J'avais repéré cette nouvelle il y a quelques temps, l'enfermement étant un sujet qui, ne me touchant pourtant personnellement ni de près ni de loin, m'intéresse depuis longtemps. C'est seulement récemment que je me suis aperçue que cette nouvelle, disponible uniquement en format numérique, n'était pas bloquée par des DRM ou autre marquage, et que donc je pouvais me laisser aller à la télécharger. Elle est de plus disponible gratuitement, ce qui ne gâche rien.
Après ce long préambule, je me mets à la lecture, rapide, de cette nouvelle. Celle-ci nous amène dans la tête d'un prisonnier qui arrive au bout de sa vingtième année de réclusion, autant de vie derrière les barreaux que dehors…
Il n'est pas question de juger ici, juste de ressentir, et pour cela, la forme retenue est tout à fait adéquate, en petites pensées qui s'égrainent au fil des heures. Des questions intéressantes, sur ce que veut dire une vie sans interaction sociale, une vie en marge des changements sociaux et politiques, une vie sans perspective d'aucun accomplissement.
Mais voilà autant de sujets intéressants, profonds, que cette nouvelle d'à peine vingt pages très aérées ne fait qu'effleurer, laissant le lecteur au seuil d'une réflexion, avec des généralités déjà vues ou entendues. En définitive, si le choix du sujet est intéressant, les contraintes de la nouvelle ne conviennent pas à son traitement, et je suis plus frustrée que satisfaite par cette lecture. Certes, je ne m'attendais pas à un nouveau Suerte, livre qui m'avait scotchée (si je peux me permettre cette expression, qui s'applique bien ici : je me souviens avoir fini ce livre à Holbox, effectivement scotchée par cette lecture sur ma chaise longue au bord de la plage…), mais j'espérais un peu plus de cette nouvelle qui reste à mon avis trop à la surface des choses.
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Un homme raconte sa nuit blanche. Lucide.
Au lever du jour, les rayons du soleil ne seront plus barrés.
Une nouvelle légère, très fine. Un questionnement rapide et sensé sur la notion de liberté. Pas besoin de s'étaler sur la technicité, la plume avertie, et tout ce qui s'en suit. Un commentaire court pour préserver cette image sensible de la réalité.
« Une différence essentielle sépare les gens libres des autres : les premiers rêvent du ralentissement du temps, les seconds espèrent son accélération » P4.
Sans les murs, l'individu libre étonnamment ne se demande pas toujours comment va le monde dans l'écoulement du temps. Beaucoup s'en moquent. Vraiment. Combien d'actions de l'autre côté du miroir sont souvent tout aussi ridicules que celles commises par les détenus ? Il ne s'agit pas que de considérations géo-politique internationales ou du vieillissement des choses et des gens… Peut-être que celui qui reste immobile s'en rend mieux compte pour comprendre la valeur de l'essentiel. Se prendre pour Socrate inconsciemment ou non. L'autre, soi, la beauté qui nous entoure et toute la panoplie philosophique. le but n'est pas, non plus, de s'étendre sur le débat : la justice punitive, la sévérité, le crime et le délit. Tout est déjà très bien maîtrisé, enfin je crois.
Le lecteur découvrira surtout une plus grande simplicité. Cette découverte du livre qui est libératrice. À tout individu pris en compte dans la société. Sans classification. le livre libère, il est l'universalité indomptable. Ce qui est paradoxal ou absurde c'est que des individus libres, ignorés comme des cons damnés, sont « emprisonnés » en dehors des quatre murs, de l'autre côté du miroir d'un condamné. En somme, pas besoin de barreau pour rencontrer le monde qui nous ignore.
«Ici, ce dont on rêve, c'est de tout ce qu'on n'a pas. Et ce qu'on n'a pas se trouve nécessairement ailleurs » P9
Ne rêvez-vous pas de ce que vous ne pouvez pas toujours avoir ?
Ô littérature, je ne suis pas digne de te recevoir mais donne moi seulement un livre et je serai guéri.
Une nouvelle pure, à lire.
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Et pourquoi je ne postulerais pas dans une bibliothèque ?
[...] En fait, je n'ai jamais mis un pied dans une autre que celle d'ici. Ça pourrait le faire. Je tenterai ma chance. Au début, je pourrais toujours ranger les livres. C'est un métier d'avenir, ça. Des livres, y en aura toujours, non ?
Le plus étrange dans une longue attente, c’est qu’une fois que ça se termine, on ne se rend plus bien compte du temps que ça a duré.
(p. 13, “03:30”).
Accompagner Phileas Fogg, Passepartout et Mademoiselle Aouda dans ces contrées inconnues me procurait une sensation de liberté indescriptible. Peu
m'importait le livre, l'auteur, le héros, l'époque ou le lieu. Un jour, j'étais perdu en mer avec un vieil homme et un espadon, le lendemain, voyageant dans un train avec un détective, plus tard, naufragé sur une île avec des indigènes… Avec eux, je me sentais libre. Peut-être plus que je ne l'avais jamais été.
On ne nous place pas ici pour ça mais personne n'a les moyens de nous empêcher de rêver. C'est notre ultime liberté. Alors, on ferme les yeux. Et on attend que ça vienne.
Le Belge - Une journée à l'imprimerie avec Edgar Kosma et Pierre Lecrenier
Une journée à l'imprimerie avec Edgar Kosma et Pierre Lecrenier, auteurs de la BD "Le Belge" (en librairie le 6 novembre 2013 aux Éditions Delcourt). http://www.editions-delcourt.fr/catalogue/bd...