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Citations sur Le peuple d'en bas (Le peuple de l'abîme) (92)

Chapitre 15 : l'épouse de la mer. Page 150


Ces paysans stupides qui à travers le monde soutiennent les potentats sur leurs trônes font la gloire des hommes d'Etat, fournissent des victoires durables aux généraux, tout cela dans l'anonymat, l'indifférence ou une haine idiote, faisant bouger l'univers à la force de leurs armes, se battant au nom de Dieu, du roi ou de la Bourse, ne sont que des ânes éternels, rêveurs, sans espoir, qui confient leur raison à un pantin de pacotille et qui arrivent à convaincre un jouet quelconque de se promener avec leurs vies dans sa bourse.

Stephen Crane
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L’Angleterre est le paradis du riche, le purgatoire du sage et l’enfer du pauvre.
"Théodore Parker"

Les enfants du ghetto possèdent tout ce qu’il faut pour faire des hommes et des femmes de caractère, mais le ghetto, comme un tigre en folie, s’acharne sur sa jeunesse, l’écrase et détruit en elle ses qualités, éteint toute lumière et toute joie, et finit par transformer ceux qu’il n’arrive pas à détruire en créatures stupides, sans avenir, grossières et avilies, très proches de la bête.


Le chagrin et la misère sont aussi deux causes puissantes pour déranger le cerveau et conduire les gens soit à l’asile d’aliénés, soit à la morgue ou encore à la potence. Lorsqu’un accident arrive, et que le père ou le mari, malgré tout l’amour qu’il porte à sa femme et à ses enfants, malgré sa volonté de retravailler, n’arrive pas à se réemployer, il suffit de peu de chose pour que sa raison chancelle et que la flamme de son cerveau vacille.

Quand on parque les travailleurs dans le ghetto, ils n’échappent pas à la déchéance. Une nouvelle race, maladive et mal lotie, prend la place de l’autre : c’est le peuple du pavé, qui est abruti et sans force. Les hommes ne sont plus que des caricatures d’eux-mêmes, leurs femmes et leurs enfants sont pâles et anémiés, leurs yeux sont cerclés de noir, ils ont le dos voûté et traînent la savate, et deviennent très vite rachitiques, sans grâce et sans beauté. Et pour corser l’affaire, les hommes du ghetto sont ceux dont personne ne veut – c’est une souche déracinée qu’on abandonne jusqu’à la plus complète pourriture.

Dès qu’un homme solide et bien bâti devient adulte, on l’oblige à s’engager dans l’armée. Un soldat, comme l’a écrit Bernard Shaw, est « soi-disant un défenseur héroïque et patriotique de son pays. En réalité, c’est un malheureux, conduit par la misère à offrir son corps aux obus, contre une nourriture régulière, un toit et des vêtements


À Londres, le massacre des innocents se fait sur une échelle bien plus grande que tout ce qu’on a pu voir jusqu’alors dans l’histoire mondiale. Ce qui est étonnant, aussi, c’est le manque de cœur des gens qui croient au Christ, qui vénèrent Dieu, et vont régulièrement à l’église chaque dimanche. Le reste de la semaine, ils se démènent comme de vrais diables pour faire rentrer loyers et bénéfices qui leur arrivent tout droit de l’East End, entachés du sang des enfants du ghetto.


Je suis incapable de raconter le dixième de ce que j’ai pu voir, presque tout défiant la narration. J’ai vraiment vécu un cauchemar – j’ai vu cette sorte de bave visqueuse qui englue le pavé nocturne, j’ai vu ce déferlement sans nom de saletés misérables qui laissent loin derrière elles toute l’« horreur de la nuit » qu’on peut éprouver à Piccadilly ou sur le Strand. La nuit, l’East End ressemble à une ménagerie de bipèdes habillés, qui tiennent plus de la bête que de l’homme. Pour achever le tableau, des gardiens en uniforme à boutons dorés s’efforçaient de faire régner un semblant d’ordre en intervenant chaque fois que l’un de ces malheureux grondait de façon trop féroce.


J’ai la certitude que, si le Tout-Puissant avait voulu une catégorie d’hommes seulement destinés à manger et non à travailler, il les aurait faits avec des bouches, sans bras ; et que, s’il avait eu l’idée de créer des travailleurs qui ne mangent pas, il les aurait faits sans bouche, avec leurs seuls bras. "Abraham Lincoln"


Aucun des responsables de cette classe de gestionnaires ne peut plaider non coupable à la barre du tribunal de l’Humanité. Les vivants dans leurs maisons – les morts dans leurs tombes 1. Cette toute petite notion de bon sens est remise en question par chaque bébé qui meurt de malnutrition, par chaque jeune fille qui s’enfuit de l’atelier où on l’exploite pour arpenter la nuit les alentours de Piccadilly, par chaque travailleur sans emploi qui, désespéré, plonge dans le canal pour y trouver la mort. La nourriture même que cette classe dirigeante mange, le vin qu’elle boit et tout l’étalage des beaux vêtements qu’elle porte sont un défi aux huit millions de bouches qui n’ont jamais mangé à satiété, et aux seize millions de corps qui n’ont jamais pu bénéficier de vêtements corrects ou de logements suffisants. Aucune erreur n’est possible. La civilisation a centuplé le pouvoir de production de l’humanité et, par suite d’une mauvaise gestion, les civilisés vivent plus mal que des bêtes, ont moins à manger et sont moins bien protégés de la rigueur des éléments que le sauvage inuit, dans un climat bien plus rigoureux. Il vit, aujourd’hui, comme il vivait à l’âge de la pierre, il y a plus de dix mille ans.
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On peut croire le révérend J. Cartmel Robinson lors- qu'il affirme que, dans une rue de Hoxton (un district du grand East End), plus de sept cents enfants de cinq à treize ans vivent dans quatre-vingts maisons minuscules. Il ajoute : "C'est parce que Londres a, dans une grande mesure, cloîtré ses enfants dans un dédale inextricable de rues et de maisons et leur a volé le droit légitime de chaque être humain au soleil, à la campagne et aux ruisseaux que tous ces enfants, en grandissant, deviendront des hommes et des femmes diminués physiquement." (p.195)
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Les déchets et les inutiles ! le misérable, celui que l'on méprise ou que l'on oublie, s'en vient mourir dans cet abattoir social, résultat de la prostitution. Prostitution de l'homme, de la femme, de l'enfant, de la chair et du sang, de l'intelligence, de l'esprit - prostitution du travail. Si c'est là tout ce que la civilisation peut offrir à l 'homme, alors cent fois l'état sauvage, la nudité et la brousse, cent fois la tanière et la caverne, plutôt que cet écrasement par la machine, et par l'Abîme.
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Les temps ont bien changé, hélas! Lorsque j'étais enfant, je lisais des histoires de gosses sans abri qui dormaient sur le seuil des maisons. Mais ça c'est déjà devenu du roman. On en parlera dans la littérature pendant tout le siècle à venir, comme d'un vague souvenir; en réalité, les choses ne se passent plus du tout ainsi. Il y a d'un côté les seuils des maisons, de l'autre les enfants, mais on ne voit plus jamais réunies ces deux conditions : les seuils des maisons restent vides, les enfants ne dorment plus.
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La majorité des hommes, non, la totalité d'après ce que j'ai pu en voir, détestent l'asile et n'y vont que par nécessité. Après leur "repos", ils sont bons pour deux ou trois jours et autant de nuits à traîner dans les rues, jusqu'à ce que le besoin d'un nouveau "repos" les ramène sur le chemin de l'asile. Naturellement, ces ennuis continuels détruisent leur constitution et ils en ont une vague notion. Mais ils pensent que cela fait partie des choses normales de l'existence, et ils ne s'en font pas pour si peu.
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Folie passagère ! Ces deux mots sont maudits, ce sont des mensonges du langage derrière lesquels les gens qui ont le ventre plein et le dos bien au chaud, sous leurs belles chemises, s'abritent et se soustraient à la responsabilité de leurs frères et de leurs sœurs, qui, eux, ont le ventre vide et n'ont pas de belles chemises à se mettre.
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Si l'on considère impartialement l'Inuit moyen et l'Anglais moyen, on voit immédiatement que la vie est plus clémente pour l'Inuit. Tandis qu'il ne souffre de la faim que pendant les moments vraiment critiques, l'Anglais, lui, en souffre toute sa vie ...
L'Inuit ne manque jamais de combustible, de vêtements ni de maisons, tandis que l'Anglais, lui, est toute sa vie à la recherche de ces trois éléments indispensables.
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chaque bébé naît avec une dette de vingt-deux livres, due à un artifice qui s'appelle la Dette Nationale.
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Il est très désagréable, quand on a faim et qu'on n'a pas d'argent, d'envisager de passer la nuit à la belle étoile.
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