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EAN : 9791022610117
336 pages
Editions Métailié (20/02/2020)
3.84/5   22 notes
Résumé :
FR : Quelle est la relation entre le gouvernement de Ronald Reagan et un membre d'un gang en Amérique centrale qui a assassiné plus de 50 personnes ? Quel est le lien entre la Californie et le fait que le Salvador soit le pays le plus meurtrier au monde ? Comment un groupe d'immigrés à Los Angeles – fans absolus de heavy metal – est devenu l'embryon du gang le plus dangereux de monde ?

Dans ce document poignant de réalité, les frères Óscar et Juan Jo... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Le Salvador est depuis bien longtemps un pays où règne la violence, le n°1 au palmarès des pays les plus meurtriers au monde. Et la violence engendre la violence, c'est du moins ce que les auteurs démontrent dans ce document, qui retrace le parcours de El Niño de Hollywood, nom de guerre de Miguel Ángel Tobar, membre du gang ultra-violent de la MS 13 (Mara Salvatrucha 13).
Dans les années 80, fuyant la guerre civile, de nombreux Salvadoriens des deux bords (soldats ou guérilleros) se sont exilés aux États-Unis, à Los Angeles en particulier. Pour faire front aux vexations infligées par les gangs mexicains déjà bien implantés, ils se sont eux-mêmes regroupés en "maras", cliques à la base des deux principaux gangs salvadoriens aux USA, la MS 13 et le Barrio 18. Au début, le point commun de ces jeunes gars était d'écouter du heavy metal, de porter de chouettes fringues et de se faire tatouer un tas d'insignes sur le corps. Mais bientôt il leur a paru nécessaire, à la fois de se différencier des autres cliques, et de créer un fort sentiment d'appartenance. La solution : haïr l'autre puisqu'il n'appartient pas à mon groupe et qu'il est donc différent. C'est ainsi que naquit la rivalité mortelle entre MS 13 et Barrio 18, où le seul fait d'appartenir à l'un des deux suffit pour tuer (ou être tué par) ceux de l'autre.
Puis Reagan arriva à la présidence et les expulsions d'illégaux furent mises à la mode. Beaucoup de Salvadoriens furent ainsi renvoyés au pays, dont des "mareros", qui n'oublièrent de rapatrier avec eux leur rivalité. Une fois rentrés, les leaders reconstituèrent deux armées en recrutant Miguel Ángel et ses congénères, gamins paumés des villes et des campagnes (les "enfants de personne"), et la violence ne connut plus de limites...
Si les auteurs (un journaliste et un anthropologue) sont parvenus à rencontrer Miguel Ángel alias El Niño de Hollywood, l'un des tueurs les plus prolifiques de la MS 13, c'est parce que celui-ci a trahi les siens. Devenu "témoin privilégié" (càd protégé par les autorités salvadoriennes, càd très théoriquement, faute de moyens), il a accepté de témoigner dans divers procès pour meurtres, enlèvements, tortures et autres crimes, commis par ses ex-compagnons, en échange de l'immunité pour lui-même. Pendant des heures d'interview dans sa maisonnette misérable, les deux auteurs l'ont écouté raconter ses faits d'armes pour le compte de la MS 13, le pourquoi et le comment de sa trahison, sa certitude de mourir bientôt des mains vengeresses de son ancien gang.
Une histoire de la violence, d'une violence infernale et sans fin, sur laquelle les autorités se cassent les dents, quand elles ne contribuent pas à son émergence. Parce que dans cette enquête en rouge et noir, sans états d'âme, on comprend effectivement "comment les USA et le Salvador ont créé le gang le plus dangereux du monde", le "seul gang faisant partie de la liste noire du département du Trésor des États-Unis". Un ouvrage très intéressant, grâce auquel j'ai beaucoup appris. Mais je pense que le texte aurait gagné à être moins répétitif et à respecter davantage la chronologie : il est facile de se perdre entre les multiples noms de tous les "sous-gangs", et par moments les digressions et les allers-retours entre présent et passé ajoutent à la confusion.
En partenariat avec les Editions Métailié.
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Les livres sur la mafia, les gangs, j'adore ça. La griffe du chien de Winslow ou Gomorra font partie des livres qui m'ont marqué. Aussi, un livre sur les MS13 ne peut il que m'intéresser.Encore faut il qu'il soit bon. Et il l'est.

Les auteurs sont deux salvadoriens , journaliste et anthropologue. Ils ont découpé leur ouvrage en trois parties : Origine et expansion de la Mara Salvatrucha 13 et répondent ainsi au sous titre, "Comment les USA et le Salvador ont créé le gang le plus dangereux du monde". Cette partie est fabuleuse .
Puis ils s'intéressent à un membre repenti, El Nino, jeune salvadorien qui va intégrer une clique locale ( branche de la MS13) : Les auteurs relatent ici leur s entretiens avec El Nino et montrent le fonctionnement interne d'une clique et ses codes.
Enfin , une succincte troisième partie revient sur les derniers jours d'El Nino.

Ceci est juste une trame . Comme dans tous ces livres , il y a beaucoup de protagonistes et les allées retours temporels sont nombreux et inévitables . Un livre chronologique n'aurait aucun sens .
J'avoue avoir été bluffé par la clarté des explications avancées pour expliquer la création, la vocation et l'expansion de la MS13. Tout est clair, des débuts à la hiérarchisation, du rôle joué par les prisons aux rites initiatiques.
Le rôle américain , des différentes politiques salvadoriennes , le contexte culturel, économique sont exposés de manière limpide.
Ce livre est aussi un condensé d'histoire sur le Salvador et explique comment ce pays est devenu le plus meurtrier au monde.
Alors bien sur , il y a de la violence, mais jamais gratuite.
Il ressort de cet ouvrage une sorte de fatalité et sans valider bien entendu les actes de la MS13, on est amené à comprendre comment on peut en arriver là, tout était réuni pour la création d'une groupe d'une telle cruauté.
Ce livre sera sans doute une référence sur les MS13 mais aussi pour comprendre et expliquer la situation au Salvador . et l'on peut penser que ce ne sont pas les tweets récurrents de Trump contre les MS13 qui vont changer quoi que ce soit.
Un formidable témoignage.
Merci à Babelio et aux éditions Métailié.
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Ce que j'ai ressenti:

▪️Pour certains, la paix est impossible…

« Je hais donc j'existe. »

Puisque on en est à parler épidémie, il faudrait que je vous parle aussi de celle-ci…L'épidémie du Salvador, le pays le plus meurtrier au monde…Ce livre est un choc. Je suis totalement sortie de ma zone de confort pour découvrir la violence extrême. Avec ce récit documentaire, les frères Martinez nous emmène au plus près du gang le plus dangereux du monde: la Mara Salvatrucha 13, et sur les traces de l'un de ses membres les plus terribles, El Niño de Hollywood. C'est un documentaire édifiant et terriblement choquant. Les chiffres et les statistiques s'affolent et défient tout entendement: autant de morts pour un si petit pays, ça fait froid dans le dos, et c'est pour cela que le mot Épidémie, lui est associé, avec ce nombre ahurissant de victimes. En retraçant ainsi, grâce aux entretiens et au travail d'enquête minutieux de ces deux auteurs sur les origines de la formation de ce gang, on s'aperçoit que pour certains, le mot paix n'a pas de place dans leurs vocabulaires. Miguel Angel Tobar est El Niño de Hollywood et son histoire est importante pour comprendre le fléau qui sévit au Salvador.

"Ils naissent et ils meurent comme ça."

"Mais ces morts étaient des morts pauvres. Des morts de règlements de comptes entre gangs. Morts de cette guerre entre miséreux."

▪️Sauf que c'étaient des gamins…

J'avais déjà entendu parler du phénomène des « baby-gang » en Italie avec la duologie Roberto Saviano (Piranhas et Baiser Féroce), mais même sur d'autres frontières, ce mal se répand aussi, malheureusement. Utiliser des enfants pour répandre la haine. La misère, bien sûr, a été le terreau de ce phénomène dévastateur…À force de recherches et d'entretiens, les deux frères Martinez nous démontrent que l'embrigadement se fait dès le plus jeune âge, et comme ce sont des « gamins de rien » livrés à eux-mêmes, qu'ils n'ont personne pour les protéger de ces figures manipulatrices, ils tombent vite sous la coupe des gangs…Et dans leurs totales inconsciences, dans leur total dévouement, ils font pire que les « grands », et n'ont de cesse de faire monter cette violence en escalade, jusqu'au bain de sang, pour nourrir la Bête. C'est la haine, leurs moteurs de vie. Parce qu'ils n'ont rien d'autre que ça, ces enfants perdus. Ils dévorent et se font dévorer pour cette idée d'appartenance à un clan. Et ils ne peuvent pas s'en sortir, une fois que La Bête les a marqués, c'est définitif. Aucune échappatoire possible. Souvent, ils prennent alors un nom avec une majuscule, pour faire courir la légende et semer la mort, partout. El Niño de Hollywood est un assassin avec plus de 50 meurtres à son actif. Un enfant-tueur, victime et bourreau de la Bête.

"De la chair fraîche et agressive pour faire grossir la Mara Salvatrucha, La Bête."

▪️Comprendre la création du gang le plus dangereux du monde…

Bien que le sujet soit très difficile, c'est un livre que je recommande à qui voudrait comprendre l'histoire et la formation du gang de la Mara Salvatrucha 13. J'ai pris le temps de lire avec attention cette lecture. C'est un récit très documenté et fort en émotions parce que l'on voit à travers les yeux et les ressentis de El Niño de Hollywood.

"La mort appelle la mort. Pas partout, mais au Salvador, si. La mort a la mort en héritage. Des petites histoires de famille à l'histoire récente du pays, le Salvador est construit sur des morts qui ont généré d'autres morts."
Lien : https://fairystelphique.word..
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Après s'être bien amusée avec les Aristochats et Mowgli, il était temps de revenir aux affaires sombres, sanglantes, affreuses et quoi de mieux pour cela qu'un livre qui explique la naissance du gang Mara Salvatrucha 13 ?

Oui, ce même gang que Trumpinette veut éradiquer, ce gang né à cause d'une guerre au Salvador, de l'exode de sa population (à Los Angeles) et des brimades reçues par les autres déjà présents aux États-Unis (gangs de mexicains ou autres latinos)…

Non mais à quoi ça tient, parfois ? Des gens ayant connu la violence sont brimés, tabassés, ils se rassemblent donc pour être plus fort (l'union fait la force) et ils découvrent le heavy metal et les paroles sataniques de leurs chansons.

On forme des "maras" (abréviation de marabunta, une migration massive et destructrice des fourmis chasseuses), elles-mêmes divisées en cliques. Deux sont sorties de terre, les Mara Salvatrucha 13 et Barrio 18. Frères ennemis puisque appartenant à un groupe différent. La haine, ça entretient… "Je hais donc j'existe".

Ce roman qui n'est pas une fiction vous démontre comment d'une bande de jeunes amateurs de metal et de culte satanique, on est arrivé au gang des MS-13…

Comment ? Grâce entre autre à un ancien acteur de western, reconverti en président des États-Unis, qui a envoyé des armes au Salvador pour soutenir la guerilla, formé des milices pour les combats, anéanti le Salvador et fait le ménage en mettant à l'ombre tous les petits gangs des rues qui trafiquaient de la drogue.

La nature ayant horreur du vide, le terrain était prêt pour le petit gang des amateurs de heavy metal, même s'ils n'avaient pas encore compris comment fonctionnait le système. Ils l'ont vite appris et ensuite, se sont détourné du metal pour devenir des assassins purs et durs.

Reagan, lui, a continué sa politique à la porte-nawak en faisant expulser les membres du gang qui étaient en prison, comme on se débarrasse d'un déchet, pensant que le problème est résolu, sans penser que le déchet a encore une vie et qu'il va reproduire les cliques du gang dans son propre pays.

Le cercle vicieux, la boucle sans fin… Comme toujours, les ennuis naissent des comportements inadéquats de la part des dirigeants… Ils ont foutu la merde ailleurs, ils ont aidé des tyrans à rester au pouvoir, ils les y ont mis, ils ont été se mêler de ce qui ne les regardaient pas et la population se prend le retour de manivelle…

Ce roman nous éclaire sur la naissance de la Bête, autre surnom de MS-13, au travers du témoignage de Miguel Ángel Tobar, El Niño de Hollywood chez les MS-13 (vous saurez aussi pourquoi le chiffre 13 est accolé à bien des noms de gangs) car ce dernier a cafté, trahi, donné les siens. Il était pourtant un assassin réputé au sein du gang et, comme bien de ses membres, il y était entré tout jeune.

Ce roman qui se présente sous la forme d'un compte rendu d'enquête journalistique et non comme un récit romancé, est instructif mais il n'est pas toujours facile de s'y retrouver avec tous les sauts dans le temps et l'espace.

Il aurait sans doute été plus digeste si les auteurs avaient tenu compte d'une certaine chronologie linéaire et non faite de saut de puce dans tous les sens.

Évidemment, ces retours incessants sont nécessaires pour tout nous expliquer, pour couvrir toute l'histoire de ce gang (et des autres), pour nous présenter tous les protagonistes importants et leur C.V sanglant, mais cela rend la compréhension plus ardue.

Un roman sombre, sanglant, noir de chez noir, sans espoir aucun puisque les policiers, les prisons, les gouvernements, s'y cassent les dents et ne savent pas comment éradiquer le problème des gangs qui, telle une nébuleuse, un trou noir, attire tous les jeunes défavorisés du coin qui veulent être quelqu'un.

Malgré le côté un peu ardu dû à une chronologie qui n'est pas linéaire, ce roman qui n'est pas une fiction est passionnant à lire, intéressant et horrible aussi car nous sommes sans défense face à ces gangs.

Je pense qu'après ça, je vais soit lire "Ratatouille" ou un truc plus léger qu'une plume car cette enquête était plus que copieuse et fout les chocottes…

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Merci à Babélio et aux éditions Métailié de m'avoir permis la lecture de ce bon document qui se lit comme un thriller dans le cadre d'une masse critique.On va suivre la vie de Miguel Angel Tobar qui va devenir l'un des tueurs d'un gang salvadorien ,la Mara Salavatrucha 13.A l'age de 11 ans ,il fera sa première victime ,un contremaître qui violait sa soeur avec la bénédiction de son père alcoolique.
Repenti en tant que témoin protégé ,il va devenir la cible de tous ceux qu'il a fait tomber.
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Citations et extraits (51) Voir plus Ajouter une citation
Le gang le plus important du monde, le plus violent, le seul gang qui figure sur la liste noire du département du Trésor des Etats-Unis, au même titre que le cartel de Sinaloa, la yakuza japonaise ou l'euro-asiatique Cercle des Frères, n'a pas débarqué armée et toute-puissante dans le pays qui est aujourd'hui son plus important centre d'opération. Il est arrivé sous la forme de gamins qui dansaient ce qu'ils croyaient être du hip-hop dans des rues goudronnées sur lesquelles on aurait pu faire cuire un oeuf.
L'expulsion du gang a été une mauvaise idée es autorités américaines qui ont cru que cela réglerait le problème. Ils croyaient cracher dans l'eau, et ils ne faisaient que cracher en l'air. L'avenir allait le démontrer, quand les membres de gangs expulsés de Californie reviendraient clandestinement par dizaines à la conquête des quartiers de New York, des villes de Virginie, du Maryland, de Houston. Une fois au Salvador, les bandes ont gonflé aussi vite et furieusement qu'un poisson-lune ; et avec la même intention : ne pas se faire dévorer. Par la pauvreté, par l'abandon, par la violence des autres. Survivre, gonfler pour survivre. Se doter d'un corps permettant de se battre. Cela n'a pas été difficile. Aucune autorité ne faisait attention à eux. Alors que leur guerre débutait, une autre s'achevait qui avait duré douze ans et détruit le tissu social du pays.
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L'épidémie de mort salvadorienne empirait après l'administration du remède. Qui était de plus en plus utilisé; plan dit de "la Main de Fer", suivi du plan "Super Main de Fer". Et ainsi jusqu'en 2009. Six années de non-sens qui ont fait du Salvador le pays le plus meurtrier de la planète: 71 homicides pour 100 000 habitants.
Les prisons avaient été livrées aux prisonniers. Les membres des gangs qui y étaient entrés au début du siècle avaient versé leur sang derrière les barreaux pour ne plus être les pestiférés du système, les plus vulnérables. Peu à peu, à mesure que la police prêtait attention aux expulsés des Etats-Unis et que ceux-ci dominaient de plus en plus un pays appauvri, les prisons se sont remplies d'hommes et de femmes marqués sur leurs corps avec les chiffres et les lettres de leurs tribus : 18.MS.
Entre 2000, au moment de la mise en œuvre de l'opération Hollywood dans la région occidentale, et 2006, le nombre de personnes incarcérées a été pratiquement multiplié par deux, passant de 7 800 à 14 682, selon les données fournies par les centres de détention et recueillies par l'Institut universitaire d'opinion publique de l'Université jésuite du Salvador;
La majorité des pandilleros était comme des nomades dans les différentes prisons. Ils avaient été envoyés d'un établissement à l'autre pour sauver leurs vies. Passés à tabac, poignardés, moribonds, ils étaient retirés d'une prison contrôlée par la Raza pour une autre où arrivaient aussi les tentacules de la même bande. X, ce prisonnier de la MS accroché aux barreaux de Mariona en 2000 qui suppliait les gardiens de ne pas l'envoyer à l'intérieur, se souviendrait dix-sept ans plus tard au Texas que l'excès de harcèlement subi par les MS a fii par exploser le 19 février 2002.
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une fois que tu as franchi le pas et que tu as tué, tu as signé le pacte avec le diable, tu es un serviteur du diable, tu es une âme qui livre une âme...Et à tout moment, c'est ton âme à toi que tu peux livrer, parce que dans la rue,c'est comme ça ,quand c'est ton tour ,c'est ton tour...
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En 1975, les balles sifflaient souvent et dans les deux sens. Les enlèvements de grands patrons permettaient à la guérilla de se renforcer avec l'argent des rançons qui servait à acheter des armes. Elle trouvait une base arrière là où les manuels marxistes l'avaient le moins prévu : dans les communautés paysannes les plus isolées. C'est là qu'ont surgi les premiers campements qui se sont renforcés avec l'afflux de paysans qui ne voulaient plus subie la répression militaire.
En 1979, tout a changé en Amérique centrale. Au Nicaragua, les trois mouvements de guérilla se sont unis pour défaire le régime d'Anastasio Somoza Debayle, troisième représentant d'une dynastie qui entendait se perpétuer au pouvoir. C'était le signal qu'attendaient les mouvements de guérilla au Salvador. Il était possible d'instaurer un gouvernement socialiste grâce à la lutte armée. Les combats ont redoublé. Les bases arrière paysannes se sont renforcées au Salvador. Le gouvernement américain, redoutant de perdre toute cette arrière-cour, a augmenté son soutien au régime militaire salvadorien, aussi bien en termes de moyens que de conseil. A la fin de cette année, un service de renseignement d'Etat et un groupe d'infiltrés connu sous le sigle Orden (Ordre) avaient été mis en place. De l'autre côté, Cuba et le nouveau Nicaragua socialiste s'étaient empressé de soutenir l'insurrection salvadorienne, sur le plan de moyens comme de l'entraînement.
Tous ces efforts et toutes ces armes réclamaient des bras pour tirer. Dans un pays composé à plus de 60 % par des enfants, le résultat était prévisible. Des milliers de mineurs de moins de 15 ans ont été recrutés des deux côtés.
La guerre est une bête qui a besoin de se nourrir de chair fraîche et jeune.
Le Salvador, un pays vingt fois plus petit que la Californie, s'est lancé avec ses armés adolescentes dans l'abîme dont il devait ressortir en 1992 avec pour bilan plus de soixante-quinze mille morts et une immense quantité de personnes déplacées.
C'est avec des garçons droits sortis de cette folie que les gamins disco de Los Angeles, imitateurs de Travolta, ont voulu mesurer leur force… Ils croyaient que cela serait amusant.
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Dans la région occidentale productrice de café, la fin de la guerre a laissé de nombreux jeunes, garçons et filles, sans emploi. Des jeunes qui avaient grandi avec la guerre et auxquels celle-ci avait volé la possibilité de faire des études ou d'apprendre un métier. La violence était leur seul diplôme, et ils ont décidé de se mettre à leur compte pour l'exercer. Beaucoup d'entre eux ont refusé de rendre les armes et ont formé des bandes. L'objectif de ces groupes n'était pas l'avènement du socialisme ou la défense de la patrie. Le temps des idées était terminé, maintenant c'était leur tour. Ils volaient à l'étalage, attaquaient des fourgons, volaient du bétail et kidnappaient. La guerre leur avait laissé un flot d'armes où puiser. Certaines venaient du Vietnam et avaient transité par Cuba et le Nicaragua, d'autres arrivaient directement des stocks de l'armée américaine. Le Salvador a été, d'une certaine façon, le dernier avatar de la guerre froide. Alors qu'elle n'avait plus cours dans les officines diplomatiques, beaucoup cherchaient à la perpétuer par Salvadoriens interposés. Ces fusils, grenades et mitraillettes sont arrivés dans le plus petit pays d'Amérique centrale pour défendre des idées politiques et des grandes structures économiques, mais une fois l'échec consommé, de se battre pour les autres et qui avaient pour seule envie d'obtenir pour eux-mêmes ce qu'ils n'avaient pu obtenir pour le pays : la prospérité.
En 1992, la Mara Salvatrucha 13 était devenue un des gangs puissants de Californie. Ses territoires, même constamment attaqués, étaient stabilisés. Une vingtaine de cliques étaient organisées à leur manière à Los Angeles, la Mecque des gangs latinos. Les médias et les autorités ne donnaient pas encore à la ms-13 la notoriété qui serait la sienne au XXI siècle ; et, si Twitter avait existé, elle n'aurait pas eu droit à la moindre mention dans les tweets présidentiels, tels que ceux postés par Donald Trump en avril 2017. Deux décennies plus tard, ce président ignorant les qualifierait d'animaux tout court, et non d'animaux humains créés par d'autres humains.
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