Il y a quelques semaines, je vois passer sur mon fil d'actualité FB, une publication émanant de la page "L'instit'humeurs" à laquelle je suis abonnée et qui portait sur l'extrait d'un livre, ce livre.
Séduite par ce que je venais de lire, je me suis empressée d'acheter le bouquin, sous le prétexte fallacieux de l'offrir à mon fils. Oui... parce que lorsqu'on a une "Pile-A-Lire" aussi conséquente que la mienne, on se sent un peu obligée de justifier chaque nouvelle acquisition et, comme ce livre ne m'était pas destiné, je l'ai donc lu dès sa réception.
L'Ecole a tenu une place très importante à trois périodes de ma vie. Ne voyez dans ce qui va suivre aucun jugement de valeur du type : "C'était mieux avant" ou "Il était temps que ça change", mais plus modestement une simple évocation de faits.
Née en Novembre 1953, ma scolarité élémentaire se situe donc entre 1959 et 1964. J'ai précisé mon mois de naissance car, à cet âge de la vie, il est à prendre en compte sur le plan de la maturité, forcément en décalage par rapport à l'ensemble de la classe. D'autant qu'à cette époque, à Paris, il n'était pas rare que les classes soient constituées d'une quarantaine de petites élèves. Je dis "petites" car la mixité n'existait pas dans les écoles des grandes villes. Aucune familiarité ni complicité n'étaient envisageables avec l'enseignant, d'ailleurs juché sur une estrade d'une trentaine de centimètres.
Paramètre important, les parents "n'entraient" pas dans l'Ecole et rares étaient ceux qui avaient ne serait-ce que la disponibilité de venir chercher leur enfant à la sortie. Nous rentrions à pieds, entre copains, notre cartable à la main. On ne discutait pas la parole de l'enseignant, pas plus que l'enseignant ne jugeait du travail de la boulangère ou du tourneur-fraiseur. C'était chacun son métier et les vaches étaient bien gardées.
J'insiste sur ce point car à cette époque, lors d'un barbecue ou ailleurs,
Lucien Marboeuf n'aurait jamais été harcelé par un dindon prétentieux qui - sous prétexte qu'il vient chercher sa fille chaque soir, a lu un ou deux articles dans un journal réac, ou peut-être même adhéré à une association de parents d'élèves - s'autorise à pérorer sur un sujet qui le dépasse.
Je retiens de cette époque l'étrange impression que les instits avaient une classe mais... pas d'élèves. J'entends par là que les spécificités de chacun n'étaient pas prises en compte. Une classe était perçue comme un ensemble homogène, d'une égalité parfaite : tous les mêmes chances, tous le même potentiel. Et pas de quartiers pour celui qui trébuchait ! En témoigne ce mot de l'institutrice à mes parents :
"Monsieur, Madame,
Je vous communique à nouveau le cahier de votre fille pour que vous preniez connaissance de son travail. Rien qu'en regardant l'écriture (si on peut appeler cela écrire) vous vous rendrez compte qu'elle se moque totalement des conseils et des punitions, puisque tous les jours ce sont les mêmes griffonnages. Si cela persiste je serai obligée de ne plus m'occuper de son cahier où je ne vois jamais aucune application mais seulement les signes de l'indifférence, de la paresse et de la mauvaise volonté la plus évidente.
L'institutrice."
C'était le 3 Octobre 1959, je venais d'entrer en CP et n'avais pas encore 6 ans !
La seconde période se situe de 1990 à 1995, scolarité élémentaire de mon fils, cette fois. Les choses avaient changé à tous points de vue et j'ai pris un plaisir immense à suivre ses devoirs ou participer aux réunions de parents d'élèves, mais toujours dans un esprit constructif, sans jamais remettre en cause la compétence des enseignants. Et cela non pas parce que je leur vouais une admiration béate - pas plus qu'au médecin ou au garagiste, d'ailleurs - mais tout simplement parce qu'ils ne m'ont jamais donné de raisons de le faire.
Quant à la troisième période, c'est depuis trois ans et pour longtemps, à travers mon fils devenu, par un choix mûrement réfléchi, Professeur des Ecoles - Instit, donc.
Autant vous dire que c'est précisément dans cette troisième période que j'ai perdu toute objectivité et saute systématiquement à la gorge de n'importe quel inconscient qui s'aviserait, devant moi, de critiquer sottement les enseignants - et par conséquent, mon p'tiot (sourire... Mais méfiez-vous quand même ;) )
Quant à ce livre, je ne saurais trop vous le recommander. Il est non seulement édifiant par les informations sérieuses qu'il nous transmet mais, de plus, l'humour, la bienveillance, l'humilité, l'implication et l'humanité de
Lucien Marboeuf m'ont énormément touchée.