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Alexandra Helleu (Traducteur) François Bizot (Préfacier, etc.)Jean-Louis Margolin (Auteur de la postface, du colophon, etc.)
EAN : 9782746701700
202 pages
Autrement (01/01/1945)
4.4/5   5 notes
Résumé :

L’un des plus grands spécialistes de l’histoire récente du Cambodge analyse les archives de la « prison secrète de Pol Pot ».

Au sein de S-21 ont été enfermés, torturés, et dans la grande majorité des cas, tués près de 14 000 Cambodgiens, soupçonnés d’activités contre-révolutionnaires.

Au-delà de l’étude des archives, David Chandler tente de nous faire entendre les voix de ces victimes, des rares survivants et surtout d’un... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Voici un livre très dur à lire mais nécessaire pour mieux comprendre les enjeux des procès de khmers rouges à Phnom Penh et la mécanique complexe des exactions et horreurs commises.
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Citations et extraits (27) Voir plus Ajouter une citation
Les cruautés de la prison et du champ d'exécution de Choeung Ek correspondent tout à fait à ce que Kelman et Hamilton (s'inspirant des travaux de Stanley Milgram et d'autres historiens) ont appelé les "crimes d'obéissance". Les tortionnaires et les bourreaux de S-21 obéissaient, instinctivement ou non, à des ordres donnés par des individus dont ils acceptaient l'autorité sans contestation, en partie parce que la remise en cause de celle-ci aurait pu entraîner leur propre mort. A propos de la Shoah, Zygmunt Bauman écrivait que "les inhibitions morales contre les atrocités brutales tendent à s'éroder" lorsque la violence est autorisée, quand elle devient une routine et quand les victimes sont déshumanisées. Tzvetan Todorov soutient également ce point de vue. De plus, quand ils blessaient et tuaient, un grand nombre d'interrogateurs et d'exécuteurs pensaient qu'ils agissaient selon une morale supérieure et une discipline plus globale que tout ce qu'ils avaient connu auparavant. Isolés, contraints, terrifiés, mais tout-puissants, ces jeunes hommes se transformèrent en armes terrifiantes. Les plaisirs qu'ils tiraient de leur propre cruauté augmentaient parfois leur satisfaction de survivre et de recevoir l'approbation de leurs supérieurs.
(Page 167)
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Le nombre de prisonniers exécutés à Choeung Ek chaque jour variait de quelques douzaines à plus de 300. Ce dernier chiffre fut enregistré en mai 1978, à l'apogée des purges de la zone Est. En général, "une fois par mois ou toutes les trois semaines, deux ou trois camions" partaient de S-21 pour Choeung Ek. Chaque camion comprenait trois ou quatre gardiens et de 20 à 30 prisonniers "effrayés et silencieux". Quand les camions arrivaient sur le site, se rappelait Huy, les prisonniers étaient rassemblés dans un petit bâtiment où l'on vérifiait leurs noms d'après une liste d'exécution auparavant préparée par Suos Thi, le chef de la section de documentation. Quelques listes de ce type ont été conservées. Les prisonniers étaient ensuite emmenés par petits groupes vers des fossés ou des trous que des travailleurs stationnés en permanence à Choeung Ek avaient creusés un peu plus tôt. Him Huy continuait ainsi, d'un ton très détaché :
"On leur ordonnait de s'agenouiller au bord du trou, Ils avaient les mains attachées dans le dos. On leur tapait dans le cou avec un essieu de char à boeufs en fer, parfois un seul coup, parfois deux [...] Ho surveillait les exécutions, et je prenais en note les noms. Nous ramenions ces noms à Suos Thi. Aucun nom ne devait manquer."
Him Huy se souvenait de prisonniers criant : "S'il vous plaît, ne me tuez pas, euy !" Il se rappelait qu'il avait dit à un prisonnier qu'il savait que, s'il ne le tuait pas selon les ordres, il serait lui-même exécuté.
(Page 170)
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Une autre série d'expériences conduites aux Etats-Unis au début des années 1960 par Stanley Milgram nous en offre un autre aperçu.
(...) Aucune électricité n'était transmise par les boutons sur lesquels professeurs appuyaient, et les étudiants étaient des acteurs embauchés par Milgram.
(...) A de rares exceptions près , les expériences ont montré, comme Alan Elms l'a écrit, que "deux tiers d'un échantillon d'Américains moyens étaient prêts à électrocuter une victime innocente jusqu'à ce que le pauvre homme crie grâce et continuaient à le faire longtemps après qu'il fut devenu silencieux.
Dans une autre étude, John Darley suggère que l'obéissance des professeurs était intimement liée à la présence des expérimentateurs à qui l'on demandait de valider l'usage supplémentaire de violence. Abandonnés à leur choix personnel, selon Darley, les professeurs n'auraient pas administré les chocs électriques. En cela, il y a une grande différence , comme il le défend vigoureusement, entre les enseignants de Milgram et les personnes qui commirent certaines atrocités. Il ajoute néanmoins que la socialisation des individus dans une plus grande violence peut n'être qu'une question de temps.
(Pages 178 et 179)
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Pour compliquer encore les choses, nous devons nous rappeler que les employés des camps nazis et de S-21 n'étaient pas fondamentalement brutaux ou autoritaires. La plupart étaient des hommes et des femmes ordinaires, et souvent peu instruits, à qui l'on avait assigné des tâches extrêmement violentes. Il est impossible de dire quelle fut la part de choix délibéré, de pressions des pairs, d'obéissance et d'ambition. Ce que nous savons des employés de S-21 indique en général, comme le suggèrent les recherches de Browning, leur aspect ordinaire et banal. Liés à des gens qui leur ressemblaient, respectueux et soumis devant leurs responsables, les employés de S-21, comme leurs prisonniers, étaient piégés à l'intérieur d'un scénario sans pitié.
(Page 177)
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La prison de Tuol Sleng fut abandonnée dans la précipitation le 6 janvier 1979, au moment de l'arrivée des troupes vietnamiennes qui envahirent le Cambodge et chassèrent les Khmers rouges de Phnom Penh. A cette occasion, Douch semble avoir été confronté, pour la première fois à l'obligation d'abattre lui-même des prisonniers : les onze derniers qui s'y trouvaient encore. La fuite des révolutionnaires n'entraîna aucun répit dans la poursuite des massacres.
(...) En dehors de Tuol Sleng, on évalue aujourd'hui, disséminés dans tout le pays, environ 20 000 charniers, pour un nombre qui excède les 2 millions de morts.
(Page 8)
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