Citations sur Si c'est un homme (777)
Aussi pourra t-on se demander si l'on doit prendre en considération un épisode aussi exceptionnel de la condition humaine, s'il est bon d'en conserver le souvenir.
Eh bien, nous avons l'intime conviction que la réponse est oui. (p133 - édition Pocket)
Ils sont pris de vitesse : lorsque enfin ils commencent à apprendre l'allemand et à distinguer quelque chose dans l'infernal enchevêtrement de lois et d'interdits, leur corps est déjà miné, et plus rien désormais ne saurait les sauver de la sélection ou de la mort par faiblesse. Leur vie est courte mais leur nombre infini.(...) On hésite à les appeler des vivants : on hésite à appeler mort une mort qu'ils ne craignent pas parce qu'ils sont trop épuisés pour la comprendre.
Le sentiment de notre existence dépend pour une bonne part du regard que les autres portent sur nous: aussi peut-on qualifier de non-humaine l'expérience de qui a vécu des jours où l'homme a été un objet aux yeux de l'homme.
La conviction que la vie a un but est profondément ancrée dans chaque fibre de l'homme, elle tient à la nature humaine.
Le sentiment de notre existence dépend pour une bonne part du regard que les autres portent sur nous: aussi peut-on qualifier de non humaine l'expérience de qui a vécu des jours où l'homme a été un objet aux yeux de l'homme. Et si nous nous en sommes sortis tous trois (....), nous devons nous en être mutuellement reconnaissants....
Survivre sans avoir renoncé à rien de son propre monde moral, à moins d’interventions puissantes et directes de la chance, n’a été donné qu’à un tout petit nombre d’êtres supérieurs, de l’étoffe des saints et des martyrs
Je crois que c'est à Lorenzo que je dois d'être encore vivant (...) pour m'avoir constamment rappelé, par sa présence, par sa façon si simple et si facile d'être bon, qu'il existait encore, en dehors du nôtre, un monde juste, des choses et des êtres encore purs et intègres que ni la corruption ni la barbarie n'avaient contaminés, qui étaient demeurés étrangers à la haine et à la peur; quelque chose d'indéfinissable, comme une lointaine possibilité de bonté, pour laquelle il valait la peine de se conserver vivant.
Vous qui vivez en toute quiétude
Bien au chaud dans vos maisons,
Vous qui trouvez le soir en rentrant
La table mise et des visages amis,
Considérez si c'est un homme
Que celui qui peine dans la boue,
Qui ne connaît pas de repos,
Qui se bat pour un quignon de pain,
Qui meurt pour un oui ou pour un non.
Considérez si c'est une femme
Que celle qui a perdu son nom et ses cheveux
Et jusqu'à la force de se souvenir,
Les yeux vides et le sein froid
Comme une grenouille en hiver.
N'oubliez pas que cela fut,
Non, ne l'oubliez pas :
Gravez ces mots dans votre cœur,
Pensez-y chez vous, dans la rue,
En vous couchant, en vous levant ;
Répétez-les à vos enfants,
Ou que votre maison s'écroule,
Que la maladie vous accable,
Que vos enfants se détournent de vous.
(...) c'est justement, disait-il, parce que le Lager est une monstrueuse machine à fabriquer des bêtes, que nous ne devons pas devenir des bêtes; puisque même ici il est possible de survivre, nous devons vouloir survivre, pour raconter, pour témoigner; et pour vivre, il est mportant de sauver au moins l'ossature, la charpente, la forme de la civilisation. Nous sommes des esclaves, certes, privés de tout droit, en lutte à toutes les humiliations, voués à une mort presque certaine, mais il ous reste encore une ressource et nous devons la défendre avec acharnement parce que c'est la dernière : refuser notre consentement. Aussi est-ce pour nous un devoir envers nous-mêmes que de nous laver le visage sans savon, dans l'eau sale, et de nous essuyer avec notre veste.
Notre sagesse, c'était de "ne pas chercher à comprendre", de ne pas imaginer l'avenir, de ne pas nous mettre en peine pour savoir quand et comment tout cela finirait, de ne pas poser de questions, et de ne pas nous en poser.