...Deux ou trois jours après son installation à Sakkara, alors qu'il se trouve mètre en main, entre deux puits examinant un fragment de stèle portant un graffiti, il aperçoit, à peu de distance, émergeant du sable, une tête humaine ! Elle lui rappelle aussitôt les têtes de sphinx de calcaire, qu'il a remarqués à Alexandrie, chez Zizinia, et ensuite au Caire, chez Linant de Bellefonds, à l'école polytechnique et dans les réserves de Fernandez.
Ces statues, taillées dans le calcaire de Mokattam, venaient toutes, lui a-t-on affirmé, de Sakkara.
C'est bien un Sphinx saïte, semblable aux autres, qui se trouve devant lui. Un de plus. Mariette pense immédiatement à une allée de sphinx, semblable à cette que l'expédition de Bonaparte a décrites dans la vallée. On serait donc dans le voisinage d'un temple ! ...
A bord du vapeur, la cabine avant, réservée aux hommes, est obscurcie par la fumée des narguilés. Mariette s'installe sur le pont. Au décor gris, un peu monotone du canal a fait place un paysage varié, coloré, verdoyant. Palmiers, sycomores, tamaris jaillissent des bouquets de roseaux. Des fellahs travaillent dans l'eau jusqu'à la taille.
Le soleil couchant teinte de mauve un ciel cristallin. Le navire passe au large d'îles survolées par des cygnes sauvages, des échassiers inconnus, des aigles, des pigeons, des migrateurs, des tourterelles. Des huttes de pêcheurs apparaissent, un puits, une file de dromadaires, et tout à coup, dans une boucle du fleuve, un couvent fortifié, de couleur ocre - ou un tombeau blanc. Des felouques à voiles triangulaires glissent lentement, surchargées de passagers qui agitent les mains en signe de bienvenue. Témoignage de l'étonnante gentillesse des Egyptiens à l'égard des étrangers.....
Mariette joue son avenir sur une intuition et retrouve un temple perdu d'Apis. Il perce le mystère du Grand Sphinx.