bien entendu, totalement différent et qu'au Luberon il n'y ait pas de sidérurgie comme à Hagondange par exemple. Autre coïncidence insolite, Henri Bosco a écrit "L'enfant et la rivière" et Hubert Juin nous relate ici l'épisode dramatique de la jeune et maigrichonne Méthilde, portée disparue et retrouvée au bout de plusieurs jours de recherches et pratiquement par hasard dans la nasse de la petite rivière Messancy.

"Le repas chez Marguerite" constitue le quatrième livre d'un cycle de 5 romans, intitulé "Les hameaux". Cycle commencé en 1958 avec "Les sangliers" (autre coïncidence), continué avec "La cimenterie", en 1962, "Chaperon Rouge" l'année après, pour s'achever avec "Les trois cousines" en 1968.

Hubert Juin est l'auteur d'une monumentale biographie, en 3 tomes comptant au total 2050 pages, de Victor Hugo, qui lui a valu le prix Goncourt de la biographie en 1981.

Un autre ami sur notre site, Phil56, a payé un merveilleux hommage à cet auteur et parfaitement expliqué le contenu et la portée de cette oeuvre dans son billet du 27 janvier 2018, que je vous recommande vivement de lire.

Si j'ai fort apprécié, outre l'ambiance spécifique du roman, certains personnages comme le vieux Mathieu du moulin, qui cache éperdument une cécité, et la jeune Marguerite au coeur allègre, je dois avouer avoir souffert un brin sur le vocabulaire ultra riche de Juin et de divers mots qui m'étaient inconnus.

Il est vrai aussi que son style et langage contribuent largement à la haute qualité de ce récit d'à peine 115 pages. L'opus contient une préface enthousiaste du cinéaste wallon, Jean-Jacques Andrien, réalisateur du film "Le Grand Paysage d'Alexis Droeven" de 1981, 8 pages de photos et des notes de lecture par le professeur Michel Otten de l'université de Louvain.

La photo de couverture est du tableau de l'artiste peintre ardennaise, Marie Howet (1897-1984), "Les joueurs de cartes".

Citation amusante pour finir : "Louis Malperon était un idiot, un qui lisait des livres, oui !" (page 42).
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Il y a la Messancy, cette rivière qui s'en va en « radotant à travers les hautes herbes » et qui charrie des charognes.
Il y a les champs, les blés, le colza, les fermes, les vaches.
Plus loin, il y a le village coupé en deux par les usines meurtrières.
Il y a le hameau où les vieux radotent, eux aussi.
Et puis il y a le Mathieu. le Mathieu qui peu à peu perd la vue et s'en veut. le Mathieu qui se souvient du ciel bleu, qui se souvient de Pierre et de Méthilde, et qui prend soin de Marguerite.
Et puis il y a les jeunes, malheureusement…

Instantanés de la vie rurale, mais aussi des premières usines.
Méchancetés. Faiblesses. Un peu de tendresse, rare. Une once d'amitié.

Hubert Juin écrit la rivière, les commérages, les envies violentes, les désirs terribles.
D'une plume truculente, il soupèse et mâche les mots, il triture les phrases, il farcit les verbes d'une infinité de sens, il mélange les temps et les habitudes.
Le terroir, chez lui, n'est pas un dessert sucré, mais une gnôle qui vous arrache le gosier.

« le repas chez Marguerite », c'est comme cela qu'il faut le manger : laisser couler les mots, ne pas réfléchir. S'en imprégner. Et, malgré le drame qui couve, tâcher de ne pas sombrer…

Hubert Juin, mort en 1987, poète et romancier belge, a côtoyé Aragon, Desnos, Char. Il est leur égal.
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Qui se rappelle voire même connaît simplement le nom d'Hubert Juin ?
Au vu du nombre de lecteurs Babeliotes, manifestement fort peu de monde.
Et pourtant, peut-on oublier qu'il a marqué de son influente érudition le monde des lettres, des années 50 jusqu'à son décès en 1987, et ce notamment, en qualité de collaborateur aux "Lettres Françaises", au "Monde", au "Magazine Littéraire", à "La Quinzaine Littéraire" et de producteur à France Culture ?
Il voit le jour en 1926 à Athus, commune du sud de la Wallonie aux confins du Grand Duché de Luxembourg et de la Lorraine française, et, selon la formule consacrée, il n'est pas né avec une cuillère d'argent dans la bouche.
Bien au contraire, issu d'un milieu rural peu favorisé il passe une partie de son enfance chez des grands-parents à la limite de l'illettrisme.
Initié à la lecture par son instituteur, il part en France en 1943 et s'engage dans la résistance.
Après la guerre, il continue à se former une personnalité littéraire propre (poète, essayiste et romancier) influencé par ses contacts avec Camus, Char, Aragon,...
Le repas chez Marguerite, quatrième opus d'un cycle intitulé "Les Hameaux" (cinq ouvrages édités de 1958 à 1968), reste son roman le moins méconnu.
LE CADRE :
Sa région natale (Athus) mi-rurale, mi-industrielle, en pleine évolution/mutation (l'action se situe dans l'entre-deux-guerres).
LES PERSONNAGES PRINCIPAUX :
1) La rivière Messancy, témoin muet des faits et gestes des uns et des autres ;
2) le vieux Mathieu (propriétaire du moulin de moins en moins utilisé, quasi à l'abandon) devient progressivement aveugle. Subtile métaphore d'une société repliée sur elle-même, d'un monde ancien qui disparaît inexorablement ;
3) Pierre, homme des bois venu de nulle part, mi ermite, mi vagabond, plus ou moins contrebandier (le bédéiste Jean-Claude Servais s'en est-il inspiré ?) symbolise quant à lui cet extérieur, cet ailleurs à la fois attirant et inquiétant, potentiellement dangereux pour la cohésion sociale de cette petite communauté ;
4) le café (et Cécile sa tenancière) coeur du village et lieu privilégié des confidences et secrets dévoilés.
LE STYLE
L'écriture d'Hubert Juin pourrait en déconcerter plus d'un (l'imparfait de l'indicatif pour la partie narrative, le présent pour les dialogues).
Pratique littéraire déroutante mais particulièrement opportune pour mettre en avant, en valeur l'intensité des questionnements intérieurs.
Les fréquents retours en arrière temporels peuvent également en perturber d'aucuns.
Mais, une fois en immersion, le lecteur ne peut qu'apprécier :
1) la qualité des descriptions toujours très détaillées et riches d'une brutale sensualité ;
2) la pertinence du regard porté sur les moeurs villageoises, mélange de cupidité, jalousie, frustrations sexuelles, égoïsmes et solidarités ténues ;
3) la fine analyse (nullement pédante ni didactique) d'une société confrontée à ses contradictions :
a) pesanteur des us et coutumes hérités du passé face à l'intrusion de l'extérieur, de la "modernité" ;
b) éternel conflit, abordé sans stéréotypes, entre l'ancienne et la nouvelle génération.
POUR CONCLURE
Hubert Juin, écrivain régionaliste certes mais ni passéiste, ni folkloriste réussit à tendre à l'universel au départ du local à l'instar du cinéma des frères Dardenne.
A relire ou découvrir.
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Video de Hubert Juin (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Hubert Juin
POÉSIE 19e – Qui sont les Petits romantiques ? (France Culture, 1981) Une compilation des émissions « Albatros », par Hubert Juin, diffusées les 26 avril, 3 mai, 10 mai, 17 mai et 24 mai 1981 sur France Culture. Invités : Jean-Luc Steinmetz, Béatrice Didier, Jean Pierrot, Jacques Seebacher, Pierre Barberis Et Michel Le Bris. Poètes évoqués : Hégésippe Moreau, Théophile Gautier, Aloysius Bertrand, Charles Nodier, Marceline Desbordes Valmore, Petrus Borel, Charles Lassailly, Xavier Forneret, Gérard de Nerval, Philotée O'neddy, Alphonse Rabbe et Eliphas Levi.
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