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EAN : SIE59253_68
Les Editeurs Français Réunis. (30/11/-1)
3.9/5   10 notes
Résumé :
Ugla, une jeune fille sans éducation de la campagne, se rend du nord de l'Islande à la capitale, Reykjavik, afin de travailler pour Bui Arland, un membre du parlement, et apprendre à jouer de l'orgue. Elle rencontre un monde qui est lui complètement étranger : les politiciens et les militaires se déplacent aisément dans la ville et elle considère les habitants de la ville gâtés, snobs et arrogants. Elle vient en effet d'une région rurale où les gens discutent et réf... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Ce soir je voudrais vous parler d'un livre insaisissable. Mais qu'est-ce qu'un livre insaisissable ? Est-ce un livre qu'on sort de sa bibliothèque et qui brusquement glisse des mains comme une savonnette sous la douche ? Ou bien peut-être serait-ce un livre, qu'une bibliothécaire bien inspirée au sein de ma médiathèque préférée, tendrait du haut de ses deux mètres vingt, de sa main tout aussi inspirée au-dessus de ma tête en me disant: « allez, Berni, viens le chercher ! »
Alors, je suis allé le chercher sans entrave, d'autant plus que c'est une amie brestoise de notre chère communauté de Babelio que je fréquente régulièrement en tête-à-tête devant un thé ou une bière, qui me l'a conseillé et même offert, livre issu d'une librairie solidaire de Brest et qui devrait continuer de cheminer de la même manière. Grand merci Isa (Isacom pour les Babeliotes).
Station atomique est un roman écrit en 1948 par un certain Halldór Laxness. Si vous allez chercher à quoi il ressemble sur Babelio, vous tomberez sur un type au visage hilare. J'adore. Halldór Laxness a reçu le prix Nobel de littérature en 1955. Respect.
C'est un roman marqué par tant de singularités.
J'ai été tout de suite pris en empathie par le charme désuet de la personnage principale, comme si elle était déjà une amie. Elle s'appelle Uggla. Elle m'a accompagné durant toute cette lecture.
Et ce qui m'a agréablement étonné fut cet écrivain qui donna sa voix à cette jeune femme. Et quelle voix !
Nous sommes en Islande, dans les années qui suivent la fin de la seconde guerre mondiale. le titre évoque le climat de la guerre froide qui s'ensuivit. La menace de l'arme atomique. À cette période, l'Islande fut un territoire qui représentait un enjeu stratégique sur le plan géopolitique, en particulier pour les États-Unis qui avaient des convoitises pour ce territoire. D'ailleurs, le premier ministre Islandais d'alors était prêt à leur "vendre" son pays...
Uggla, une jeune femme originaire des rudes vallées du nord, est engagée comme domestique dans une des plus riches et influentes familles bourgeoises de Reykjavík. D'ailleurs, la famille est celle d'un député, plus précisément député conservateur, mais son épouse l'ait encore plus que lui...
Lorsque Uggla descend de ses collines ancestrales pour aller vers la capitale, elle est encore hantée par les sagas, ces contes mythologiques qui forgent depuis sept cents ans l'univers des Islandais.
Uggla vient chercher un emploi qui lui permettra de financer la reconstruction d'une église, celle pour son père, pasteur là-bas. C'est aussi pour elle l'occasion de parfaire son éducation et d'apprendre l'orgue.
Uggla va découvrir un nouveau mode de vie et se confronter aux inégalités sociales de son pays. Mais ce serait injuste que de réduire le roman à ce seul aspect.
La richesse du roman réside dans ses variations autour de ce joli personnage qu'est Uggla, jeune fille généreuse, attachante, sa candeur permet d'explorer des univers qui lui sont totalement inconnus. Grâce à cette candeur, l'auteur pose un regard détaché sur des sujets de fond, qui touchent l'Islande d'alors, mais aussi le monde d'aujourd'hui.
Insaisissable, ce roman l'est, tout autant qu'Uggla.
Lorsqu'elle comprend les choses, elle s'étonne et s'indigne. J'aime les personnages qui s'étonnent et s'indignent. Dans la vraie vie aussi...
Uggla est belle lorsqu'elle s'indigne contre les puissants, les religieux, les politiciens, les hommes avides de désir...
De temps en temps, le roman prend un pas de côté vers des personnages invraisemblables que l'on pourrait croire issus de l'imaginaire d'Uggla, issus des fameuses sagas, un poète atomique appelé « Benjamin », un professeur d'harmonium, un jeune et beau dieu qui s'appelle « Brillantine », séducteur et charmant. J'ai aimé les dialogues entre ces personnages, des échanges profondément poétiques et rattachés aux grandes questions de l'existence.
J'ai aimé le discours engagé qui se faufile dans le récit, sur les questions sociales, politiques, religieuses...
Il émane de ce récit un très grand humanisme, une bienveillance pudique, mais chaleureuse.
Insaisissable est le mot, comme le destin d'Uggla, éprise de générosité. Est-ce un roman réaliste ? Je continue de me le demander, mais cela n'a peut-être pas d'importance...
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« Gens indépendants » de Halldor Laxness m'avait ravie, tandis que j'ai abandonné « La cloche d'Islande ». « Station atomique » m'a déroutée. Ce qui est sûr, c'est que cet auteur ne laisse pas indifférent.

Nous sommes en Islande, dans les années 1950, peu de temps après l'indépendance du pays. La guerre froide frappe aux portes de l'île par l'entremise des Américains voulant installer une station, sorte de poste d'observation qui deviendrait très vite instrument de dissuasion pour la Russie. La situation géographique de l'île est trop avantageuse pour que les Américains laissent passer cette chance de s'y implanter pour une durée voulue de 70 ans…
Des groupuscules et associations se forment pour s'opposer à une décision que les politiques corrompus tentent de faire passer. « Ils veulent vendre le pays ! ».
Sur fond de ce contexte historique, l'auteur découpe la société en deux parties distinctes qui se côtoient sans se mélanger : le peuple constitué de la paysannerie, pêcheurs, domestiques, ouvriers, et la grande bourgeoisie soucieuse de maintenir ses privilèges et grand soutien de la classe politique.
La bonne idée est que l'auteur nous dépeint cette période par les yeux de la jeune Uggla, fille de pasteur du nord de l'île, venue travailler à la capitale, au sud. Comme dans tous pays, le Nord et le Sud s'affrontent. Ici, le Nord est fier de ses traditions et le Sud désireux de rattraper son retard économique et technique.

Tout cela est fort intéressant mais ce qui m'a déroutée, ce sont quelques personnages secondaires. On dirait qu'ils sont sortis d'un conte. Je n'ai pas trop compris ce qu'ils étaient, fantaisistes, farfelus, intellectuels ou philosophes ? Mais il semble qu'ils aient une place importante dans le roman car ils sont présents du début à la fin.

A part ça, la lecture m'a quand même été profitable pour la grande Histoire de ce pays bien envoûtant.
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Uggla est la narratrice : "Moi j'étais robuste et je venais de la campagne." Elle arrive du Nord de l'Islande pour être domestique chez un parlementaire, elle a été nourrie de sagas, et elle veut apprendre l'harmonium.
C'est un roman d'amour : elle aime, elle hésite, elle résiste à la tentation pour préserver sa liberté.
Mais en fait, non : c'est un roman comique présentant avec humour une galerie de personnages improbables comme le poète atomique, le dieu Brillantine ou Cent-Mille-Tenailles - et Cléopâtre.
Mais en fait, non : c'est un roman qui parle du patrimoine islandais en racontant les tentatives pour rapatrier les ossements du poète national, "l'Enfant chéri", malencontreusement mort au Danemark cent ans plus tôt.
Mais en fait, non : c'est un essai politique, qui par le biais de la fiction retrace le combat des communistes islandais contre le gouvernement corrompu et sa collusion avec le grand capital.
Mais en fait, non : c'est un pamphlet nationaliste qui accuse le gouvernement de vouloir vendre le pays aux Américains. "Vous pouvez nous laisser mourir de faim, nous chasser de nos maisons ; nos ancêtres n'habitaient pas dans des maisons, mais dans des huttes de terre et pourtant ils étaient des hommes. Tout, tout, tout, excepté cette seule chose : ne pas remettre en des mains étrangères les droits nationaux, pour lesquels nous avons lutté pendant sept cents ans, avant de les recouvrer."
Mais en fait, non : c'est un roman pacifiste en temps de Guerre froide, militant contre la terreur atomique - et contre la base militaire que souhaite implanter l'armée américaine.
Mais en fait, Station atomique est tout cela et plus encore : Laxness fait tout passer avec son écriture pleine d'humour et de poésie loufoque (ici traduite inégalement par Jacqueline le Bras).
C'est la troisième oeuvre de Laxness que je lis, et à chaque fois je la trouve encore meilleure que la précédente. Plus je lis Laxness, et plus je l'aime.
Challenge Nobel





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Station atomique est un chef-d'oeuvre de commentaire social aussi pertinent aujourd'hui que lorsqu'il a été écrit en 1948. Certains lecteurs auront peut-être du mal à ressentir cela à propos du portrait que Halldór Laxness dresse de la Reykjavik d'après-guerre, un foyer d'arnaqueurs, de nouveaux riches et de communistes dans la première vague d'idéalisme.
Mais les ouvertures des Yankees pour construire une centrale nucléaire en Islande font étrangement écho aux aventures impérialistes de la superpuissance solitaire d'aujourd'hui. le Premier ministre idiot de Laxness, dans une tirade ivre, défend sa décision de vendre le pays : "Qu'est-ce que l'Islande pour les Islandais ? Rien. Seul l'Ouest compte pour le Nord. Nous vivons pour l'Ouest ; nous mourons pour l'Ouest ; un Ouest . Petite nation? - saleté. L'Est sera anéanti. le dollar restera.'

Dans ce monde corrompu arrive Ugla, une fermière robuste, qui a voyagé vers le sud pour travailler comme femme de ménage dans la maison d'un parlementaire.
'Vous devez me pardonner si je suis un peu lente à comprendre', dit-elle.
'Je viens de la campagne'.
Nous avons ici l'un des dispositifs les plus fiables de la satire : l'ingénue enregistrant ses impressions sur une société folle. Mais Ugla est un personnage séduisant et volontaire, et Laxness ne la garde pas crédule trop longtemps; son admiration pour le raffinement de ses hôtes se dégrade rapidement. La maîtresse de maison est assez folle dans sa peur des communistes bestiaux. le fils aîné va être ramené chez lui, couvert de ses propres vomissures, par la police. La fille aînée, malgré tout ce qu'elle peut faire avec les impromptus de Chopin au piano, se révèle être une coquine autodestructrice. le parlementaire, bien que sympathique, est compromis par ses associations douteuses. À la fin de ce conte picaresque, Ugla a appris une leçon très opportune : chaque fois qu'un gouvernement proteste bruyamment que son programme est honorable, les trahisons de la confiance du public ne tardent pas à suivre.
Aussi sombre et satirique que soit Station atomique, le riche sens de l'humour, l'empathie et la croyance en une force vitale rédemptrice de Laxness transparaissent. Comme Ugla, Laxness a eu une enfance rurale plongée dans les sagas, puis a exploré le monde plus large, séduit par de nombreuses idéologies politiques et confessions religieuses. Station atomique est l'oeuvre de quelqu'un qui a vu chaque rêve chéri vendu sur le fleuve, mais qui aime trop l'humanité pour en désespérer. Son héroïne refuse d'être intimidée ou achetée, une féministe avant l'heure, pleine de curiosité et d'entrain.
Lien : http://holophernes.over-blog..
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Comme j'allais passer la porte, elle me rappela :
- Quelles sont vos opinions ?
- Mes opinions, à moi ? Je n'en ai pas.
- C'est bien, ma chère, dit-elle. J'espère que vous n'êtes pas de celles qui sont toujours penchées sur un livre.
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Autrefois, du temps où nous connaissions Dieu et non pas l'homme, ce n'était pas difficile d'élever des enfants. Mais à présent le Dieu, le seul que nous connaissions, nous a trahis. Il ne reste plus que l'homme, cet inconnu.
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J’ai habité dans une ferme toute mon enfance : celui qui veut peindre la ferme n’a pas besoin de commencer par le toit de chaume. Il faut qu’il commence par l’intérieur, non par l’extérieur. Il faut qu’il montre d’abord la vie de ceux qui y habitent.
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Comment est-ce qu'une fille comme moi pourrait vivre ? Les gosses vont me crier des injures, à l'école. Ma mère va me tuer, à New-York. Le ministre va me vendre à un bordel de Rio de Janeiro et mon grand-père aimera mieux perdre sa fabrique d'huile de hareng, que de voir ça.
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Comme toujours, quand il y a un meurtre, on n'en parla que très peu dans les journaux, afin de ne pas offenser le meurtrier et sa famille - jusqu'au jour où l'on eut l'idée lumineuse d'accuser du meurtre un nègre américain inconnu, parce que ça n'a pas d'importance d'offenser un noir américain et sa famille.
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