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EAN : 9782130608967
348 pages
Presses Universitaires de France (09/03/2013)
4.2/5   5 notes
Résumé :

« Penser Dieu, donc, hors la différence ontologique, hors la question de l’Être, aussi bien, au risque de l’impensable, indispensable mais indépassable. Quel nom, quel concept et quel signe pourtant demeurent encore praticables ? Un seul sans doute, l’amour, ou comme on voudra dire, tel que saint Jean le propose — “Dieu agapè” (I Jean, 4, 8). Pourquoi l’amour ? Parce que ce terme, que Heidegger, comme d’ailleurs toute la métaphysique quoique d’une autre m... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Le point de départ de l'auteur est une critique de toute approche conceptuelle de Dieu. Lorsqu'on entreprend de penser Dieu, on vise Dieu, le tout-Autre, mais le risque de se perdre alors dans l'infini pousse souvent à détourner son regard pour se retourner sur soi. Ce retour créé une sorte de miroir qui fixe la limite du regard humain et dans lequel cette limite est identifiée à Dieu. Voici, sommairement tracée, la phénoménologie de toute approche conceptuelle de Dieu.

Résultat : ce Dieu, réduit à la capacité de l'intellect humain de le saisir, n'est plus Dieu mais une « idole ». Le sujet qui, parce qu'il compte sauvegarder sa souveraineté, préfère la sécurité d'une réflexivité autonome mais circulaire à une véritable ouverture qui l'exposerait au risque de perdre sa maitrise, ne peut accéder à l'altérité radicale (qu'il cherche pourtant à penser). Ne voyant finalement que lui-même dans ce miroir qu'est l'idole, il se coupe d'une vraie expérience du divin.

Le projet de l'auteur est d'esquisser les pistes d'une pensée de Dieu hors de l'idolâtrie conceptuelle. Cette démarche ne servirait pas qu'à faire taire le « bavardage pieux » des philosophes croyants et des théologiens, mais aussi à démontrer aux athées que le Dieu qui est « mort » n'est pas Dieu, mais seulement le ''Dieu'' interne à leur approche conceptuelle (qu'ils partagent avec les premiers !). En effet « l'idole joue universellement, tant pour la dénégation que pour la preuve »...

Un des enjeux de tout cela est que la « mort de Dieu », n'étant pas celle de Dieu mais seulement de son double rationnel agité par le discours théologique autant qu'athée, ne ferme donc pas la question de Dieu, mais l'ouvre au contraire... Déconstruisant l'opposition croyance-athéisme (qu'on aime à tracer à partir de tant de discours conceptuels sur Dieu) pour leur opposer la foi véritable, Jean-Luc Marion pose les jalons d'une théologie négative renouvelée.
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Un livre très intéressant, au style relativement compliqué. Marion veut nous montrer comment Dieu ne se réduit pas conceptuellement et pourquoi la question de l'être n'est pas fondamentale contrairement à ce que pensent selon lui la métaphysique et les phénoménologues eux-mêmes dans leurs réflexes métaphysiques.
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Une phénoménologie beaucoup plus pénétrante que je ne le croyais avant la lecture de l'essai. Disons qu'on comprend mieux l'aspect du "donné théologique" après cette lecture inspirée par Heidegger et Saint Thomas d'Aquin. C'est une analyse rigoureuse.

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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Tout silence qui reste inscrit dans la banalité, dans la métaphysique, et même dans l’Être/étant, voire dans une théologie oublieuse des noms divins, n’offre que des idoles muettes. Il ne suffit pas de se taire pour échapper à l’idolâtrie, puisque, par excellence, l’idole a en propre de se taire ; et donc, de laisser les hommes se taire quand ils n’ont plus rien à dire – pas même des blasphèmes. Le silence, qui convient au Dieu qui se révèle comma agapè dans le Christ, consiste à se taire par et pour l’agapè : concevoir que si Dieu donne, dire Dieu impose de recevoir le don, et – puisque le don n’advient que dans la distance – à le rendre. Rendre le don, jouer en redondance la donation impensable, cela ne se dit pas, mais se fait. Alors seulement peut renaître le discours, mais comme une jouissance, une jubilation, une louange.

Plus modestement, le silence qui convient à Dieu impose de savoir s’en taire, non par agnosticisme (le surnom poli de l’athéisme impossible), ni par humiliation, mais simplement par respect. Même contre soi, il faut reconnaître que, si nous n’aimons pas assez l’agapè pour la louer, nous devons au moins préserver cette impuissance comme la trace d’un possible. Et garder notre silence comme un trésor, encore pris dans la gangue qui en offusque la splendeur, mais n’en protège pas moins le futur éclat. Ce silence-là, et nul autre, sait où il se trouve, qui il tait, et pourquoi il doit, un temps encore, préserver une décence muette – pour se libérer de l’idolâtrie.

Si nous parvenions à entrevoir ne fût-ce que l’esquisse de ce par où l’agapè excède tout (et l’Être/étant), alors notre silence pourrait nous faire devenir, un peu, des « envoyés… annonciateurs du silence divin »(1).

(1) Denys, Noms Divins, IV, 2, P.G., 3, 696 b. (pp. 154-155)
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Le divin n’avait certes pas attendu saint Thomas pour entrer en métaphysique ; mais ce n’est qu’avec saint Thomas que le Dieu révélé en Jésus-Christ sous le nom de charité se trouve sommé d’entrer dans le rôle du divin de la métaphysique, en assumant esse/ens comme son nom propre. Désormais se trouvent réunies les conditions nécessaires et suffisantes pour qu’avec le destin du « Dieu des philosophes et des savants » il y aille aussi de la réception du « Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob ». Descartes, décidant de toute la métaphysique subséquente, déterminera celui qui reste pour lui le Dieu des chrétiens non seulement comme idée de l’infini, mais aussi comme causa sui. Ainsi les apories de la causa sui pourront, par le relais du « Dieu moral » engendrer une « mort de Dieu » où s’accomplit positivement l’idole métaphysique de « Dieu », mais où se dissimule radicalement le caractère idolâtrique de cette idole.

Cette dissimulation tient en effet à l’impossibilité où se trouve, depuis que l’ens/esse prévaut comme nom divin, l’intelligence théologique d’envisager un nom proprement chrétien du Dieu qui se révèle en Jésus-Christ – un nom antérieur à l’Être de l’étant (selon la métaphysique), donc aussi à toute pensée de l’Être comme tel. (p. 123)
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Si nous manquent, à nous occidentaux datés (et dotés) de l’achèvement de la métaphysique, les moyens esthétiques de saisir l’idole, d’autres nous demeurent, ou mêmes s’épanouissent. Ainsi le concept. Le concept consigne dans un signe ce que d’abord l’esprit avec lui saisit (concipere, capere) ; mais pareille saisie ne se mesure pas tant à l’ampleur du divin, qu’à la portée d’une capacitas, qui ne fixe le divin en un concept, tel ou tel, qu’au moment où une conception du divin la comble, donc l’apaise, l’arrête, la fige. Quand une pensée philosophique énonce, de ce qu’elle nomme alors « Dieu », un concept, ce concept fonctionne exactement comme une idole : il se donne à voir, mais ainsi se dissimule d’autant mieux comme le miroir où la pensée, invisiblement, reçoit la localisation de son avancée, en sorte que l’invisable se trouve, avec une visée suspendue par le concept fixé, disqualifié et abandonné ; la pensée se fige, et paraît le concept idôlatrique de « Dieu » où, plus que Dieu, c’est elle-même qu’elle juge. (p. 26)
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L'enfer, ce n'est pas les autres, c'est l'absence de tout autre.
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