Parmi tant d'autres...

Un grenier.
Véritable caverne d'Ali Baba parfois.
Écrin poussiéreux de souvenirs, souvent.
C'est là qu'un enfant de 10 ans va découvrir... son grand-père.
Enfin, ce qu'il en reste.
Un vieil uniforme, troué, avec encore des traces de sang et de boue, un portefeuille, percé d'éclats, lui aussi, mais dans lequel séjournent encore quelques vestiges d'un temps passé. Quelques photos, quelques lettres. Abîmées par les ans. Songez-donc, tout s'est arrêté en mars 1915. Une montre cassée, aussi et un sabre.
L'enfant pourrait rêver de gloire et de batailles victorieuses, mais cette découverte va l'amener à prendre la plume, bien plus tard, pour parler de cet aïeul que même son père n'a pas connu.
Un parmi tant d'autres.
De ceux qui sont tombés pendant la grande guerre.
Un de ceux, qui sont partis, confiants, bouter hors de nos frontières, le Boche envahisseur.
Malavoy, nous raconte cet homme qui sait qu'il va mourir.
Grièvement blessé, il vit ses dernières heures.
Au milieu des autres. de ses semblables. Comme eux, il souffre. Comme eux, il agonise, comme eux il a soif, faim, froid. Comme eux, il prie. Comme eux, il pense. À ceux qui restent. À ceux qui attendent. À ces familles. À ces enfants  nés ou à naître, comme ce fils qu'il ne connaîtra jamais.
Parmi tant d'autres est un roman. Mais un roman vrai. Un témoignage.  Un hommage.
C'est écrit avec respect, avec le coeur et par une très belle plume.
Émouvant.

Je suis née 54 ans après le début de la guerre de 14-18 et pourtant….
Et pourtant, elle fait partie de mon passé, je porte souvent à mon doigt cette bague faite par un poilu, dans un fragment d'obus, et je revois encore ma grand-mère raconter l'histoire de sa maman allant voir une voyante pour savoir si son homme reviendrait des tranchées : « il reviendra, le père adoré ! » et ce fut vrai…
Pour d'autres, la suite fut plus cruelle et c'est cette histoire que nous conte avec justesse, Christophe Malavoy. Enfant, errant dans la demeure familiale il trouve le pantalon garance, la montre à gousset et le portefeuille troué d'André, son grand-père inconnu. L'enfant d'alors essaie l'habit, l'adulte devenu, prend la plume et décrit avec justesse les derniers jours, et nous livre les ultimes pensées, quand sentant le corps affaiblit, l'âme dans un dernier sursaut se rappelle les moments heureux du passé.
Se mêlent alors le souvenir des dernières vacances, dans l'ombre fraiche de l'arbre, la douceur de la peau de sa femme, et l'attente avant le dernier combat, la peur de certains, les conditions de vie terrible, la cohabitation avec l'autre, l'ennemi, à peine à quelques mètres, dans la tranchée d'en face.
Et puis les dernières heures, couché au sol, sur un matelas de fortune, dans une église encombrée de corps mutilés, d'âmes souffrantes, avec pour réconfort, le prêtre et une jeune fille, perdus aussi devant tant de gâchis.
Avec pudeur, Christophe Malavoy écrit, la lettre annonciatrice qui arrive et la douleur qui brise la femme jeune, celle dont le ventre rempli de vie, ne pourra plus partager avec André la quiétude de la vie.

Un roman de plus sur la première guerre mondiale me direz-vous ? C'est vrai que la littérature abonde sur le sujet. Mais ce qui est différent ici, c'est que le personnage principal est réel : ce n'est pas un personnage de fiction, c'est le grand-père de Christophe Malavoy, mort lors de la grande guerre, parmi tant d'autres.

Christophe Malavoy enfant monte au grenier et y trouve les affaires d'André, son grand-père qu'il n'a pas connu : sa vareuse, son pantalon, son sabre, son portefeuille troué...
À partir de là, il va reconstituer, ou inventer l'histoire d'André.
Il alterne les chapitres où son grand-père raconte ses derniers jours, et ceux dans lesquels sa grand-mère enceinte vit dans l'angoisse permanente d'une mauvaise nouvelle qui, elle l'espère, ne viendra pas.

L'écriture est soignée, agréable à lire, l'ensemble est fin et sensible : une lecture très touchante.

Un beau roman qui relate les derniers jours d'un poilus. Poignante histoire

Hymne à la vie, hymne à l'histoire, un joli roman avec ses faiblesses de non-auteur mais sa force du coeur.