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EAN : 9782221247921
198 pages
Robert Laffont (12/03/2020)
3.4/5   5 notes
Résumé :
Téhéran. Après 2 764 jours passés en prison, un condamné à mort en sursis retourne à l’appartement où il a vécu avec sa femme et tente de reprendre le cours de son existence.
Avide de recouvrer sa liberté, il est pourtant confronté à de multiples obstacles qui l’en empêchent : son statut d’Ennemi de Dieu, qui l’oblige à pointer chaque veille de vendredi au ministère des Renseignements, le sentiment d’être instrumentalisé par des clans antagonistes, mais aussi... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
« Même mort, un mohareb* reste un mohareb. Sans sépulture et sans prières. Sa dépouille ne doit pas souiller la terre des fidèles, surtout là, au cimetière des martyrs. La mort a sa hiérarchie dans ce pays. Il faut en mériter les fastes. » [*ennemi de Dieu]

Nous sommes à Téhéran. Aucune date n'est mentionnée mais l'action se déroule visiblement quelques années après la révolution iranienne.

Après deux mille sept cent soixante-quatre jours d'emprisonnement, le narrateur surnommé Gentleman par ses geôliers car il « était celui qui pour sauver l'honneur de sa femme donnait ses camarades », est libéré. Mais que signifie la liberté dans un pays où tout le monde est sans cesse surveillé, contrôlé, où les droits de l'homme sont bafoués, où la corruption est reine, où la délation est le seul moyen de sauver sa vie ? Notre Gentleman, torturé entre son désir de liberté, son amour de la poésie (dans un pays où c'est considéré comme une condamnation à mort), son rêve d'une vie normale avec sa femme et son désir de vivre, parviendra-t-il à retrouver une place dans cette société ? Jusqu'où serait-il prêt à aller pour rester en vie ?

Etrange livre. J'ai avancé dans l'histoire de manière assez confuse. Les passages entre la vie en prison du narrateur, sa vie avant la prison et celle après la prison s'imbriquent bizarrement et on ne sait pas toujours très bien où l'on se situe, ni surtout où se situe la frontière entre la réalité et l'imaginaire, entre la vérité et le mensonge, entre l'espoir et la désillusion. C'est certes intentionnel de la part de l'auteure mais cela créé un décalage parfois surréaliste. Nous naviguons entre une réalité abrupte, violente et des éléments invraisemblables qui viennent semer le doute. C'est d'autant plus accentué que l'écriture est âpre, sans fioritures, quasi journalistique. Par certains aspects, ce livre m'a rappelé Force ennemie de John-Antoine Nau. Il se divise en trois périodes : Aube, Midi, Crépuscule. « Comme le rituel du soleil sur les murs de la cellule. » Il faut donc attendre le crépuscule pour que les ombres reprennent leur place.
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Téhéran, quelques années après la révolution, un homme sort de prison. Il doit se reconstruire. Peu à peu, Sorour Kasmaï nous fait pénétrer dans l'univers carcéral tissé par les services secrets iraniens. Qu'il soit à l'intérieur de la prison ou à l'extérieur, cet univers enferme un être bien plus sûrement que des barreaux.

Puis, par petites touches, l'autrice nous livre des confidences glaçantes, car écrites sans fards, sans fioritures, sans effet de manche particulier. On est souvent très proche du simple récit, avec des mots simples, des mots de tous les jours. On appelle un chat, un chat chez Sorour Kasmaï, ou plutôt un shah...

Cet homme qui se balade dehors a pourtant été condamné à mort. Et on apprend que sous la torture, il a parlé. Il a tout raconté, des vérités comme des mensonges. Pour sauver sa femme, dit-il. C'est de là qu'il tient son surnom, Gentleman. Hors de la prison, il entame un renouveau. Mais régulièrement la prison et les sévices se rappellent à lui et on revit un épisode passé.

Insidieusement, le voile se déchire. le lecteur se surprend à ne pas croire à cette nouvelle vie. Il doute. Il décèle des invraisemblances. Des failles. Des déchirures.

Aube, Midi, Crépuscule, le roman est scindé en 3 parties. Comme le soleil qui passe entre les barreaux et éclaire vingt mètres carrés d'une cellule où les détenus s'entassent à quarante. le crépuscule, qu'il soit du jour ou de la vie, livre ses réponse et révèle les choses telles qu'elles sont, et non pas telles qu'on les rêve. Sorour Kasmaï en 2 pages finales bouleverse l'ensemble du roman, éclairant les invraisemblances et laminant le lecteur. C'est très fort et inattendu (en ce qui me concerne), dans un roman qui m'a tenu en haleine d'un bout à l'autre.
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Citations et extraits (45) Voir plus Ajouter une citation
-Cette gazelle sera exécutée à l’aube ! Il faut bien la baiser pour que là-haut, au Paradis, elle ne se mêle pas aux autres vierges ! Viens Gentleman, montre-nous comment tu fais ça !
Transi de peur, je tremblais comme une feuille. Je pensais avoir tout connu, avoir atteint le dernier stade de l’avilissement, où on exécute les ordres, où on se laisse commander par le dernier des salauds juste pour pouvoir vivre une minute de plus. Mais maintenant on me poussait encore plus bas. On cherchait à faire de moi un monstre, un animal apprivoisé qui au moindre signe consent aux pires atrocités.
[Aube]
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Depuis que je suis revenu, je ne me suis pas une seconde senti libre. En cellule d’isolement, je croyais qu’il suffirait de mettre le pied dehors pour respirer la liberté. À chaque pas, à chaque mouvement, à chaque bouffée d’oxygène, profiter de l’étrange privilège d’être libre. Mais depuis que je suis là, je n’ai rien ressenti de tel. Suis-je vraiment libre ? Je n’en sais rien. À cet instant, sous la douche, je n’ai qu’une seule envie : laver mon âme de la crasse qui s’y est accumulée, la frotter au gant de crin pour enlever tout ce qui me colle à la peau : trahison, mensonge, humiliation…

[Aube]
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Le petit battant du grand portail s’ouvre. Dehors l’eau chuinte sous les roues des voitures qui ralentissent à l’approche des bosses de contrôle de vitesse. Le soleil n’est pas encore levé et l’asphalte mouillé brille à la lueur des phares. Deux mille sept cent soixante-quatre jours se sont écoulés depuis que, menottes aux poignets et bandeau sur les yeux, on m’a emmené au Château fort sur la colline.
(Incipit)
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Il ouvre le tiroir et en sort un pistolet Beretta et ses cartouches.
-Tu m’as bien dit que tu savais t’en servir, hein ?
Bien sur que je savais m’en servir. Dix-huit mois durant, Beretta à la ceinture, j’ai arpenté sur ma Honda 125 les rues de Téhéran, me croyant invincible. Jusqu’au jour où je me suis fait épingler comme une mouche, sans même avoir eu le temps de dégainer.

[Midi]
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-C’est affreux ! Je ne comprends pas les gens qui assistent à ça en famille.
-Où veux-tu qu’ils aillent ? En l’absence de bon théâtre et cinéma, ils vont aux exécutions publiques. C’est un spectacle inoubliable. En plus, c’est gratuit ! Les familles nombreuses en profitent.

[Aube]
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Vidéo de Sorour Kasmaï
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