LA NUIT | SI JE NE DORS PAS…
La nuit
si je ne dors pas
les deux chevaux dans ma tête
ne dorment pas non plus.
J’écoute leurs monologues
inconciliables et parie sur qui
des deux le premier se lassera
des mêmes radotages.
Cheval des heures enfuies
cherche à comprendre
pourquoi l’herbe
n’a pas été meilleure
à son palais
et pourquoi l’issue
des courses lui fut
si défavorable.
Cheval des lendemains
qui auraient chanté
entonne la leçon
sempiternelle
facile pour lui
de s’en laver les mains
avec des si
on refait le monde.
Souviens-moi
VIII
Souviens-moi
longuement
à bouche bue
de la blancheur des mains
sur un livre
et toujours souviens-moi
à peau éprise
du lierre des mots
oubliés
Oui
Souviens-moi
inlassable
d’un désir enroulé
à la langue
d’algues brunes.
Souviens-moi
VII
Souviens-moi
Souviens-moi
avec l’âge qui avance
inexorable et patient
souviens-moi des laisses de goémon
et de l’huître ouverte
dans un ciel d’écailles
Inlassable
Souviens-moi
d’une cadence
de hanche étroite
Souviens-moi
VI
Souviens-moi
Souviens-moi
d’un triangle nu
à l’encolure des chemises
souviens-moi
des pluies fades
et du vent mou
qui aiguisent le chagrin
Inlassable
Souviens-moi
des gestes fiancés
au premier soir
Souviens-moi
I
Souviens-moi
à voix basse
de l’ombre encore
dans l’enclos
et toujours
souviens-moi
les yeux mi-clos
du jours dehors
prêt à bondir
Oui
Souviens-moi
inlassable
de la clairière du poème