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Florence Blandin (Traducteur)
EAN : 9780714891446
128 pages
Phaidon (22/06/2001)
3.58/5   6 notes
Résumé :

Julia Margaret Cameron (1815-1879) a presque cinquante ans - et est autodidacte - lorsqu'elle se met à la photographie ; néanmoins, les portraits qu'elle réalise comptent parmi les plus innovants et les plus marquants de l'époque. Son utilisation inédite de la lumière et de la mise au point transforme l'art du portrait et contribue à faire de la photographie un art expressif.

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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Julia Margaret Cameron, qu'on aime ou pas (ou encore moyennement, comme moi), est incontournable dans l'histoire de la photographie. Même si elle est beaucoup plus connue en Grande-Bretagne qu'en France, pour qui s'intéresse un tant soit peu à la photo du XIXème siècle et qui ouvre un bouquin sur le sujet, impossible de couper à un passage, voire à un chapitre entier sur Cameron. En revanche, des ouvrages en français complètement dédiés à Cameron, c'est pas très évident à trouver. À ma connaissance, il n'existe que celui de Photopoche, et, un peu dans le même esprit, il existait celui-ci (aujourd'hui épuisé), de la collection 55 chez Phaidon, maison d'édition anglaise. Ce petit opus en format poche d'environ 130 pages est d'ailleurs la version traduite en français d'un ouvrage en anglais.


55 photographies de Julia Margaret Cameron (vous avez donc compris pourquoi la collection s'appelle 55), toutes agrémentées d'un commentaire de Joanne Lukitsch (ne me demandez pas qui c'est, je sais juste qu'elle est ou était prof d'histoire de l'art parce que c'est écrit à la fin du livre), et précédé d'un texte abordant à la fois la biographie et la monographie de Cameron. Ce n'est pas le texte qui fait tellement l'intérêt du livre. Encore que. Je n'ai pas l'impression que je savais grand-chose de la vie de Cameron, ou alors j'avais tout oublié, comme le fait qu'elle se soit mise à la photographie à environ 50 ans. Vu comme, encore aujourd'hui, Cameron transporte d'enthousiasme des hordes d'amateurs, je ne saurais que conseiller aux quinquagénaires ayant la douloureuse impression de n'avoir rien accompli dans leur vie - ce qui est probablement faux, mais c'est une autre histoire - de reprendre espoir. Voyez un peu, cette femme anglaise (bon, issue de l'aristocratie et bien pourvue financièrement, ne nous cachons pas les choses), plutôt étroite d'esprit d'après ce que je viens de lire (il est vrai que ça n'a jamais empêché personne de devenir célèbre), mais plutôt nulle en technique photographique, est justement devenue une icône de la photographie ; on pourrait éventuellement la comparer à Isadora Duncan, qui n'était pas une technicienne, mais qui a - du moins c'est ce que j'ai toujours entendu ou lu - révolutionné la danse. Encore que je ne sois pas persuadée que Cameron ait réellement révolutionné la photo. En tout cas pas à elle seule, et pas forcément toujours volontairement.


Je donne l'impression de médire, et Joanne Lukitsch me contredit complètement sur ce point, mais bon, des gars de la National Gallery of Art de Washington et du musée d'Orsay ont tout de même pointé les lacunes de Cameron. Elle est connue pour ses mises au point floues, qu'on pourrait aussi appeler absences de mise au point, ou problèmes de mise au point... Peu importe, après tout si ses portraits floutés n'étaient pas voulus au départ, elle en a tiré parti et c'est ce qui fait en grande partie le charme de sa photographie (pour qui aime ce style, encore une fois). Lukitsch se plaît à nous dire combien Cameron était géniale, novatrice, précurseure, etc., etc. Sans tellement expliquer pourquoi. Alors oui, il est question de l'utilisation de la lumière, ou de la profondeur de champ (ce qui revient en gros à dire qu'elle faisait des photos floues), mais rien de très pertinent. Là où c'est nettement plus intéressant, c'est quand il est question du cercle dans lequel évoluait Cameron, cercle dont faisait partie les Préraphaélites. C'est bien d'ailleurs pourquoi ses oeuvres apparaissaient dans l'expo Une ballade d'amour et de mort au musée d'Orsay (expo commise par les gars mentionnés plus haut et qui ont écrit que Cameron n'était pas une technicienne hors pair), mettant en rapport la photographie américaine et anglaise de la seconde partie du XIXème siècle avec la conception de l'art des Préraphaélites.


Donc, on peut reprocher à Joanne Lukitsch sa façon d'encenser de façon assez répétitive Cameron, qui n'apporte pas grand-chose - pire, ça dessert un chouïa l'analyse de l'oeuvre. Mais le texte principal et les commentaires laissent bien saisir ce qu'était Cameron : pour faire court, une pictorialiste, même si le mouvement pictorialiste n'appraîtra officellement que dans les années 1890 - environ dix ans ans après la mort de Cameron, née en 1815. C'est-à-dire que Cameron faisait partie de ces personnes qui voulaient porter la photographie au même niveau que la peinture, qui rejetaient la pratique de la photographie documentaire (le terme "topographique" était utilisé par Cameron si j'en crois Lukitsch) et souhaitaient que la photographie soit considérée comme un art. Bref, tout le contraire de Baudelaire, ce qui n'empêchait Môssieur d'aller se faire tirer le portrait chez Nadar, tout comme l'ensemble de le bonne société parisienne... Mieux connaître Cameron, c'est d'ailleurs une façon pour moi de confronter les deux visions antagonistes de la photographie (la vision documentaire et la vision artistique), qui ont très vite existé et existent toujours en photographie, puisque je m'intéresse en même temps à Berenice Abbott. On peut difficilement imaginer plus éloignées l'une de l'autre que ces deux-là.


Revenons à nos moutons. Texte un peu trop élogieux, avec un manque de précision sur le travail de Cameron et un léger oubli des défauts de celle-ci. Enfin, de ses défauts techniques, parce que côté biographie, Lukitsch ne fait pas dans l'édulcoration. Cameron paraîtra difficilement sympathique, avec sa façon se vanter en permanence et son refus de fréquenter, ou même de photographier, des gens qui n'étaient pas issus de sa classe sociale. Sauf ses domestiques, qui constituaient de la main d'oeuvre gratuite. Voici ce qu'écrit Jonanne Lukitsch : "Dans sa correspondance, Cameron se vante d'avoir effectué toutes ces tâches [préparation des négatifs, prises de vue, développement, tirage, etc.] elle-même avec la seule assistance de ses domestiques." Ben oui, des domestiques, ça compte pas, même quand le modèle que vous avez le plus pris en photo en fait partie (en l'occurence, elle s'appelait Mary Hiller). Plus j'écris, plus je me rends compte qu'on apprend ici tout de même pas mal de petites choses qui ont compté dans le travail de Cameron, comme le fait que les drapés dont elle recouvrait ses modèles servaient avant tout à masquer leurs vêtements de ville. Paradoxalement, ça a contribué à donner un aspect intemporel à ses photographies. Quant aux commentaires en regard des oeuvres de Cameron, ils permettent de les replacer dans un contexte plus large, ou plus souvent d'expliciter un contexte bien précis.


Mais évidemment, ce qui fait le sel du livre, ce sont les photos, en partie parce qu'elles montrent différentes facettes de Cameron. À côté de la mise au point floue qui fait sa célébrité, on trouve aussi des oeuvres à la mise au point très nette. À côté des portraits de profil ou de 3/4, ou encore avec un modèle qui détourne le regard, on a quelques prise de vues tout à fait frontales. À côté des "tableaux vivants" un rien artificiels, on trouve des mises en scène (comme pour Ophélie ou Appelle-moi et je te suis) plus maîtrisées et plus étonnantes. À côté des Madones, ou des femmes à l'air de madones, qui peuvent lasser, on trouvera le portrait saisissant de Philip Worsley, dont j'ai cru que c'était une tête de Saint Jean-Baptiste à l'air accusateur (on dirait une tête coupée). Et à côté des tirages en noir et blanc qu'on connaît et qui ont pas mal pâli avec le temps, on trouve aussi des reproductions de tirages avec des expérimentations de couleurs que je ne connaissais pas à Cameron (espérons que ce n'est pas l'éditeur qui a eu la main lourde sur la saturation des couleurs...) C'est le cas de Sappho, une photo qu'on peut trouver sur le site du Met (le Metropolitan Museum of New York : c'est pas moi qui veut me la jouer, c'est eux qui veulent absolument qu'on les appelle comme ça) et dont on voit beaucoup mieux que d'habitude que le négatif sur verre est brisé (encore une fois, espérons que ce n'est pas l'éditeur qui a eu la main lourde sur l'utilisation de Photoshop). C'est assez marrant de voir à quel point Cameron était, soit pas très soigneuse, soit maladroite : on voit régulièrement que l'émulsion n'avait pas été bien posée, ou encore que le verre du négatif était abîmé, ou bien qu'il y a ait des cochonneries qui s'étaient collées sur l'émulsion (un peu comme quand vous scannez un document et que vous découvrez qu'il y avait un poil de chat sur la vitre...) Ce qui n'est d'ailleurs pas du tout gênant dans le cas de Sappho et de son verre brisé, par exemple - je dirais presque : bien au contraire.


Je reste cependant frustrée, parce que j'aimerais bien savoir d'où viennent les tirages reproduits ici, connaître leurs formats initiaux, sans parler du fait qu'en tant que maniaque j'aime bien lire des détails tels que "négatif sur verre au collodion, tirage sur papier albuminé" (chacun ses petits plaisirs). Pas de ça ici, pas plus qu'une bibliographie ; il ne faut sûrement pas attendre plus d'un livre vendu initialement à moins de 5 € (et à 3 € dans mon cas, ce qui fait de moi une emmerdeuse qui voudrait l'équivalent d'un bouquin de 40 € pour même pas un dixième du prix.) Mais franchement, pour un premier livre sur Cameron et la somme déboursée, c'est pas trop mal. Reste à trouver quelque chose de plus fouillé, et ça ne peut être, j'en ai peur, qu'en anglais. D'autant que le choix est rude, des tas de trucs de toutes sortes ayant été publiés sur elle. On en reparlera. Bientôt. Enfin, c'est ce que je dis toujours...
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Cette présentation de l'oeuvre de Julia Margaret Cameron est très intéressante.On aurait pu être rebuté par ces vieilles images du début de la photographie. Or, il n'en est rien. le commentaire de Joanne Lukitsh accompagnant chacune des photos y est pour beaucoup. Elle nous fait vraiment entrer dans le sujet des clichés par ses lumineuses explications.
Il n'en demeure pas moins que Julia Margaret Cameron a réalisé de remarquables portraits qu'on ne pourrait , avec toute notre technologie actuelle, égaler aujourd'hui.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
...desphotos non pas tirées de la vie mais tournées vers la vie et qui émerveillent et ravissent à la fois.
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